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Attention, voilà Pogbinha !
Grand espoir du foot brésilien, Gerson est sur les tablettes de la Juve et du Barça, qui voient en lui le nouveau Pogba. En attendant l'Europe, le minot de 18 ans au nom de crack des seventies fait le bonheur de Fluminense.
Fla-Flu au Maracanã. Ce n’est pas l’affluence des grands soirs, mais les 28 000 spectateurs vont en avoir pour leur argent. Alors que le match est tendu comme strings et sunga de Copacabana, un éclair surgit dans la nuit, juste après la pause. Le petit Gerson, joyau de la formation de Fluminense, reçoit le ballon en pleine course, à droite de la surface. Contrôle parfait, coup de rein pour mettre deux défenseurs dans le vent. Tête levée, pour voir l’appel de Fred, qui n’a qu’à mettre le plat du pied pour glisser l’offrande au fond des filets. L’ancien Lyonnais court vers les supporters, met un genou à terre et attend son jeune coéquipier. L’avant-centre fait semblant de faire les lacets du minot et claque un bisou sur ses crampons orange fluo. « 70% de ce but lui appartient. Non seulement il me donne un caviar, mais en plus, son dribble est magnifique. Notre entente est parfaite » , s’enthousiasme l’attaquant de 31 ans, tout heureux de l’éclosion d’un futur crack qui pourrait presque être son fils.
Pré-contrat au Barça
Avant cette action de haut vol, Gerson avait déjà été à l’origine des deux buts de la victoire 3-2 des tricolores de Flu dans le classico le plus glamour du foot brésilien, avec deux ouvertures lumineuses. Le tout à 18 ans tout mouillés. « Il a un grand talent, tout le monde le suit de près. Il faut en profiter à fond pendant qu’il est chez nous. On sait que beaucoup de grands clubs européens sont sur les rangs, et dans quelques années, on verra Gerson jouer la finale de la Ligue des champions, comme Neymar » , prévient Fred. Comme par hasard, les deux finalistes de la C1 se l’arrachent. En février, la Juve dépêche un recruteur au championnat sud-américain des moins de 20 ans, pour mettre le grappin sur celui qu’elle présente comme le Pogba brésilien. Le Barça n’est pas en reste, et semble avoir pris une longueur d’avance. D’après la chaîne ESPN Brasil, les Catalans auraient déjà versé 3,6 millions d’euros au Fluminense pour avoir la priorité sur un futur transfert, en 2016, quand ils seront à nouveau autorisés à recruter. La Vieille Dame n’a pas jeté l’éponge et aurait fait cette semaine une offre à 20 millions d’euros, pour l’amener à Turin dès le prochain mercato. Tout ça pour un joueur passé pro il y a à peine trois mois…
Pour le moment, Gerson, qui est gaucher, comme le grand milieu de terrain de la Seleção mythique de 1970, est loin d’avoir la puissance physique du Français de la Juve. Il lui rend plus de 10 cm (1,76 m contre 1,88 m) et a encore le gabarit de crevette propre à la plupart des jeunes Brésiliens tout juste éclos du nid. En revanche, le milieu du Flu a un paquet de qualités qui rappellent le nouveau taulier des Bleus. Port altier, tête levée et surtout, une vista peu commune pour son âge. « J’ai une bonne vision de jeu. Quand il faut accélérer, je le fais, mais quand il faut jouer en cadence, on peut aussi compter sur moi. Et j’ai aussi une bonne frappe de balle » , disait Gerson il y a un an, quand le site officiel de la fédé lui demandait d’énoncer ces qualités, que ne renieraient sûrement pas Pogba.
Papa envahissant
Cela dit, comme souvent, le package comprend aussi son lot de problèmes qui collent aux basques des pépites brésiliennes. Le jeune Carioca n’échappe pas au cliché du gamin d’origine pauvre sous influence d’un papa envahissant. Par deux fois, il a refusé des sélections en équipe nationale de jeunes. La première, en U17, pour des raisons « familiales » . La seconde, il y a quelques semaines, ce qui lui vaut de ne pas être du voyage au Mondial U20, en Nouvelle-Zélande, à la surprise générale. « Gerson est un super joueur, mais le problème, c’est qu’il ne voulait pas aller en sélection. Lors du championnat d’Amérique du Sud, en février, il a dit au médecin et au kiné qu’il était blessé, et qu’il ne voulait pas participer au Mondial, parce que ça ne lui disait rien de partir 40 jours de son club. Il a même rappelé que son anniversaire était le 20 mai, et qu’il ne voulait pas le passer loin du Brésil » , révèle l’entraîneur Alexandre Gallo, sur Sportv.
Heureusement, le destin a mis une bonne étoile sur le chemin de Gerson. À 7 ans, il s’entraîne dans l’équipe de futsal de Fluminense, parce que Flamengo ne veut pas lui payer le transport. Ce sont pour les mêmes raisons que les Rouge et Noir ont aussi laissé filer Ronaldo, parti faire ses classes au modeste São Cristovão. Chez les poussins du Flu, il joue avec le petit Tom Veloso, qui n’est autre que le fils de Caetano, un des plus grands chanteurs du pays. Du coup, le petit gosse de banlieue passe des week-ends dans les quartiers chics et va voir les concerts en coulisses. Maintenant, c’est au tour de Tom de demander à son pote de signer au Barça, pour qu’ils aillent ensemble « faire la fête avec Neymar » .
Par Louis Génot, à Rio de Janeiro.