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André Villas-Boas, le naufrage de la raison
Dix-huit mois après son arrivée à l'Olympique de Marseille, André Villas-Boas a présenté sa démission ce mardi. Une sortie qui ressemble à l'épilogue d'une relation d'amour-haine qui n'a même pas eu le temps de prendre de l'ampleur. Et pourtant, qui s'en émouvra aujourd'hui ?
C’est le propre des tempêtes en pleine mer : les problèmes se succèdent comme autant de vagues qui s’abattent sur le rafiot marseillais. Les voiles baissées et à l’arrêt complet en championnat (un nul, puis trois défaites consécutives), l’OM se mange coup sur coup la colère démesurée de ses supporters contre la direction conduisant au report du match contre Rennes et, aujourd’hui, une démission de son capitaine de bord, André Villas-Boas. Cela fait beaucoup, même pour un club habitué aux remous. L’étincelle précipitant l’explosion d’AVB ? L’arrivée du milieu offensif Olivier Ntcham, dont il ne voulait visiblement pas (est-ce étonnant alors que Nantes avait déjà refusé un joueur qui n’a joué que vingt minutes depuis fin novembre ?). « C’est une décision que je n’ai pas prise, je l’ai apprise par la presse au réveil, bouillonnait-il ce mardi, face à la presse. C’est un joueur pour lequel j’ai dit non. Il n’était pas dans notre liste. » Vendredi, le Portugais avait déjà montré son agacement face à son impuissance au moment de choisir un remplaçant à Morgan Sanson. « On continue à chercher une solution qui est bonne pour le futur de l’OM. J’aurais pu choisir un joueur moi-même, ce n’est pas le cas », lâchait-il alors. Les mots sont importants, surtout pour un coach qui s’est plus illustré pour sa communication franche (voire trop) que par la qualité de son football.
Vendredi toujours, AVB sentait que ça allait « être la fin » pour lui en juin : « Je ne demande rien, vu la position dans laquelle on est. On est à une distance abyssale des objectifs de la saison. » Ce mardi, à la veille d’un match à Lens, la menace est passée à l’exécution, dans un certain fracas. « J’ai présenté ma démission à la direction. Sans rien avoir volé sur mon contrat, je ne suis pas d’accord avec la politique sportive, a-t-il déclaré solennellement. Je ne veux rien de l’OM, pas d’argent. Je veux seulement partir à cause de nos différends sur la politique sportive. Dommage d’arriver à ce point.[…]S’il y a quelque chose d’intouchable, c’est mon professionnalisme envers mon équipe. Je ne peux pas accepter ça. Ce club a déjà vécu deux ou trois ans de n’importe quoi sur l’aspect des transferts. » La coque blanc et bleu est une nouvelle fois fissurée.
Obrigado e Boas sorte
Ce départ pendait au nez de l’Olympique de Marseille depuis le printemps dernier. L’avenir du Portugais sur la Canebière semblait alors lié à celui d’Andoni Zubizarreta, mais les supporters et les joueurs, convaincus que cet entraîneur pouvait apporter plus, avait multiplié les messages pour que Villas-Bas n’embraye pas le pas au directeur sportif basque. Un épisode qui aura pourtant suffi pour effriter ses relations avec le président Eyraud. Et pendant que Pablo Longoria assurait encore en décembre qu’« AVB est l’entraîneur idéal pour notre projet », le Special Two désespérait de voir tomber sur son bureau une offre de prolongation de son contrat.
Les événements du week-end à la Commanderie n’ont pas été non plus d’un grand secours pour rassurer André Villas-Boas : « C’est dur, difficile à vivre, ces actes de violence graves. C’était un moment de choc. » Mais cette démission, en attendant qu’elle soit acceptée par la direction, prolonge le sentiment d’incompréhension et de gâchis pour un coach qui avait su imposer sa patte l’an dernier en hissant le club à la seconde place de Ligue 1. Mais les divers dossiers que la direction sportive a dû gérer, voir son avis si peu considéré dans le recrutement, les débâcles en Europe et les difficultés à imposer un style rassurant sur le plan national ont fini par peser dans la balance. Que trouvera-t-on dans la colonne des + au moment de faire le bilan de son passage à Marseille, si ce n’est une baston remportée aux poings au Parc des Princes ? À cinq jours du match retour, sur une chaîne qui reste encore à définir, cet épisode vient encore un peu plus assombrir le tableau qu’offre aujourd’hui le football français, et marseillais qui plus est.
Par Mathieu Rollinger