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Álvaro maussade
Le come back de Morata au Real était l'une des belles histoires de l'été, mais l'Espagnol a rapidement fini scotché sur le banc. Une situation prévisible et attendue, que le joueur ne semble pas mal vivre pour le moment, même si elle lui a aussi coûté sa place en sélection.
Le Real Madrid n’aurait pas pu avoir d’autre bourreau. Cette soirée du 13 mai 2015 au Santiago Bernabéu était presque faite pour ça, pour qu’Álvaro Morata crucifie son club de cœur, celui où il avait rêvé de s’imposer avant de revoir ses ambitions au rabais un an auparavant. Déjà buteur au match aller, lors de cette demi-finale retour de Ligue des champions, c’est par lui que le drame madrilène est arrivé. Jusqu’à l’heure de jeu, les soldats de la Maison-Blanche pourtant étaient en finale, prêts à défendre leur titre, et à s’offrir un back-to-back. Une « Undécima » , un an après le grand cirque de la « Décima » , ça aurait clairement eu de la gueule. Mais les cafouillages, ennemis du beau jeu et des gardiens du but, ont l’esprit farceur. Il a suffi d’une relance du poing un peu trop dans l’axe de Casillas, puis d’une situation un peu floue pour que Morata se retrouve tranquillement seul face aux cages du Real au point de penalty, prêt à bombarder. Un but du 2-1 pour envoyer la Vieille Dame se frotter au Barça en finale, que Morata ne célébrera pas dans cette arène de Madrid qu’il chérit tant. « Je pourrais marquer mille buts contre le Real que je n’en aimerais aucun » , tonnait-il au micro de beIN Sports. L’été dernier, le Real Madrid lui pardonnait et activait la clause dans le contrat du joueur qui lui permettait de le racheter pour trente millions sans que personne ne puisse s’y opposer. Devenant par la même occasion le symbole des caprices et du mauvais flair de Florentino Pérez.
Revenu pour remplacer
Totalement happé par sa nouvelle mission, Álvaro Morata avait bien zippé son uniforme merengue pour sa première conférence de presse, au cours de laquelle il martelait son implication et sa fierté de revenir dans sa ville natale : « Je suis de retour au Bernabéu pour tout donner et rester le plus longtemps possible. » Morata incarnait alors sans le vouloir ce que le Real avait de pire. Un club incapable de gérer ses jeunes talents et de leur donner une place en équipe première, leur préférant des gros noms recrutés très cher, et qui avait fini par faire rentrer au bercail un ancien exilé devenu son bourreau entre-temps pour renforcer le secteur offensif. Le souci pour un numéro 9 qui arrive au Real, c’est que Karim Benzema est un meuble compliqué à déménager. De Gonzalo Higuaín à Javier « Chicharito » Hernandez, plusieurs bonhommes s’y étaient déjà brisé les dents, et avaient dû aller voir ailleurs. Pour se dérouiller les jambes avant la reprise de la saison en club, Morata avait eu droit à un échauffement sympathique nommé Euro 2016. Avec Diego Costa blessé, c’est Morata qui avait joué titulaire en attaque et qui avait planté quelques banderilles, un doublé contre la Turquie, puis un but inutile lors de la défaite face aux Croates avant de rester muet en huitièmes. Suffisant pour se montrer, mais pas assez pour réellement impressionner à la veille d’une saison où il allait avoir à côtoyer KB9, absent à l’Euro mais intouchable au Real. Et avec le retour en forme olympique de Diego Costa, Morata a même repris son abonnement pour le banc avec la Roja, et vit une vie de substitute à temps plein depuis quelques mois.
Bloqué par KB
Début octobre, peu avant le remake Espagne-Italie comptant cette fois pour les qualifs du Mondial 2018, Morata se montrait aussi dépité que lucide : « Je serais ravi de jouer contre l’Italie, mais soyons réalistes, Diego Costa est plus susceptible de jouer, car il joue plus et marque plus que moi. » Dommage, pour un match qui se jouait au Juventus Stadium. Lopetegui lui avait fait l’honneur d’une entrée à vingt minutes de la fin, mais qu’il semblait loin ce temps où Buffon, avant le huitième de finale de l’Euro, se méfiait de son ancien coéquipier comme du loup blanc en l’identifiant comme « le danger numéro 1 » . En revenant au Real, Morata savait qu’il enfilait une combinaison de dépanneur, et qu’il n’aurait probablement pas sa chance. Après le quatrième nul consécutif de Madrid le 2 octobre, la Benz’ s’était fait rabrouer, mais pas question pour Zizou de le lâcher : « Nous n’avons pas de doute avec Karim. On sait qu’il reviendra à son meilleur niveau et nous espérons qu’il fera ce qu’il faut. » Le ton était donné, et Morata avait compris que son tour n’était pas prêt d’arriver. « Je m’entraîne bien et je suis toujours au service de l’équipe, sans être de mauvaise humeur et en restant professionnel. Je ne peux pas dire si je mérite de jouer plus de minutes, le coach sait ce qu’il fait. C’est difficile d’avoir du temps de jeu au Real » , ajoutait Morata, soucieux de ne pas faire de vagues. Buteur le week-end dernier lors de la victoire qui a permis au Real de prendre le maillot jaune de Liga, Morata voyait Zidane lui lancer enfin un hameçon : « Il aura plus de temps de jeu, mais il faut être patient. Il aura des minutes de jeu comme tout le monde, il joue toujours très bien quand il entre. » En gros, Morata n’a pas fini de chauffer le banc.
Par Alexandre Doskov