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Antoine Griezmann, presque parfait
Depuis l'Euro U19 2010, la France a appris à connaître Antoine Griezmann, talent pur ignoré par les centres de formation hexagonaux et recueilli, puis formé au Pays basque. Après une première saison réussie à l'Atlético Madrid, le Mâconnais peut confirmer et s'affirmer comme l'un des tout meilleurs joueurs au monde.
Lorsqu’Antoine Griezmann, auréolé d’une bonne Coupe du monde, a quitté la Real Sociedad pour l’Atlético Madrid le 27 juillet 2014, il n’était pas inapproprié de s’inquiéter pour lui. Avec son poids plume et sa tête de gamin qui dort encore le pouce dans la bouche, comment le jeune Français allait-il s’en sortir hors de son cocon basque ? Qui plus est dans l’équipe de bonhommes de Diego Simone, ce dernier étant tout sauf un sentimental ? Malgré un but décisif en Supercoupe d’Espagne face au Real Madrid fin août, le Mâconnais a d’ailleurs mis du temps à trouver la bonne carburation, son premier but en Liga ne tombant que le 1er novembre, jour de victoire contre Cordoue (4-2). Entre-temps, l’international français a été baladé à différents postes, puis critiqué ouvertement fin octobre par son nouveau coach, l’appelant « à donner beaucoup plus » , ainsi qu’à travailler pour « devenir un joueur plus complet » . En clair, cela voulait dire « bouge ton cul si tu ne veux pas le poser définitivement sur le banc » .
Triplé libérateur à San Mamès
Le message a visiblement été reçu par l’attaquant qui, après avoir marqué ses premiers pions en Liga, a définitivement validé son statut de titulaire quelques jours avant Noël. À San Mamès pour un choc contre l’Athletic, Griezmann a marché sur l’eau : un premier but de la tête pour égaliser, une frappe limpide du gauche après un délice de contrôle en pleine course de l’extérieur du droit, puis un but de raccroc en conclusion d’une action où il avait tenté d’être passeur décisif et fait preuve d’une conduite de balle exemplaire. Depuis ce triplé et succès 4-1 en terre basque, le Français a enchaîné les prestations de haut vol pour finir sa première saison chez les Matelassiers à 22 buts en Liga – meilleur total d’un football non génétiquement modifié en Espagne -, et deux de plus en Ligue des champions. À 24 ans, le milieu offensif semble avoir changé de dimension : recruté pour 30 millions d’euros il y a un an, le Français a récemment été prolongé avec une clause libératoire à 78 millions d’euros. De quoi refroidir les nombreux prétendants comme Chelsea – qui a finalement misé sur Pedro, moins cher – Manchester United ou le Bayern Munich. Quid du PSG ? À la recherche d’un milieu offensif gauche, le club de la capitale a jeté son dévolu sur Ángel Di María après s’être fait doubler par MU sur Memphis Depay, mais nul doute que Griezmann aurait pu faire l’affaire, étant aujourd’hui l’un des rares joueurs français qui ne dépareilleraient pas aux côtés de Zlatan Ibrahimović et consorts.
Passer un cap en Ligue des champions et en sélection
À 24 ans, le joueur de l’Atlético de Madrid a même réussi à faire oublier Franck Ribéry en équipe de France, avant même que celui-ci ne se prenne un abonnement annuel à l’infirmerie du Bayern Munich. À l’aube de la saison 2015-2016, on peut considérer Griezmann, au même titre que Raphaël Varane et Paul Pogba, comme l’une des meilleures garanties de l’équipe de France en vue de l’Euro 2016. Capable de jouer à tous les postes offensifs, intelligent dans ses déplacements, technique et redoutable devant le but, Antoine Griezmann apporte à Didier Deschamps une solution unique en équipe de France : un élément offensif imprévisible capable de créer le danger dans toutes les zones de jeu et position, comme en atteste ses éclairs de génie – son retourné acrobatique contre Lyon il y a deux saisons – ou sa capacité à marquer de nombreux buts de la tête – 5 en Liga la saison passée – malgré un gabarit de joueur de tennis de table. Mais en Bleu, il n’a pas encore trouvé sa véritable place – celle qu’il assume à Madrid -, en partie car le onze de Didier Deschamps n’est pas encore en place. Peut-être qu’il lui incombera, comme il l’a fait à l’Atlético, d’imposer son registre plutôt que de vouloir se fondre dans le moule. Avec ce qu’il prouve depuis maintenant cinq ans et sa victoire à l’Euro U19 avec les Bleuets, Antoine Griezmann n’a plus à se poser de question sur son potentiel : il doit viser haut, très haut, et pourquoi pas tenter de titiller un peu plus le duo Messi-Ronaldo en Liga et prendre en main le rôle de leader offensif de l’équipe de France. Les saisons se concluant par une grande compétition internationale étant propices à la consécration des plus grands, 2015-2016 sera peut-être l’année d’Antoine Griezmann.
Par Nicolas Jucha