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Angleterre-États-Unis : le moment de rugir
Comme la France, l’Angleterre fait partie de ces équipes souvent placées, mais jamais gagnantes. Comme la France, l’Angleterre doit passer par l’épreuve des États-Unis si elle veut remporter sa première couronne mondiale. Mais contrairement à la France, l’Angleterre aborde sa demi-finale sans complexe. Parce que les Three Lionesses sont prêtes. Et qu’elles n’ont aucune raison d’avoir peur.
Évidemment, cette demi-finale ne pouvait pas se préparer sans une anicroche. Et celle-ci s’est présentée sous la forme d’une affaire d’espionnage dont le ridicule aurait bien fait rigoler les auteurs des plus grands romans se déroulant sur fond de guerre froide. Alors que les Anglaises étaient parties s’entraîner, des émissaires de la sélection américaine se sont rendus dans leur hôtel. Officiellement pour observer les installations qui accueilleront les joueuses de Jill Ellis en cas de qualification pour la finale. Un geste pas forcément du goût de Phil Neville : « J’espère qu’ils ont apprécié l’hôtel ! Je ne voudrais pas que des membres de mon staff fassent cela en tout cas. De toute façon, jamais une sélection anglaise ne ferait une chose pareille. »
Réponse de son homologue Jill Ellis : « Je crois que tout le monde fait ça. C’est important pour mon équipe et mon administratrice. Cela n’a rien à voir avec de l’arrogance, c’est simplement de la préparation et de l’anticipation pour le staff. C’est tout à fait habituel. » Dans le combat entre l’étiquette et l’arrogance, la Team USA a choisi son camp. À l’occasion d’une balade dans Lyon, Alex Morgan et ses partenaires l’ont d’ailleurs rappelé à travers un vêtement au message pour le moins explicite.
Chacun son arme
En même temps, elles auraient tort de s’en priver. Cette arrogance, que d’aucuns préféreront qualifier de confiance en soi, les Américaines ont prouvé qu’elle était leur meilleure alliée pour enchaîner les victoires. Mais face à l’Angleterre, il faudra probablement donner un peu plus sur le terrain. En froid avec sa Fédération, l’ancienne gardienne internationale Hope Solo, chroniqueuse pour le quotidien britannique The Guardian, semble connaître le secret pour faire tomber les championnes du monde en titre. Et d’ailleurs, elle ne se prive pas de le révéler au pays à qui elle prête sa plume : « L’Angleterre peut battre les États-Unis. Et je déteste dire ça, mais mon conseil à Phil Neville serait d’attaquer immédiatement. La plupart des équipes veulent être divertissantes, faire tourner le ballon et jouer un jeu attrayant. Le problème, c’est que les États-Unis savent défendre contre les équipes qui jouent comme cela. La solution pour gagner, c’est de profiter des carences des États-Unis au niveau de leur vitesse en défense et le moyen d’y parvenir, c’est de jouer vite et directement. »
Cela tombe bien, la future Lyonnaise Nikita Parris, qui s’apprête donc à découvrir son nouveau terrain de jeu en avant-première, est parfaitement de cet avis : « On ne prendra pas de précaution face aux États-Unis. On doit jouer à notre manière, et notre manière n’est pas précautionneuse. Il s’agit de jeu offensif, de possession de balle et on doit s’en tenir à cela, car au bout du compte, c’est comme ça que l’on sera capable de gagner. »
« On y va pour tout flinguer »
Si l’Angleterre aborde cette demi-finale avec une telle confiance en elle, c’est parce les Three Lionesses, déjà présentes dans le dernier carré en 2015 (et éliminées 2-1 par le Japon) ont le vent en poupe. Après avoir également terminé demi-finalistes de l’Euro 2017, les Anglaises ont remporté la prestigieuse SheBelieves Cup au mois de mars. Depuis son arrivée à la tête de la sélection en janvier 2018, Phil Neville n’a d’ailleurs jamais caché ses ambitions. Sans surprise, elles sont grandes et la solidité de son groupe est complète, à l’arrière (quatre clean-sheets en cinq matchs, c’est déjà plus que les trois concédés lors de leurs dix-neuf dernières apparitions en Coupe du monde), comme à l’avant (avec cinq buts à son actif, Ellen White caracole provisoirement en tête du classement des buteuses, à égalité avec… Megan Rapinoe et Alex Morgan).
L’attaquante fan d’Anthony Modeste illustre d’ailleurs à merveille l’état d’esprit dans lequel se trouvent ses coéquipières : « Elles sont évidemment championnes du monde, elles sont numéros un mondiales. Pour nous, c’est le plus grand match, et nous devons faire tout ce que nous sommes capables de faire, que ce soit en matière de récupération, d’analyse, d’entraînement, de tout en somme. Et ensuite, on démarrera bien ce match qui nous excite, mais ne nous perturbe pas. On y va pour tout flinguer. » Phil Neville ne peut qu’approuver : « C’est pour ce genre de moment que je me suis préparé. C’est pour ce genre de moment que j’ai travaillé. »
Et en face ? Le poison Megan Rapinoe a salué la motivation de ses futures adversaires : « Chaque équipe qui s’est qualifiée pour la Coupe du monde devrait se sentir comme cela. Particulièrement l’une des plus grosses équipes de notre sport. Elles jouent bien et ont réussi en dominant. Elles devraient donc absolument se sentir en confiance. » Mais si elle marque à nouveau dans le premier quart d’heure, les statistiques seront alors en faveur d’une nouvelle victoire américaine. Aux Anglaises de mettre fin à cette série infernale. Elles ont toutes les cartes en main pour. Et surtout, leur destin.
Par Julien Duez, à Lyon
Tous propos recueillis en conférence de presse