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Amine Aoudia : « Parfois, il faut revenir en arrière pour mieux sauter »

Propos recueillis par Christophe Gleizes
12 minutes
Amine Aoudia : «<span style="font-size:50%">&nbsp;</span>Parfois, il faut revenir en arrière pour mieux sauter<span style="font-size:50%">&nbsp;</span>»

C'est autour de la superbe piscine privée de l'hôtel Saint Georges à Alger que le grand Amine Aoudia, attaquant international de l'USMA, reçoit en habitué. Histoire de parler football allemand, mentalités algériennes et fromages français.

Salut Amine. Pas mal cet hôtel…

Je suis un habitué, c’est pas très loin de chez moi. J’aime bien venir le dimanche, tranquille. Je connais les gens, je suis ami avec le personnel, ici j’ai pas de problèmes. Tu vois ce que je veux dire ? Je me sens à l’aise.

T’as des problèmes quand tu vas ailleurs?

Non, j’ai pas de problèmes. Mais bon, tu sais, je suis un joueur connu ici en Algérie. J’aimerais aller partout, me balader à pied dans Alger, mais c’est impossible. Même au Sheraton, je me sens mal parce qu’il y a trop de monde et que les clients me regardent. Alors qu’ici jamais. On est dimanche en plus, il n’y a pas trop de monde. Le dimanche c’est le début de la semaine en Algérie mais si tu viens le vendredi ou le samedi, ce n’est pas la même chose. Tu galères, la piscine est pleine.

Tu es un puriste de la piscine ?

Ouais. Je suis plus piscine que plage. En plus j’ai une jolie copine comme tu vois donc je préfère rester ici, à l’abri des regards (rires). La plage il y a trop de monde en Algérie c’est pas évident. Il y a des belles plages quand même mais en dehors d’Alger. Alger de loin, ça peut faire peur si tu écoutes les préjugés. Mais si tu connais les bons endroits, tu ne peux qu’aimer.

Pourquoi as-tu décidé de revenir en Algérie cette année ?

J’ai passé deux ans en Allemagne, alors que j’étais seul. Je suis fils unique et mes proches me manquaient. Pourtant, la première année c’était pas mal. Surtout les six premiers mois où j’ai bien carburé avec Dresde : 500 minutes et sept buts. J’étais bien, au top, mais à ce moment je me suis fait ma blessure aux ligaments croisés qui m’a éloigné des terrains pendant huit mois. J’ai commencé à galérer et à ramer, à nager à contre-courant. Derrière, le club a été rétrogradé et j’ai signé au FSV Francfort.

Pourquoi cette rétrogradation ?

C’est un concours de facteurs. Je lis la presse et ils disaient qu’il y avait sept raisons principales. La première, c’est que sur la phase retour, Tobias Kembe et moi on était blessés. Les autres raisons, c’est que les coachs ont fait des bêtises, et que certains joueurs n’ont pas assumé la pression. Parce que attention, Dresde, c’est 40 000 spectateurs à chaque match. 30 000 minimum.

Ah ouais…

Cela n’a rien à voir avec la Ligue 2 française, on est plus proche en termes de niveau de la Ligue 1 portugaise. C’est un championnat très tactique, j’ai adoré, même si ma blessure a un petit peu gâché mon parcours.

Derrière, le FSV Frankfort te recrute alors que tu es toujours blessé ?

Oui, il me restait quatre mois de rééducation à faire. Mais moi je me suis dit qu’il fallait rester, que ce serait plus facile pour moi de reprendre physiquement en Allemagne qu’en Algérie. J’ai signé, quatre mois d’attente, j’ai repris. On a commencé à gagner des matchs contre Kaiserslautern, Leipzig et Nuremberg… À mon retour, on a enchaîné trois victoires en trois matchs. Mais après, je sais pas, on a joué le maintien, c’était pas top. Alors quand j’ai eu cette belle proposition de l’USMA, j’ai décidé de dire oui.

Qu’est ce qui t’a séduit ?

