- Il y a dix ans, on disait...
Appelle-moi Youss’
Il y a dix ans, Youssouf Mulumbu était l'espoir central de la formation made in PSG. On disait que Paris tenait à lui, que l'avenir de son milieu allait lui appartenir et, finalement, il a préféré filer en Angleterre après le manque de confiance de Paul Le Guen. Pas grave, il s'est taillé un nom ailleurs.
Le 8 novembre 2006, 20 Minutes écrivait :
Pour lui, c’est comme ça que tout a commencé. « J’avais fait croire à mes parents que j’étais blessé et que j’étais dans les tribunes. Quand mon père a allumé la télé et qu’il m’a vu sur le terrain, il était en larmes. Ma mère, elle, rentrait à la maison. Sur le chemin, tout le monde lui a dit: « Dépêche-toi de rentrer, ton fils joue avec le PSG ! » Tout le monde était en pleurs. » Le 22 octobre 2006, la famille est devant son poste, dans un appartement à Épinay-sous-Sénart. Le fils, lui, cavale sur la pelouse de l’Abbé-Deschamps. Le PSG boxe alors avec l’AJ Auxerre pour ce qui ressemble de loin à une anecdotique rencontre de Ligue 1. Un gamin quadrille le terrain, coupe les lignes sous son numéro 33 et est couvé par l’expérience d’Édouard Cissé. Il s’appelle Youssouf Mulumbu et n’est alors personne.
Sauf au PSG, où son nom est issu de la génération championne de France des moins de dix-huit ans avec le club. Sur le banc parisien, Guy Lacombe cherche à lancer pleinement sa deuxième saison, tente de calmer sa culture de conflit – Vikash Dhorasoo vient alors d’être licencié par le club –, mais rien n’y fait. Le PSG repart de Bourgogne avec un triste nul (0-0), Lacombe sera viré moins de trois mois plus tard, mais un nouveau titi parisien vient de naître. Car en deux titularisations en Ligue 1 et une en Coupe de la Ligue, Mulumbu s’est taillé un nom et a commencé à se faire draguer. On parle de Valence, de l’Ajax, de Manchester United et il signera finalement son premier contrat professionnel en novembre 2006. L’ado est clair : « Le PSG, c’est mon club depuis que j’ai douze ans, je veux y signer. » Il n’y jouera finalement que cinq matchs de championnat, deux de Ligue Europa et se fera même expulser un soir de défaite à Benfica (1-3). Pour tailler sa réputation ailleurs.
« On m’avait demandé ce que j’allais faire à WBA »
Car le gosse de la cité des Gerbeaux, comparé dans un article du Parisien en janvier 2007, à « un mélange de Robinho et de Makelele, le Brésilien pour ce sourire qu’il affiche régulièrement et le Français pour les origines zaïroises » , va finalement quitter la France en janvier 2009 sous la forme d’un prêt avec option d’achat à West Bromwich Albion. Le tout après un prêt positif à Amiens et une première partie de saison sans jouer au PSG avec Paul Le Guen. Dur pour un mec qui pensait pouvoir profiter de son expérience de la Ligue 2 pour se faire une place dans son club formateur. Un peu comme pas mal de mecs de sa génération finalement, à l’exception de Clément Chantôme.
« À l’époque, on m’avait demandé ce que j’allais faire à WBA. Je venais du PSG, et le fait de choisir un club moyen de Premier League surprenait. C’est une question qui a été posée à d’autres joueurs français quand ils sont arrivés dans des formations moins huppées que Manchester United, Chelsea ou Arsenal. Car beaucoup de gens pensaient que nous jouerions peu, que c’était un choix par défaut.(…)Mais depuis quelques années, la tendance s’est inversée » , expliquait Mulumbu en octobre 2015. L’international congolais (34 sélections), qui a choisi les couleurs de la RDC en 2008 après avoir notamment gagné le tournoi de Toulon avec les Bleus en 2007, n’est jamais reparti d’Angleterre. Il est d’abord descendu en Championship avec WBA, où il est devenu indiscutable et est remonté, puis s’est fondu avec autorité dans le paysage de Premier League, devenant une figure au Hawthorns avant l’arrivée de Tony Pulis.
L’appel de l’OM
Depuis, Youssouf Mulumbu a rejoint Norwich pour lequel il joue encore cette saison en Championship. Un temps, cet été, la France a failli le revoir, puisque l’OM a pensé à lui pour remplacer Lassana Diarra, partant. Sauf que l’affaire a traîné et Mulumbu est resté au moins jusqu’en janvier : il sera alors libre de signer où il le souhaite à vingt-neuf ans. Reste qu’actuellement, le milieu des Canaris a la tête ailleurs : son statut de capitaine et ambassadeur de la RDC en Europe le place en première ligne du fait de la situation dans son pays, où les manifestations se multiplient contre le président Kabila. Voilà ce qu’il expliquait à France Football il y a quelques semaines : « De l’extérieur, j’observe ce qu’il se passe, je suis en contact avec des amis et ma famille, mais, hélas, je ne peux rien faire, excepté m’indigner. Je condamne naturellement ces violences. Quand un Congolais perd la vie, forcément, je suis touché. » Il a notamment ouvert en 2013 une fondation qui vise à aider par des projets humanitaires la population congolaise. L’âge humanitaire, celui aussi de la maturité pour un produit rapidement envolé. Loin de Paris, qui ne tient plus vraiment à lui.
Par Maxime Brigand
Propos de Mulumbu tirés du Parisien et d'Eurosport.