- Anniversaire d'Usain Bolt
Arrêtez de nous bassiner avec Usain Bolt et le football
Usain Bolt souffle ses 32 bougies aujourd'hui, pense toujours qu'il peut devenir footballeur professionnel, et vient de décrocher un essai avec un petit club australien. Mais ceux qui l'ont déjà vu avec un ballon savent que le Jamaïcain est loin d'être un crack, et que le feuilleton de sa reconversion est une façon ultra-efficace de continuer à faire parler de lui après sa retraite.
L’imitation est parfaite. L’ouverture des portes à l’aéroport, la grande silhouette qui apparaît valise à la main et écharpe de son nouveau club autour du cou, les flashs qui crépitent, la foule qui se bat pour un autographe, et les quelques banalités lâchées à la va-vite aux caméras venues en masse. Sauf que l’aéroport de Sydney n’a pas sorti les flonflons pour accueillir un vrai footballeur. Juste pour dire bonjour à Usain Bolt, arrivé en Australie pour tourner la suite de la grande comédie qui a commencé le jour où il a prononcé cette phrase : « Je veux devenir footballeur professionnel. »
Mais si le Jamaïcain a parcouru 15 000 kilomètres pour passer d’une île à une autre, ce n’est même pas pour signer son premier contrat professionnel. « Il est important de noter qu’Usain Bolt arrive chez les Central Coast Mariners pour s’entraîner pendant une durée indéterminée, a immédiatement précisé Shaun Mielekamp, le président du club. Et nous verrons s’il parvient à atteindre le niveau requis pour obtenir un contrat pro. Ça peut prendre 3 semaines, 3 mois, 6 mois, ou plus longtemps. L’avenir nous le dira, mais c’est excitant de voir tout ce que ça va apporter à notre région. » De son côté, l’homme capable de courir la ligne droite en 9 »58 ajoutait : « Tout cela est bien réel. » Une parodie de transfert censée nous faire oublier que la seule chose qui est bien réelle, c’est qu’Usain Bolt est un très mauvais footballeur et que sa soi-disant reconversion est surtout un gros délire en grande partie orchestré par Puma, le sponsor de l’ancien sprinteur.
« This is real. » ⚡️ @usainbolt has touched down and for now, calls the Central Coast home! #CCMFC pic.twitter.com/i9xkYfj9W0
— Central Coast Mariners (@CCMariners) 18 août 2018
« Personne ne m’a jamais vraiment vu jouer »
Pour les Mariners, petite équipe de fin de tableau du championnat australien domiciliée à Gosford (à une heure de route de Sydney), le bénéfice en matière de notoriété est total. Et en ne proposant que des sessions d’entraînement à Bolt, ils limitent au maximum le risque de fiasco sportif. Car il faut avoir les yeux en face des trous et prendre Usain Bolt pour ce qu’il est : le meilleur sprinteur (voire le meilleur athlète tout court) de tous les temps, une légende absolue de son sport, mais aussi un monsieur de 32 ans qui prouve qu’on peut avoir des pieds qui permettent de dépasser la barre des 43km/h, mais qui ne savent pas contrôler un ballon. Avant même de dire adieu à l’athlé, Bolt répétait déjà à qui voulait l’entendre qu’il tenterait sa chance dans le football une fois ses pointes rangées au placard, avec le rêve de jouer un jour à Manchester United. Mais depuis sa retraite, ce cirque a pris une nouvelle dimension et l’octuple champion olympique se vautre dans les déclarations grandiloquentes.
Dans une interview accordée à So Foot au printemps 2017, il enchaînait les énormités du genre : « J’ai l’ambition d’intégrer le top 50 mondial.(…)Si je me lance dans le football, je veux être un attaquant qui marque au moins 20 buts par saison. » Ou encore : « Je comprends le football. » Le tout en appelant son pied gauche « mon arme fatale » . À cette époque, Bolt pouvait encore se réfugier derrière cet argument massue qu’il utilisait à l’envi : « Personne ne m’a jamais vraiment vu jouer. » Mais il a eu la mauvaise idée de disputer quelques matchs filmés et de participer à quelques entraînements ces derniers temps, et donc de lever le voile sur son vrai niveau. Et force est de constater que le garçon est très limité.
Bolt = Capelle = Dossevi
On l’a vu sur la pelouse lors du match anniversaire des 20 ans de France 98, ou encore à un match caritatif en Angleterre quelques jours plus tôt. Usain Bolt court très vite et met des mines à n’importe qui quand il est lancé, mais il ne sait rien faire avec le ballon, et ses foulées sont beaucoup trop grandes pour avoir une conduite de balle précise. En fait, Bolt est l’exemple parfait pour prouver aux gens qu’être footballeur est un vrai métier. Après son essai à Dortmund en mars dernier, il avait d’ailleurs été dépeint comme un grand enfant venu s’amuser par Peter Stöger : « La chose la plus importante pour moi est qu’il ait pris du plaisir. Je pense qu’il est talentueux, mais que s’il veut jouer à un niveau plus élevé, il a encore énormément de travail à effectuer. »
Mais ceux qui prennent le plus de plaisir à regarder Bolt courir après son rêve de devenir footballeur, ce sont évidemment les patrons de Puma qui surfent sur la vague sans vergogne. À l’aéroport de Sydney, même si Puma n’est pas le sponsor officiel des Mariners, l’équipementier au félin avait distribué aux fans des T-shirts, des pancartes sur lesquelles était écrit « Welcome Usain » à côté du logo de la marque, et exposait ce même logo sur les panneaux publicitaires du terminal. En fait, le seul endroit où Usain Bolt peut jouer au football sans coup de pub et sans faire n’importe quoi, c’est sur PES 2018, où les développeurs lui ont créé un personnage que les gamers peuvent utiliser. Un Usain Bolt classé attaquant et à qui a été attribuée la généreuse note de 75, ce qui le place au même niveau que Capelle ou Dossevi, autres joueurs offensifs du même âge. Mais qui n’ont pas 99 en vitesse et en accélération, eux.
Par Alexandre Doskov