Déjà, il y a le challenge de la Ligue des champions africaine. L’USMA, ils sont en demi-finales. La compétition, que j’ai bien connu avec Sétif et la JSK, me manque. J’avais besoin aussi de retrouver mes sensations. Dans le championnat algérien, j’ai mes repères, j’ai déjà terminé meilleur buteur, je sais ce qui m’attend. Enfin, il y a plein de trucs que j’avais envie de régler au pays sur un plan plus personnel. Cette année, j’aurai peut-être le temps de me marier par exemple (sourit à sa copine). C’est un retour aux sources, mais parfois il vaut mieux revenir en arrière pour mieux sauter. Je compte jouer une année ici avant de peut-être revenir en Europe, d’autant plus que je suis seulement prêté avec option d’achat.

Financièrement, c’est bien pour toi ou c’est un gros pas en arrière quand même ?

Par rapport à l’Allemagne, ce n’est pas la même chose, mais presque. Sur le plan du professionnalisme, je trouve qu’on se rapproche énormément. L’USMA, ils ont tout pour réussir. Cela m’a convaincu. Les joueurs Algériens ont vraiment du talent. Je pourrai pas citer tout le monde et je ne veux pas me faire d’ennemis mais il y en a qui m’impressionnent à l’entraînement, dans tous les compartiments du jeu.

C’est quoi l’objectif de la saison pour le club ?

Nous c’est clair on va jouer le titre. La Champions League se rapproche à grands pas, et derrière on a le championnat et la coupe d’Algérie, où on espère jouer les premiers rôles. Il y a de la concurrence mais j’assume, je sais ce que je dis.

Tu ne vas pas regretter l’Europe ?

Un peu. L’Allemagne, à part la blessure ça m’a trop plu. J’ai joué avec Romain Brégerie, qui vient de Bordeaux, il est monté cette année en Bundesliga avec Darmstadt, et Anthony Losilla aussi, qui est parti à Bochum. C’étaient des gars super sympas, en plus ils jouaient trop bien au ballon tous les deux. Tout s’est bien passé pour moi. Alors qu’au début, certains ont voulu me décourager. J’ai parlé avec des joueurs algériens qui avaient eu l’occasion de jouer en Allemagne et ils m’ont dit : « Amine, fais attention, c’est l’est de l’Allemagne, il y aura un peu de racisme, un peu de ci, un peu de ça ». Rien du tout. Alors que je jouais avec la barbe comme ça (il mime un bouc interminable avec ses mains) je n’ai eu aucun problème.

T’as appris l’allemand un peu ?

Ja, ich habe Deutsch in drei Wochen gelernt. Das ist normal für mich. Ich kann gut sprechen.

Tu parles mieux que Ribéry…

Oui ! Largement !

Cela a du plaire aux supporters…

J’avais une très bonne relation avec eux. À Dresde, il y a de la chaleur. Les fans sont là, ils ont la rage, ils sont chauds, ils t’insultent. J’adore ça. C’est plus ambiancé qu’à Francfort où les supporters font juste « Bouuuuuh » quand ils sont mécontents, à moins qu’ils sifflent. Et quand tu marques, ils tapotent dans leurs mains, comme un public de tennis (rires).

Niveau public chaud, en Algérie tu ne devrais pas être trop dépaysé…

C’est clair. Dans la capitale, parfois, tu as 100 000 personnes au stade…

Et en plus ils jettent des pierres…

Oui, cela a diminué mais c’est un phénomène qui a toujours existé en Algérie. Mais il faut bien comprendre que les supporters de la Méditerranée sont un peu chauds. Comme en France, les Corses par exemple, ils sont chauds aussi. Pareils, ils disent ce qu’ils pensent. Après, pour moi, cela serait hypocrite de les défendre, c’est pas bien pour notre image. Je le dis sans hésiter, c’est une mauvaise habitude qui doit cesser. Il faut que les supporters prennent conscience du danger. Ils ont le droit d’être mécontents, de nous insulter, mais pas de nous jeter des pierres. La Fédération a vraiment des problèmes avec ça. À Alger, chaque match, c’est à huit-clos. Quand tu as vingt blessés dans un match de foot, c’est normal de sévir.

