- Ligue des Champions – Quarts – Real Madrid/APOEL Nicosie
APOEL, il faut partir maintenant
Sèchement battue à l’aller à domicile, l’équipe poil à gratter de cette édition de la Ligue des Champions va se faire sortir ce soir, aux portes du dernier carré. Qu’elle sèche ses larmes : son parcours a déjà été suffisamment remarquable et quasi tous ses prédécesseurs dans ce second rôle exotique ont connu cette même fin. Hommage.
Pour ceux qui n’auraient pas encore bien saisi la bizarrerie de l’histoire, l’APOEL, c’est un club doté d’un budget d’à peine 10 M€ (en gros les finances d’un pensionnaire du ventre mou de L2), avec pour seule « star » un attaquant brésilien, Aílton, transféré de Copenhague il y a deux ans contre une indemnité record de 0,8 M€. Si l’on se fie à la simple et implacable logique économique qui régit le football moderne, il n’y avait aucune chance de voir ce petit poucet intégrer le top 8 européen. Preuve en est qu’il reste encore une part de magie dans le foot 2.0. L’APOEL est un enfant de la réforme Platini, qui a redonné sa chance à tous les champions nationaux de la zone UEFA de se frotter aux grands d’Europe. Le vainqueur du dernier championnat chypriote a su en jouer un maximum, débutant son parcours dès la mi-juillet par le second tour de qualification (contre le champion albanais), le poursuivant par le troisième tour (face au Slovan Bratislava), puis le barrage face au Wisla Cracovie, pour se hisser courageusement jusqu’à la phase de groupe.
Opposés dans le groupe G à trois récents vainqueurs de la Ligue Europa, le Zénith, le Shakhtar et Porto, les Chypriotes n’avaient a priori pas d’espoir de s’en tirer. Et pourtant… Vainqueurs dès leur premier match des puissants champions russes dans le bouillant GSP Stadium de Nicosie, ils ont tout de suite su prendre les points, au rythme idéal d’un point à l’extérieur et trois à domicile, avec au bout une qualification acquise dès l’avant dernière journée. Premiers de la poule, les « David » ont ensuite pu éviter quelques très « Goliath » en huitième (Barça, Real, Bayern), pour hériter de l’OL, avec l’avantage de recevoir au retour. Avantage dont ils ont su profiter pour déstabiliser une bien fébrile équipe lyonnaise, refaire rapidement leur retard concédé à l’aller et arracher la qualif’ lors de la séance de tirs aux buts.
Seul le Dynamo en 1999…
Et voilà comment un nain d’Europe se retrouve à disputer un quart de finale de C1 face au Real Madrid. Bon là par contre, fini les conneries, la magie de la Coupe, tout ça, l’aventure va s’arrêter. L’APOEL est certes parvenu à tenir le siège durant les trois premiers quarts d’heure du match aller, mais les trois buts encaissés dans les dernières minutes, à la maison qui plus est, s’avèrent rédhibitoires. Pas grave, l’exploit est déjà beau pour le 62e club au dernier classement UEFA, porte-drapeau d’un championnat désormais classé au 16e rang. L’épopée de l’APOEL cette saison lui a d’ailleurs fait gagner quatre places, pour passer devant les championnats écossais et roumain notamment.
La performance du club de Nicosie s’inscrit à la suite des précédents exploits des « petits » en Ligue des Champions, ces formations non issues du top 5 européen. Si on ajoute à ce top 5 le Portugal et les Pays-Bas, dont les représentants performent régulièrement à l’échelle continentale, on ne se retrouve qu’avec une poignée de clubs étant parvenu à faire aussi bien que l’APOEL : le Shakhtar la saison dernière, le CSKA en 2010, Fenerbahce en 2008, Panathinaikos en 2002, Galatasaray en 2001… Tous ayant également échoué en quarts. Il faut remonter à l’édition 1998/1999 pour retrouver le seul représentant des championnats mineurs de l’ère post-Bosman ayant atteint le dernier carré de C1. Cette saison-là, le Dynamo Kiev de Rebrov et Shevchenko avait buté sur le Bayern, aux portes de la finale, après avoir sorti le Real au tour précédent. Une performance que ne renouvellera pas l’APOEL ce soir. L’équipe frisson va dès demain devoir se reconcentrer sur le championnat, où elle est à la lutte avec trois concurrents pour décrocher un nouveau titre national. Et tenter de rejouer les poils à gratter de la C1 la saison prochaine. Allez, à bientôt certainement.
Par Régis Delanoë