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Andrea Barzagli, le sous-estimé
Cette saison, il a guidé d’une main de fer la meilleure défense d’Europe. Blessé lors des deux premiers matches de la Squadra, Andrea Barzagli est revenu contre l’Irlande. Depuis, l’Italie n’a plus encaissé le moindre but. Vraiment une coïncidence ?
Non, il n’a pas la dégaine de Paolo Maldini. Ni celle d’Alessandro Nesta. Ni celle de Fabio Cannavaro. Pourtant, Andrea Barzagli, qui guidera ce soir la défense de la Squadra Azzurra contre l’Allemagne, est bel et bien un grand défenseur italien. Même s’il a fallu du temps pour s’en rendre compte. En effet, entre ses débuts en 1998 sous le maillot de Rondinella, en Serie D, et son avènement à la Juventus, cette saison, il s’est écoulé quatorze années. Quatorze années pendant lesquelles le défenseur a grandi, d’abord à Vérone, ensuite en Sicile, avant de filer en Allemagne. Puis le retour en Italie, en janvier 2011. Depuis, Barzagli, toujours discret, s’est imposé comme l’un des tout meilleurs défenseurs centraux du championnat d’Italie, même s’il demeure bien moins médiatique qu’un Thiago Silva. Avec lui en défense, la Juve n’a encaissé cette saison que 20 buts en 38 journées de Serie A. Personne n’a fait mieux en Europe. C’est avec ce record qu’il débarque en Ukraine et en Pologne. Mais juste avant le début de l’Euro, boum, la tuile ! Barzagli se blesse. D’abord, la peur de devoir déclarer forfait. Puis l’espoir. Une grosse semaine de repos suffira. Le défenseur manque le match face à l’Espagne, puis celui contre la Croatie, où l’Italie encaisse à chaque fois un but à cause d’une erreur de placement ou de marquage. Certains idéalistes, dans la presse italienne, affirment que cela ne serait pas arrivé avec Barzagli. Cela reste à voir. Le fait est que, depuis son retour, contre l’Irlande, la Nazionale n’a pas concédé le moindre but. Peut-être une coïncidence. Peut-être pas.
Un peu de bleu, plus du tout de bleu
« J’attendrai Barzagli jusqu’au dernier moment. Il est beaucoup trop important pour nous. » Voilà ce qu’avait déclaré Cesare Prandelli, le 6 juin dernier, à quelques jours du début de l’Euro. Pour un type qui, du temps où il évoluait à la Juventus, a côtoyé des Cabrini, Scirea et Gentile, c’est un gage de confiance. Oui, Barzagli est, à ce jour, le défenseur italien le plus solide. Alessandro Nesta, qui demeure quant à lui le plus classe et le plus majestueux (même si l’on ne sait toujours pas où il jouera la saison prochaine) ne peut qu’accepter de passer le relais à celui qui lui a succédé à ce poste en Nazionale. Car, mine de rien, Barzagli porte les couleurs de la Squadra depuis près de 10 ans. Nous sommes en 2002 lorsqu’un certain Claudio Gentile, justement, voit en lui de grandes capacités en tant que défenseur central. L’ancien défenseur de la Juve est alors sélectionneur des espoirs italiens et fait de Barzagli l’un de ses points de repère. Deux ans plus tard, en 2004, il débute avec l’équipe première de Marcello Lippi lors d’un amical Italie-Finlande. Il a alors 23 ans.
Humble, il apprend aux côtés de Cannavaro, Nesta, mais aussi de Materazzi (bah ouais). Au poste de central, il est quatrième dans la hiérarchie du sélectionneur, mais l’accepte sans sourciller. Lors du Mondial 2006, un coup de pouce du destin le propulse sur le devant de la scène. En huitièmes de finale, Materazzi est exclu contre l’Australie. Nesta étant blessé, c’est lui qui entre. Sa prestation est bonne et l’Italie gagne 1-0 en fin de rencontre. Au match suivant, il prend donc place en défense centrale près d’un Cannavaro qui marche alors sur l’eau. L’Italie piétine l’Ukraine (3-0) et se qualifie pour la demi-finale. Une demi-finale que Barzagli ne jouera pas, tout comme la finale. Peu importe, il est champion du monde. L’Euro 2008 se révèlera bien moins heureux. Titulaire lors de la déroute contre les Pays-Bas (3-0), il est tenu responsable des buts encaissés et n’est plus aligné. Pire, quelques jours plus tard, il se pète le ménisque lors d’un entraînement. Pendant près de trois ans, il ne reverra plus le bleu de la Nazionale.
Italie, Allemagne, Italie, puis Italie-Allemagne
Pendant ce temps, sa carrière en club décolle. Alors qu’il est pendant plusieurs saisons l’un des meilleurs défenseurs de Serie A avec Palerme, il fait un drôle de choix lors de l’été 2008. Plutôt que de s’engager avec un grand club italien, il signe à Wolfsburg, en Allemagne. Si la décision est surprenante, elle va finalement se révéler judicieuse. Barzagli dispute l’intégralité du championnat, sans jamais être remplacé, et son club est sacré champion d’Allemagne à la fin de la saison. Son premier titre en club. L’expérience allemande est bonne, même si, rapidement, le joueur éprouve l’envie de rentrer au bercail. Cela tombe bien, la Juve recherche justement un défenseur central lors du mercato hivernal 2011. Les dirigeants turinois jettent leur dévolu sur lui. En quelques jours, c’est réglé : Barzagli signe à la Juventus un contrat de deux ans et demi. La fin de saison de la Vieille Dame est calamiteuse, mais le défenseur montre qu’il peut en être le pilier pour les années à venir.
Le début de l’exercice 2011-12 est un feu d’artifice pour le Toscan. Non seulement la nouvelle Juventus d’Antonio Conte débute le championnat sur les chapeaux de roue, mais Barzagli est surtout rappelé par Prandelli pour les éliminatoires de l’Euro 2012, plus de trois ans après sa dernière convocation. Son retour en équipe nationale coïncide avec sa meilleure saison en club. La Juve, derrière, est une véritable muraille, n’encaisse pratiquement aucun but, et Barzagli multiplie les grosses prestations. Toujours bien placé, un bon sens de l’anticipation… Il progresse également grâce aux conseils d’Antonio Conte, qui mène finalement l’équipe zébrée jusqu’au Scudetto. À ce stade-là, sa convocation pour l’Euro 2012 apparaît comme une évidence. Prandelli ne s’y trompe pas, l’appelle et lui remet les clefs de l’arrière-garde avec ses potes turinois Buffon, Chiellini et Bonucci. Ce soir, face à l’Allemagne, Barzagli aura face à lui, au choix, Gómez, Klose, Podolski, Schürrle, Reus ou Müller. Pratique : il pourra leur mettre la pression en allemand.
Eric Maggiori