Tu vois d’autres gros problèmes en Algérie au niveau du foot ?

Pour moi le gros défi c’est les infrastructures. On a jamais réussi à avoir des stades bien sécurisés, de véritables centres de formation pour les jeunes, des mini-terrains en gazon naturel.

Il y a Hussein Dey, dans la banlieue d’Alger, qui est pas dégueulasse depuis un an, ils ont un beau centre de formation…

C’est un beau centre oui mais j’ai pas eu l’occasion de le voir encore. Alors que je suis de là-bas justement, j’ai été formé à l’IRHD, l’autre club du quartier.

Je sais, justement, ça me fait une superbe transition…

(rires) Les écoles du quartier ont vraiment formé de super joueurs, Rabah Madjer en tête. Moi à l’époque j’ai vraiment eu de la chance de percer. C’était dur mais je m’en suis sorti.

Raconte-nous…

Ecoute, à 14 ans, je jouais déjà sénior à cause de ma taille et de ma morphologie. J’ai commencé à jouer en quatrième division. La sélection régionale, qui est à la porte d’entrée de la sélection espoir, m’a repéré. J’ai fait des tests, j’ai commencé à jouer junior en équipe nationale avec pas mal de joueurs qui sont maintenant en sélection. J’ai marqué des buts, puis j’ai enchaîné avec le tournoi international de Rezé à Nantes, un tournoi extraordinaire. À l’époque il y avait Landreau qui venait nous encourager, il était encore jeune, dans les 25 ans. C’était cool. J’ai terminé meilleur buteur du tournoi et j’ai directement sollicité par les meilleurs clubs d’Algérie. Comme quoi, c’est l’équipe nationale d’Algérie qui m’a poussé dès le début de ma carrière. Ce sont eux qui m’ont fait devenir ce que je suis.

Aujourd’hui, ton compteur reste bloqué à sept sélections…

Ma première, c’était contre le Luxembourg, en 2010. J’ai joué quinze minutes. Revêtir le maillot de l’équipe nationale, c’est un immense honneur pour n’importe quel joueur. Ma dernière sélection c’était au mois de novembre 2013, lors des barrages contre le Burkina Faso, avant que je ne me fasse les ligaments croisés en février. J’étais si déçu, un vrai coup de massue, ça m’a fait rater la Coupe du monde.

Comment tu t’es blessé ?

À l’entraînement. Un contre un, 30 mètres d’écart entre les deux buts, on appelle ça le jeu brésilien. Le coach me met face à un petit jeune, Müller. C’est un jeune mais il est costaud comme moi. J’étais le premier sur la balle, j’ai fait contrôle orienté pour aller directement vers le but. Et là, il m’a percuté le genou. Je ne pouvais plus marcher. C’est vraiment dommage. Si je n’avais pas eu cette blessure, j’aurai vraiment pu percer en équipe nationale, avec le coach qui m’a peut-être le plus aimé dans ma carrière. Vahid, il me kiffait grave, il aimait bien ma mentalité, comment j’étais et tout, on s’entendait bien. J’étais vraiment au sommet de ma carrière, j’enchainais les buts, Fenerbahçe voulait me recruter, et ça m’est tombé dessus d’un coup…

Dur…

Heureusement, la Fédération algérienne ne m’a pas laissé tomber. Quand Gourcuff a pris les commandes il m’a appellé : « j’ai vu tes vidéos, ton profil m’intéresse, tu es un bon attaquant, mais tu dois travailler, tu dois revenir » . Ce n’est jamais facile après les ligaments croisés car il faut compter minimum un an et six mois pour retrouver ton niveau d’avant. Parce que tu vas avoir plein de petites blessures qui se greffent, des élongations, des tendinites. Quand tu reprends, ton pied a galéré pendant huit mois. C’est automatique. Il faut faire beaucoup de musculation et à 28 ans, ce n’est pas évident, même si j’ai beaucoup progressé en termes d’expérience et sur le plan tactique.

