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Arriles Amrani : « J'ai fait signer Gigot à l'OM »
Après deux volets des Segpa, Arriles Amrani continue sa progression sur grand écran. Le Marseillais s’apprête à démarrer le tournage de 4 Zéros pour enfin lier ses deux passions, le cinéma et le football. Entretien avec un latéral droit qui n’a d’yeux que pour les attaquants.
Tu es actuellement à l’affiche dans Les Segpa au ski, où votre groupe participe aux olympiades d’hiver interlycées. Ça représente quoi, le sport, dans ces classes ?
C’est essentiel pour les enfants, ça sert à se libérer, se dépenser, s’exprimer. Les classes de Segpa sont quasiment toujours stigmatisées dans les collèges, donc taper dans un ballon peut permettre à certains jeunes de se révéler. Le revers de la médaille, c’est de leur faire croire qu’ils ne sont bons qu’à ça et qu’ils ne peuvent pas suivre les autres matières.
Certaines critiques estiment tout de même que le film poursuit cette stigmatisation.
Non, pas du tout. On est là pour mettre la lumière sur ces jeunes, pas pour se moquer d’eux. On a pété le score en dépassant le million d’entrées pour le deuxième, ce qui montre que c’est un sujet qui intéresse le grand public. Depuis 2016 (début de la série sur YouTube), qui a parlé des Segpa à part nous ? Dans notre bande, Walid Ben Amar était dans cette classe à l’époque et, depuis, a eu le bac. C’est notre référence.
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Tu étais aussi au Tournoi des défenseurs de l’enfance en novembre dernier. La question de l’enfance te préoccupe-t-elle particulièrement ?
J’y suis extrêmement attaché. J’ai eu les larmes aux yeux au moment d’échanger avec tous ces enfants violentés. Je suis papa de quatre enfants, je sais ce que c’est et j’essaye d’inciter tous les gens connus à s’investir dans ce domaine. Nous, on est là pour leur donner le sourire, ce n’est pas grand-chose, mais ça peut faire beaucoup.
Surtout, cet événement était au Vélodrome.
Ce stade, c’est toute ma vie. Avec mes parents, on habitait dans les bâtiments blancs juste en face du Vélodrome. J’ai passé toute mon enfance, à partir de 10 ans, à grimper le mur du métro pour accéder au stade. Je me démerdais pour y arriver à chaque fois, mais j’étais le seul parce que mes potes ne savaient pas escalader. On n’était pas très riches, donc j’allais au stade par mes propres moyens.
Maintenant, le cinéma ouvre les portes des loges ?
Ah, c’est sûr que ça aide forcément. Ce soir (samedi 27 janvier), je vais en loge pour OM-Monaco. Mais je vais très souvent dans celle de Hyper Focal (boîte de production marseillaise), je ne me mélange pas. On va dire que le cinéma m’a permis de changer de statut et m’évite donc d’encore grimper.
C’est aussi plus simple pour échanger avec les joueurs ?
Les footballeurs voyagent beaucoup et passent leur temps sur les écrans. Ils regardent énormément de séries et sont beaucoup sur YouTube. On a pu faire venir Dimitri Payet dans les Segpa grâce à ça. Samuel Gigot m’avait fait un message en me disant : « C’est trop bien ce que vous faites. On est du sud, vous nous régalez. » À l’époque, il jouait au Spartak Moscou, on s’est fait des vacances ensemble à Dubaï, et, depuis, c’est devenu mon gars sûr. J’ai appelé le président Longoria et je l’ai fait signer à l’OM.
En 2020, tu confiais, ironiquement, à La Provence : « Moi, je jouais avant en Ligue 2, je me suis fait les croisés, fin de carrière. »
(Il coupe.) J’étais super fort ! Malheureusement, ces ligaments croisés m’ont obligé à arrêter ma carrière. C’est dur, mais je vais en parler dans mon prochain album. (Rires.)
Honnêtement, c’est quoi ton niveau ?
PHB… J’étais nul ! Mon niveau, c’est de jouer sur un terrain vague où une trottinette ou un scooter peuvent nous couper la route à tout moment et dans une équipe où il y en a qui sont en retard, d’autres qui fument une clope à la mi-temps et d’autres qui arrivent bourrés en sortant de boîte. Moi ? J’étais arrière droit, c’est te dire le niveau. Je fais 1,62 mètre, donc sur corner, je me mettais au premier poteau.
Plutôt Habib Beye, César Azpilicueta ou Jonathan Clauss ?
Non, j’ai un gros penchant pour les avants-centres. Au Vélodrome, j’ai eu la chance de voir de très grands joueurs, en particulier Mamadou Niang et Didier Drogba, de vrais tueurs. Un peu plus bas, j’ai adoré Chris Waddle quand j’étais petit. Samir Nasri aussi, énorme coup de cœur pour ce minot. Je vais peut-être surprendre, mais j’aimais beaucoup Mathieu Valbuena. C’est un parcours inspirant, il n’a jamais rien lâché, on lui a mis des bâtons dans les roues, et finalement, c’est le joueur le plus marquant de sa génération à l’OM. En plus, j’ai un point commun avec lui sur la taille !
Qui est le joueur le plus fort que tu as vu au Vélodrome, mais qui ne jouait pas à l’OM ?
C’était pendant la Coupe du monde 1998. Je vendais des canettes devant le stade, puis je grimpais comme d’habitude pour me trouver une place. Grâce à ça, j’ai vu le match le plus marquant de ma vie entre le Brésil et les Pays-Bas, en demi-finales. Je peux te dire les compos par cœur, Rivaldo, Roberto Carlos, les frères de Boer, Patrick Kluivert, Dennis Bergkamp… Mais, je ne regardais qu’un seul joueur : Ronaldo « Il Fenomeno ». Je m’étais retrouvé en tribune Jean-Bouin, proche de la pelouse, et je l’ai vu passer devant moi. C’est un souvenir extraordinaire, pfiou !
Dans la websérie Sous écrous, tu arbores justement sa coupe mythique.
Oui, je voulais lui faire honneur à ma manière. (Rires.) Je l’aime tellement que j’étais même capable de faire sa coupe, il a marqué mon enfance, je devais bien lui rendre ça. Bon, je ne l’ai gardé qu’une semaine. C’est un hommage, mais il ne faut pas trop en faire quand même.
La prochaine étape, c’est d’interpréter le rôle de R9 ?
Le cinéma me permet de vivre mon rêve, mais là ça va être compliqué. Je vais bientôt commencer le tournage de 4 Zéros, de Fabien Onteniente. Ça représente évidemment beaucoup pour moi. Quand je pense aux films sur le football, je pense directement à Goal! – le 1 seulement, les autres sont allés trop loin –, mais aussi à 3 Zéros qui était très réussi.
Propos recueillis par Enzo Leanni