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Anigo n’a pas passé l’été

Par Farouk Abdou
Anigo n’a pas passé l’été

Les jours de José Anigo à Tunis sont comptés. Annoncé mardi matin, son départ a été démenti quelques heures plus tard, mais sera effectif ce week-end. L'ancien entraîneur de l'OM était chargé de sauver l'année 2015 de l'Espérance en remportant l'une des 2 compétitions où les « Sang et Or » étaient encore en lice durant l'été, et ainsi jeter les bases de la reconstruction d'un club en plein déclin. Six matchs et quatre défaites plus tard, le couperet a fini par tomber et la rencontre de Coupe d'Afrique samedi sera sa dernière.

Pour comprendre ce qu’est venu faire Anigo dans cette galère, il faut remonter à début juin. L’Espérance de Tunis, sans coach depuis que le Portugais José Morais est parti, pense avoir trouvé l’homme qui donnera un nouvel élan à un club 26 fois champion de Tunisie, mais englué dans une période tourmentée. En fin de contrat avec l’Étoile du Sahel, l’expérimenté Faouzi Benzarti semble avoir donné son accord pour un sixième come-back à la tête de l’EST. Certains médias tunisiens se mouillent, et annoncent carrément que le contrat est signé. Bien vu ? Non, raté. Habitué aux volte-face (il a fait faux bond au Raja Casablanca quelques jours plus tôt), Benzarti laisse l’Espérance en plan au dernier moment. Le nom d’Anigo apparaît alors dans une liste de rumeurs/plans B/propositions qui comprend également René Girard. Finalement, le 21 juin, le Marseillais débarque à Tunis et met fin à son exil à Marrakech, où il chapeautait le recrutement de l’OM en Afrique. Les Espérantistes affichent leur scepticisme vis-à-vis d’un technicien sans référence au Maghreb. De l’autre côté de la Méditerranée, les Marseillais multiplient les railleries, prédisant à José un bail pas très long.

Des propos et des attitudes qui interpellent

L’ex-Olympien découvre un club en pleine dégringolade et encore sonné par 5 mois catastrophiques au cours desquels il a pratiquement tout perdu : l’EST, éliminé de la Ligue des champions 2015 en huitièmes de finale, ne participera pas non plus à l’édition suivante du fait de sa troisième place en championnat. Impensable pour l’un des clubs phares du continent, qui a atteint le dernier carré de l’épreuve-reine quatre ans d’affilée (entre 2010 et 2013). Mais l’été ne s’annonçait pas paisible pour autant. Avant la reprise du championnat en septembre, l’Espérance avait encore deux titres à aller chercher : la Coupe de Tunisie en août, et la Coupe de la confédération (équivalent africain de la Ligue Europa) où les Sang et Or ont été reversés. Juste avant l’arrivée d’Anigo, l’EST passe le tour de barrage et se retrouve dans les huit clubs encore en lice. Cerise sur le gâteau, le tirage au sort lui offre une poule de prestige : l’Étoile du Sahel, ennemi héréditaire, les Égyptiens d’Al Ahly – tenant du titre et octuple champion d’Afrique – et le coriace Stade malien.

Vu l’importance que donnent les clubs tunisiens à cette coupe (7 finales et 4 sacres sur les 10 dernières années), on peut parler d’objectif primordial pour sauver l’année 2015. Et à la surprise générale, en une déclaration inexplicable, Anigo réduit cet objectif au rang d’aimable tournoi de sixte estival ou de premier tour d’Intertoto. La veille du match contre l’Étoile, il déclare dans le plus grand des calmes : « Cette compétition me gêne un peu, je préfère me concentrer sur la coupe et la préparation du championnat » énumérant les excuses du manque de fraîcheur, de l’impossibilité d’utiliser les recrues, et de la justesse de l’effectif. Les excuses ont beau être recevables, déclarer cela la veille d’un EST-ESS, confrontation la plus chaude du pays avec le derby de Tunis, est une hérésie et dénote d’une méconnaissance flagrante du contexte tunisien et de l’importance de la compétition. Anigo se serait-il permis de dire ça, 24 heures avant un OM-PSG ou un quart de finale de Ligue Europa ? La détérioration rapide de l’état d’esprit du Marseillais a également étonné. Alors qu’il affichait un réel optimisme et un sacré enthousiasme à l’idée de relever ce challenge, Anigo a rapidement paru désorienté et montré des signes de résignation pendant les conférences de presse, constatant en marge de la défaite face au Stade malien à quel point « la compétition est et allait être difficile pour moi, et je le découvre de plein fouet » .

