- Serie A
- 34e journée
- Fiorentina/AS Roma
AS Roma : une saison dingue, oui, mais pour quoi ?
Cette saison, l’AS Roma de Rudi Garcia réalise des merveilles. Les Giallorossi ont égalé le record du nombre de victoires obtenues en une seule saison de leur histoire (24) et, pourtant, tout cela passe quasiment inaperçu. Maudits turinois…
Saison 2012-13. 33e journée, la Juventus est leader avec 77 points, et s’en va tranquillement remporter son deuxième Scudetto de rang. L’année précédente, à la même époque, la Vieille Dame était déjà en tête, avec 71 points. Et le constat peut se poursuivre sur de nombreuses années auparavant. En 2010-11, au bout de 33 journées, c’est Milan qui truste la première position, avec 71 points. Quant à l’Inter de Mourinho, elle était en tête au bout de 33 journées lors des saisons 2008-09 et 2009-10, avec respectivement 74 et 68 points. Idem pour celle de Mancini, 75 points en 2007-08. Mais tout ça pour dire quoi ? Pour dire que l’AS Roma a de sacrées raisons d’avoir les boules. Car après 33 journées, la bande de Rudi Garcia affiche un total ahurissant de 79 points. Un total qui lui aurait donc permis d’être un solide leader lors des six dernières saisons. Manque de bol, cette année, la Juve bat tous les records. Et avec ses 79 points, la Roma n’est que deuxième, à huit longueurs de l’intouchable leader. Du coup, la performance des Giallorossi passerait presque inaperçue. De quoi haïr ces joueurs au maillot blanc et noir.
La différence lors de la confrontation directe
Cette saison hors norme, pour la Roma, a cependant déjà été couronnée par un record : celui du plus grand nombre de victoires obtenues en championnat. Le succès 3-1 décroché contre l’Atalanta a été le 24e de la saison, un total atteint seulement à deux reprises dans l’histoire du club : en 2007-08 et en 2009-10, deux années où les Giallorossi étaient arrivés deuxièmes derrière l’Inter. Selon toute vraisemblance, donc, ce record sera largement battu puisqu’il reste encore cinq journées, mais l’issue sera fatalement la même : une cruelle deuxième place. Alors, forcément, une question se pose : qu’a-t-il manqué à la Roma ? Pour de nombreux observateurs, il n’a rien manqué à cette équipe. Rien, sauf un match : la rouste 3-0 reçue à Turin face à la Juve. Alors, certes, avec des « si » , on refait le monde, mais force est de constater que si la Roma avait assuré lors de ce match, elle ne serait peut-être pas à huit points de son rival. De fait, si l’on enlève la confrontation directe entre les deux clubs, les bilans de la Juve et de la Roma en championnat sont pratiquement les mêmes : 27 victoires, 3 nuls, 2 défaites pour les Turinois, 24 victoires, 7 nuls, une seule défaite pour les Romains.
Les Giallorossi auront l’occasion de prendre leur revanche dans trois semaines, lorsqu’ils recevront au stadio Olimpico la Juventus. Mais il y a de grandes chances pour que ce match ne serve à rien. Car si la Juve prend sept points lors des trois prochains tours (Juve-Bologne, Sassuolo-Juve, Juve-Atalanta), elle sera sacrée championne d’Italie avant même de venir rendre visite à la Roma. De quoi, encore, donner des regrets aux joueurs de Rudi Garcia. Malgré cela, il faut regarder le verre à moitié plein : cette saison restera évidemment un immense succès pour eux. Les Romanisti peuvent assurer dès aujourd’hui leur qualification directe en Ligue des champions, en cas de succès sur la pelouse de la Fiorentina. Un objectif importantissime pour une équipe qui n’a plus joué le moindre match européen depuis un tour préliminaire d’Europa League perdu en août 2011 face au Slovan Bratislava. Trois ans, une éternité pour un club de ce standing. D’autant que l’été 2013, entre contestations des tifosi, insultes, rumeurs de départ de De Rossi et interrogations autour de l’arrivée de Rudi Garcia, ne laissait en rien présager une saison aussi exceptionnelle.
Écrire la suite
La Ligue des champions, d’accord. Mais cette saison ne va-t-elle être qu’un coup d’épée dans l’eau, comme avait pu l’être la saison 2009-10, avec Ranieri aux commandes ? A priori, non. Elle doit être le fondement d’un cycle. Et ce fondement est plus que prometteur, car la Roma est déjà forte. On est même prêt à parier que cette Roma-là n’aurait fait qu’une bouchée de la première Juve d’Antonio Conte, celle qui avait remporté le Scudetto en battant le Milan AC de Zlatan au sprint final. Après, il y a un paramètre à prendre en compte : la Louve a joué « sans pression » . De fait, on ne joue pas avec la même pression sur les épaules lorsque l’on est poursuivant, ou poursuivi. Rudi Garcia l’a d’ailleurs appris à ses dépens. Au début de la saison, personne n’attendait sa Roma, et les potes de Totti ont enchaîné dix victoires consécutives. La pression s’est alors fait sentir, et c’est justement à ce moment-là qu’ils ont laissé filer des points. La Juve est passée devant, et à partir de ce moment-là, les Romains ont joué libérés, exprimant alors tout leur potentiel.
Et ce potentiel, c’est le coach français qui a su le libérer au fur et à mesure. Il a redonné confiance à des joueurs qui sortaient de saisons compliquées (De Rossi, Balzaretti, Gervinho, Maicon, Leandro Castán), a transformé de bons joueurs en top players (Benatia, Strootman, Pjanić), a valorisé des jeunes qui seront à coup sûr les piliers de demain (Florenzi, Destro, Romagnoli) et a confié les clefs à quelques cadres capables d’entourer tout ce petit monde (De Sanctis, Taddei, Totti). Des bases solides, sur lesquelles construire la Roma 2014/15. « Ce sera une grande Roma, les tifosi le méritent, assure Rudi Garcia, qui aimerait bien voir l’inauguration du nouveau stade, en 2016. Mon désir est de garder le même effectif, et d’y ajouter quelques joueurs de qualité. Nous devons rêver en grand. » Dans les couloirs de Trigoria, le nom de Jackson Martínez circule déjà. Et d’autres suivront. Bref, la Roma ne gagnera pas le Scudetto cette saison. Mais ses performances folles, même si elles ne font pas forcément les gros titres des journaux à cause de l’encombrante Juve, ne serviront pas à rien. Elles serviront à écrire la suite.
Par Éric Maggiori