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Attention, deux finales peuvent en cacher une autre
Alors que la finale de la Coupe du monde féminine aurait logiquement dû occuper seule le haut de l'affiche ce dimanche, la voilà reléguée à un horaire pas franchement idyllique (17 heures), alors que le Brésil et le Pérou se disputeront la Copa América le même jour, seulement cinq petites heures plus tard (22 heures). Pour ne rien arranger, les boys de la Team USA affronteront ensuite le Mexique en finale de la Gold Cup à 21 heures, heure américaine (3 heures en France). Un calendrier qui semble révélateur de l'importance réelle que la FIFA alloue au foot féminin, loin des effets d'annonces et des discours consensuels.
Gianni Infantino l’avait pourtant promis. En 2017, le président de la FIFA assurait que nous verrions en France « la plus grande Coupe du monde féminine de tous les temps. Nous aurons un pays qui célèbre le football féminin, et ce virus du foot féminin va se propager à partir de la France, dans le monde entier. » Un tantinet grandiloquent, mais, alors que la Coupe du monde 2019 joue son dernier acte, il faut bien reconnaître que l’ultime affiche du tournoi a des allures de blockbuster épique. Avec, d’un côté, la superpuissance américaine, triple championne du monde et tenante du titre, et de l’autre, la sensation néerlandaise, vainqueur du dernier Euro. Tout aurait pu être parfait. Sauf que ce sommet, qui incarne le nec plus ultra du football féminin, ne se tiendra pas en prime time. À peine à 17 heures heure française, le moment où les enfants déballent le goûter. Et seulement cinq petites heures avant la finale de la Copa América, qui verra le Brésil s’opposer au Pérou.
Mépris, es-tu là ?
Pour ne rien arranger, la finale de la Gold Cup, qui verra s’affronter le Mexique et… les États-Unis, se tiendra, elle, à trois heures du matin heure française. Traduction ? En l’espace de dix heures, la FIFA et les différentes confédérations qui lui sont affiliées ont réussi à caser les finales de trois compétions majeures, où deux équipes des États-Unis prennent part. La soi-disant « plus grande Coupe du monde féminine de tous les temps » , qui servira de lever de rideau des rencontres à venir, en prend un sacré coup. « C’est une très mauvaise idée d’avoir trois finales le même jour, tançait la star américaine Megan Rapinoe, au moment d’évoquer ce drôle de calendrier. C’est la finale de la Coupe du monde ! Je ne sais pas comment cela a pu se produire. Ça me paraît incroyable. Je ne pense pas que nous soyons aussi respectées que le football masculin. »
Dans le viseur de la milieu offensive américaine, la CONMEBOL et la CONCACAF, qui ne se sont pas trop décarcassées pour partager un peu la lumière avec un foot féminin qui, en dehors des grandes compétitions internationales, est encore très peu visible médiatiquement. « C’était simplement une erreur, se justifiait au New York Times Victor Montagliani, le président de la CONCACAF. Il n’y avait aucune intention de pénaliser une autre compétition, évidemment. Je comprends tout à fait pourquoi certains fans ont été déçus. J’étais président de la Coupe du monde féminine(celle organisée au Canada en 2015, N.D.L.R.), donc je le comprends tout à fait. Mais au moment où l’erreur a été signalée, c’était très difficile pour beaucoup, beaucoup de raisons de simplement changer de jour, et nous avons essayé pourtant. »
Le blabla de la FIFA
Résultat ? Les téléspectateurs américains pourront se délecter de la finale du Mondial, à 11 heures, heure de New York, avec leur café et leurs tartines. Le même jour, les boys américains disputeront au Mexique le trophée de la Gold Cup à 21 heures heure américaine, un horaire franchement plus optimisé. Alors que les Américaines se présentaient en grandes favorites de ce Mondial et que leurs homologues masculins ont atteint la dernière marche de cinq des dix dernières Gold Cup, il n’était pourtant pas trop compliqué d’anticiper que les deux Team USA pourraient chacune se retrouver en finale de leurs tournois respectifs.
Surtout que la CONMEBOL et sa Copa América ont eu la brillante idée de s’interposer entre les deux matchs et que, au moment de faire le bilan, la FIFA ne trouve rien de mieux à faire que déballer un discours institutionnel d’une affligeante banalité : « Le calendrier des différents événements a fait l’objet d’un processus de consultation complet, qui a impliqué toutes les principales parties prenantes et a pris en compte différents aspects des calendriers internationaux des matchs des femmes et des hommes. » Une belle dose de blabla, qui achève de mettre en lumière le double discours de la Fédération internationale quant à la primauté qu’elle accorde à cette Coupe du monde féminine, dont la finale laissera quoi qu’il arrive un goût d’inachevé en bouche.
Par Adrien Candau