La tactique, c’est pas la chose la mieux répandue en Algérie…

C’est vrai. En général, le joueur algérien est techniquement très fort, mais tactiquement très faible. C’est parce qu’il n’a pas fait de centre de formation. Quand j’étais jeune, je voulais jouer offensivement mais je savais juste attraper le ballon et aller vers l’avant. Si tu me donnais cinq fois le ballon en cinq minutes, j’allais vers l’avant à chaque fois. Alors que tu dois économiser ton énergie, il faut que tes déplacements soient étudiés, il faut pas se fatiguer dès l’entame du match, gérer tes efforts. La tactique, c’est pas qu’une question de placement.

Tu as un modèle dans le jeu ?

L’attaquant que j’aime le plus, actuellement, c’est Cristiano Ronaldo. Il a commencé de là (il montre le sol), et maintenant il est là (il montre le ciel). Toi, bien sûr, tu vas me dire que Messi, c’est le meilleur du monde. Je te dis oui, je le reconnais. Mais c’est pas mon truc. J’aime pas son style de jeu. C’est un excellent dribbleur mais il n’égale pas Maradona ou El Fenomeno dans ce domaine. J’ai l’impression que son jeu c’est plus malin, efficace, que consacré au plaisir des yeux. Il mise tout sur sa rapidité et son intelligence, mais il n’a pas la classe ni l’élégance d’un Zidane.

Mais sinon, dans l’absolu, tu ressembles plutôt à Ibrahimović…

C’est ma référence personnelle, il est comme moi, assez costaud et puissant. Et quelque fois, moi aussi, je mets des chefs d’œuvre (rires)

Vas-y, montre, c’est quoi ton plus beau but ?

Mon plus beau il est là… Il est où mon téléphone ? J’avais 17 ans, il a été nommé meilleur but de la décennie en Algérie. C’était contre le Mouloudia, derby algérois. (il montre la vidéo, gros enchaînement et volée pleine lucarne). Boum.

Mazette. Tu regardes beaucoup les vidéos de toi ?

Ouais, ça m’arrive ouais (rires). C’est comme tu es DJ, tu es obligé d’écouter ta musique. Ou quand tu es journaliste, tu relis bien tes articles. Cette vidéo, je l’ai vu je sais pas combien de fois. En une semaine je peux la regarder vingt fois.

Cela va t’inspirer pour retrouver le chemin des filets cette année…

Sur ma carrière, si j’avais pas eu autant de blessures j’aurai vraiment pu faire mieux. Mais maintenant je travaille pour revenir. Je suis dans la dernière ligne droite, j’ai l’expérience et je vais cravacher. Je vais tout faire pour carburer ces quatre ans et après je raccroche direct.

Tu as seulement 28 ans, tu as encore le temps…

Oui mais je ne compte pas raccrocher trop tard, je me donne quatre ou cinq ans maximum. Parce que je suis fatigué, je le sens, j’ai plus de mal qu’avant à l’entraînement, il y a une forme de fatigue morale qui s’instaure. Il me reste un seul objectif : percer avec l’équipe nationale. Je vais te dire une confidence : gagner la champions League avec l’USMA va me permettre de retourner en équipe nationale par la grande porte.

Cela me semble un beau plan…

Un très beau plan (rires). J’ai repris il y a dix jours de ça et je vais vraiment travailler d’arrache-pied cette année pour réaliser ce rêve. C’est ce que je souhaite le plus au monde. Et je te le dis, je vais y arriver. Je vais revenir, je n’ai aucun doute là-dessus.

Aura-t-on la chance de te voir en Ligue 1 une fois que tu seras de retour au top ?

Pourquoi pas, je connais bien le pays ! Dès qu’on a l’occasion, on part à Paris avec ma copine pour faire du shopping, se détendre et manger. Parce que la gastronomie française, il n’y a pas à dire, c’est la meilleure. Tu sais qu’il y a 365 sortes de fromage différents ? Ma parole, c’est autant que les jours de l’année.
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Propos recueillis par Christophe Gleizes

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