Des circonstances atténuantes, des choix sportifs discutables

L’EST perd les trois premières journées de la phase de poules, et il est certain que le discours d’Anigo a influé négativement : au cours des deux défaites à domicile face à l’Étoile (0-1) et au Stade malien (1-2), l’Espérance a joué en supériorité numérique 105 minutes sur 180 (une heure contre l’ESS, une mi-temps contre les Maliens). Et pourtant, à chaque fois, c’est l’équipe d’en face qui a affiché plus d’intensité dans le jeu et plus de détermination. Côté tunisois, une bonne partie du onze a baissé les bras, vendangé des occasions à tour de bras avec fatalisme, et montré une incapacité à se révolter. En déclarant que certains joueurs « n’ont pas le niveau pour jouer ici » celui qui a assuré l’intérim à quatre reprises sur la Canebière a aussi réussi à se mettre à dos une partie de son groupe. Deux victoires à l’arraché (1-0) face au Stade malien à Bamako et en Coupe lui offrent néanmoins un léger sursis.

À la décharge d’Anigo, de nombreux entraîneurs auraient été déboussolés par le flou sportif dans lequel le club nage actuellement. Plus de 15 joueurs ont quitté le Parc B (surnom du siège de l’Espérance dans la capitale, le Parc A désignant le fief du Club africain), dont plusieurs départs significatifs d’une fin de cycle qui a traîné en longueur : des internationaux dans l’impasse (l’ex-numéro 10 de la sélection Oussama Darragi, l’attaquant Ahmed Akaichi), un cadre de l’équipe parti libre en dépit d’une valeur marchande conséquente – le Ghanéen Afful – sans parler du flop brésilien Magno Cruz. Treize joueurs ont effectué le chemin inverse, et l’EST n’a pas lésiné sur les moyens pour renouveler l’effectif, en rapatriant de Metz l’ailier international Fakhreddine Ben Youssef et en recrutant le jeune attaquant des Espoirs tunisiens, Edem Rejaibi. Anigo ne pouvait pas utiliser toutes ses recrues pour la compétition continentale, et le chantier de la reconstruction de l’équipe était de toute manière trop conséquent pour espérer une efficacité immédiate : trouver une défense centrale fiable, recomposer le milieu de terrain autour de Houcine Ragued, une animation offensive à repenser complètement, etc. Entre les blessés, les joueurs hors de forme, ceux qui n’ont pas de préparation dans les jambes, ceux qui n’ont pas le niveau, le technicien français a dû bricoler à quelques reprises, en particulier au premier match (défaite 3-0 au Caire face à Al Ahly 6 jours après son arrivée).

Les Français en Tunisie, tout ou rien

En revanche, il n’y a pas d’excuse pour l’élimination de Coupe de Tunisie face au CS Hammam-Lif, goutte d’eau qui a fait déborder le vase. La décision d’Anigo de relancer l’Ivoirien Coulibaly (en difficulté et prêté la saison dernière) a fait grincer pas mal de dents. Le choix de sortir à l’heure de jeu les deux joueurs les plus en vue durant le match (les Nigérians Eduok et Bulbwa) pour faire entrer deux éléments à la rue depuis plusieurs mois et vertement critiqués par Anigo les semaines précédentes (Mhirsi et Jouini) a suscité l’incompréhension et pénalisé l’équipe. L’EST menait 1-0, et le reste du scénario était cousu de fil blanc : occasions vendangées, équipe sur le reculoir, égalisation adverse à la 88e, défaite dans la prolongation.

Le départ d’Anigo était à la une de tous les journaux tunisiens mardi. Mais le club, qui n’avait pas officialisé, annonce en fin de journée qu’il est maintenu dans ses fonctions. Tout porte à croire que les dirigeants, qui ont repoussé la démission du Français, voulaient temporiser un peu en attendant de trouver un successeur, ou au moins jusqu’à la tenue de l’assemblée générale élective du club, prévue le 19 septembre. Mais ses envies de départ auront finalement le dernier mot. L’Espérance affrontera donc Al Ahly samedi à Tunis pour la 5e journée de la Coupe de la confédération avec Anigo sur le banc, mais ce sera son dernier match en Tunisie, comme il l’a annoncé en conférence de presse jeudi. Les techniciens de l’Hexagone sont jugés sur leur capacité à s’adapter au contexte local. Soit la greffe prend, soit la rupture est rapide. À Tunis (au Club africain), Landry Chauvin a tenu cinq semaines avant d’être broyé par l’impatience d’un club assoiffé de titres et prompt à faire table rase dès que les choses tournent mal. Un an plus tard, avec plus de garanties sportives et une ossature de joueurs « européens » (Saber Khalifa, l’ex-Interiste Tijani Belaïd, Nater, Ghandri et Mikari), Daniel Sanchez a tenu bon, bénéficié d’un peu plus de crédit et a remporté le titre de champion. Habitué à un contexte plus rigide hérité de son expérience en Asie, Philippe Troussier a vite compris qu’il ne s’adapterait pas à la Tunisie et quitté Sfax au bout de trois mois. Anigo aura au moins tenu plus longtemps que Chauvin. Une bien maigre consolation.

« D’ici deux ans, le gardien de l’équipe première aura un casque »

Par Farouk Abdou

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