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Appelez-le Mister Motta
Pour sa grande première sur le banc d'une équipe professionnelle face à Brescia ce samedi, Thiago Motta a concocté ce qui ressemble à une potion magique tactique, alors que les trois joueurs qu'il a fait entrer en jeu en seconde mi-temps y sont allés chacun de leur but. Du jamais-vu dans toute l'histoire de la Serie A, tout simplement.
C’est un fait, le Genoa, Thiago Motta connaît par cœur. L’ex-milieu du PSG et de l’Inter a explosé au yeux de la Serie A toute entière, précisément quand il évoluait au club génois, lors de l’exercice 2008-2009. À l’époque, le Griffon, piloté par Gian Piero Gasperini et avec Diego Milito en attaque, était l’une des formations les plus enthousiasmantes de Serie A et finissait même cinquième du championnat. Onze exercices plus tard, l’équation est sensiblement différente pour les Rossoblù: 19e au soir de la 8e journée, récemment giflé 5-1 par Parme, le Genoa déprime, ce qui poussait son président, Enrico Preziosi, à virer son coach, Aurelio Andreazzoli, le 22 octobre. Pour le remplacer par Motta, revenu à ses premières amours et pour exercer pour la première fois de sa carrière à la tête d’un groupe professionnel. Premier obstacle dans le viseur du néo-entraîneur : le Brescia de Balotelli, que le Genoa recevait ce samedi 26 octobre au stade Luigi-Ferraris.
Motta Anatomy
Un match critique dans la course pour le maintien, que Motta a entamé courageusement sur le tableau noir, en redistribuant pas mal de cartes. L’Italien avait prévenu son monde : « Nous avons une équipe intéressante, à la fois qualitativement et quantitativement. » Du blabla communicationnel dans la bouche de certains, mais des convictions vite mises en pratique pour Motta, qui décidait de sortir Christian Kouamé du onze type, un cadre de l’attaque du Griffon, au profit du Germano-Turc Sinan Gümüş. Transféré cet été et jusqu’ici abonné au banc, l’attaquant de 25 ans, qui a roulé sa bosse cinq saisons du côté de Galatasaray, affiche un profil plus expérimenté que son équipier ivoirien de 21 ans. Son goût prononcé pour l’effort défensif a aussi pu inciter Motta à l’aligner d’entrée, alors que ce dernier, contraint de travailler dans l’urgence, a semble-t-il d’abord préféré revenir aux fondamentaux d’un football de combat, en attendant d’affiner son collectif dans les prochaines semaines. Sa volonté de maintenir le Genoa dans une formation en 3-5-2, une animation caractéristique du Griffon depuis plusieurs saisons, semble également aller dans ce sens.
Les changements, c’est maintenant
Les Rossoblù délivreront néanmoins une première période laborieuse, où Brescia ouvre le score sur un coup de pied arrêté botté par Sandro Tonali. Motta, conscient que la sauce ne prend décidément pas, reste audacieux en sortant le milieu défensif serbe Ivan Radovanović (aligné en défense centrale ce samedi) pour le bizut Kevin Agudelo, un milieu box to boxcolombien qui n’avait jusqu’ici pas disputé le moindre match de Serie A. Un peu taré, mais tout de suite payant : à l’heure de jeu, le gamin de 21 ans profite d’un service de Pinamonti dans la surface pour marquer rageusement, du pied gauche. Entre-temps, Motta a aussi complètement re-lifté son attaque, en lançant Kouamé et le vétéran Goran Pandev dans la danse. Bien vu : son équipe gagne en verticalité devant comme en maîtrise au milieu, comme en attesteront les 65% de possession de balle et les 15 tirs tentés par les Génois, mais aussi la prestation de patron de Lasse Schöne. À la baguette dans l’entrejeu, l’ancien joueur de l’Ajax aura cumulé plus de 90% de passes réussies, signé 2 tirs et réussi tous les dribbles et tacles qu’il a tentés.
Logiquement, le Genoa déroule et Kouamé vient donner l’avantage aux siens, d’une superbe volée couchée. Pandev, à la suite d’un service de l’Ivoirien, achève de confirmer Motta dans ses choix, en plantant un troisième et dernière pion, d’un caramel dans la lucarne opposée. C’est la première fois dans l’histoire de la Serie A que trois remplaçants marquent les trois buts de leur équipe. Fou, mais encore un peu léger pour gonfler la tête bien mise de Motta, très sage en conférence de presse d’après-match : « Les changements décisifs ? C’est une chose intéressante, mais la moins importante pour moi. Nous avons tous été bons… J’ai vu un cœur énorme de la part de mes joueurs ce soir, même dans les difficultés que nous avons affrontées en équipe et c’est très important. » Avant tout de même de finir sur une note résolument optimiste : « À Gênes, j’ai passé de merveilleux moments en tant que footballeur, je suis convaincu que cela se reproduira cette fois-ci. » Une certitude demeure : au sortir de la 9e journée de Serie A, les Rossoblù ne sont plus relégables, et le second chapitre de la romance de Thiago Motta avec le Genoa pouvait difficilement mieux débuter.
Par Adrien Candau