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Anissa Lahmari : « Il n’y avait pas de mots, juste de la joie et des pleurs »
Elle ne compte que quatre sélections et pourtant, Anissa Lahmari a déjà marqué l'histoire du Maroc : grâce à son but face à la Colombie, les Lionnes de l'Atlas défieront la France en huitièmes de la Coupe du monde. Entretien avec une joueuse forcément heureuse.
Tu as pensé à quoi, quand tu as marqué ce but décisif ?
Sincèrement, je ne pensais à rien. J’étais juste contente que le ballon soit au fond des filets, et de fêter ça avec mes coéquipières. Je ne réalise pas du tout qu’on est en huitièmes, parce qu’il y avait deux possibilités pour qu’on y aille : soit de gagner par quatre buts d’écart face à la Colombie, soit que l’Allemagne fasse un match nul ou perde. Donc non, à ce moment-là, je ne réalise pas qu’on est en huitièmes. Au contraire, je me dis qu’il faut sûrement aller marquer encore d’autres buts.
Tu croyais à la qualification, avant cette rencontre ?
Bien évidemment ! Débuter un match sans y croire, ce n’est pas la Coupe du monde ! Le coach nous l’a bien fait comprendre à la causerie, et on était toutes en accord sur le même objectif : gagner ce match, pour avoir une chance d’être qualifiées. Ça a tourné en notre faveur, mais on y croyait toutes.
Comment est-ce que vous avez relevé la tête, après le 6-0 encaissé face à l’Allemagne ?
Ce qui a fait qu’on s’est relevé rapidement, c’est qu’on est dans une Coupe du monde et qu’il y a trois matchs de poule. Le premier s’est passé comme il s’est passé avec l’Allemagne en face, la deuxième équipe mondiale. On a été assez lucide sur ça, après le score était assez lourd. On a vite laissé ce match derrière nous. On a vu ce qu’on a fait de bien parce qu’il y avait de bonnes choses, mais aussi ce qu’on a fait de moins bien et on a travaillé dessus. On s’est juste préoccupé du match face à la Corée du Sud, c’est ce qui a fait qu’on s’est relevé assez rapidement de cette rencontre.
Ça fait quoi, d’avoir marqué l’histoire ?
Franchement, on est vraiment toutes et tous fiers d’avoir marqué l’histoire pour le peuple marocain. Pour sa majesté, le roi Mohammed VI, et surtout pour toute l’Afrique. C’est important que les pays africains avancent dans ces compétitions internationales, on est fiers aujourd’hui de faire partie de ces pays-là. Cette qualification représente de la fierté, de la joie et de l’amour. Beaucoup de choses… Il n’y avait pas beaucoup de mots, juste de la joie et des pleurs après le match. Maintenant, on a la possibilité de continuer. Donc j’espère qu’on va donner le meilleur de nous-mêmes, et que le match contre la France se passera bien.
Félicitations à Anissa Lahmari, élue joueuse du match après son but historique qui a envoyé le Maroc en huitièmes de finale de la CDM. 🇲🇦#FIFAWWC #FIFAWomensWorldCup2023 pic.twitter.com/5uTDG3HVMt
— Footeuses (@foo_teuses) August 3, 2023
Justement, qu’est-ce que représente pour toi la rencontre contre les Bleues ?
C’est une fierté, je ne pouvais pas rêver mieux comme huitième de finale. J’ai grandi en France, j’y suis née et j’ai fait pratiquement toute ma carrière en France (hormis un passage de deux mois à Reading en 2017, NDLR). Au-delà de ça, j’ai des amis là-bas dont ma meilleure amie. Donc j’ai à cœur de jouer ce match, et je suis vraiment contente d’être tombée contre elles.
Le parcours des garçons en décembre, ça vous a donné des idées ?
Et pas qu’à nous ! Je pense que ça en a données à plein de pays dans le monde, plein de garçons et filles. Forcément, on a suivi la magnifique Coupe du monde qu’ils ont faite au Qatar et chaque fille ici s’inspire un peu de ce qu’ils ont pu faire. Après, chaque compétition est différente… Mais bien évidemment, ça a été une inspiration.
Tu sens qu’il y a un engouement particulier, autour de la sélection ?
Franchement, c’est fou. On est à l’autre bout du monde et dans chaque ville où on est allées, il y avait toujours des supporters marocains. Je n’ai qu’une hâte, c’est d’être à la CAN (en 2024) parce qu’elle est chez nous au Maroc (comme en 2022, NDLR). Il y a un vrai engouement, le peuple marocain est partout donc ça fait vraiment plaisir.
Tu as été appelée par l’Algérie en début d’année avant de finalement rejoindre le Maroc pour ce Mondial. Tu suivais le développement de cette équipe ?
Évidemment. J’ai ma coéquipière à Guingamp, Sana Daoudi, qui fait partie de l’équipe nationale. Malheureusement, elle s’est blessée. Donc elle n’est pas avec nous, mais elle m’en avait parlé. Je les ai suivies à la CAN, j’étais au courant que le foot féminin se développait au Maroc, que ce soit par rapport à l’équipe nationale ou au championnat.
Tu as connu de bons clubs en France, comment juges-tu les moyens mis à disposition des Lionnes de l’Atlas ?
Ils m’ont surpris. C’est top, il y a vraiment tout à disposition. En étant passée par des clubs comme le PSG ou les sélections de jeunes en France, où les moyens mis à disposition sont importants, je peux dire que c’est franchement le top. Il n’y a rien à dire, que ce soit sur le staff technique, le staff médical, les déplacements, les équipements, tous les détails à côté… Ils font vraiment tous un bon boulot et c’est agréable, surtout pour le travail.
Tu es libre de tout contrat, est-ce que ce Mondial représente aussi l’occasion de te montrer ?
Forcément. C’est une Coupe du monde, c’est regardé par toute la planète et tous les continents. Toute joueuse se montre, s’il s’avère que j’arrive le faire. Ce sera intéressant, parce que je suis effectivement en fin de contrat. Et j’ai surtout décidé d’attendre la fin de la compétition pour faire un choix, quel que soit le club.
Tu as quand même une petite idée de là où tu voudrais aller ?
Je connais bien le championnat français et j’ai aussi eu la chance de jouer en Angleterre, donc je pense que ça serait bien de découvrir un autre championnat. Lequel ? Je ne sais pas encore ce que l’avenir me réserve, mes agents vont s’occuper de ça. Ce qui m’importe, c’est la sélection.
Propos recueillis par Florian Porta