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Alors, ca a donné quoi cette Juve version Pirlo?
Facile vainqueur de la Sampdoria ce dimanche (3-0), la Vieille Dame sauce Pirlo a affiché un plaisir de jouer et un allant offensif qui lui avaient cruellement manqué la saison dernière. De bon augure, en attendant que les promesses esquissées se transforment peut-être en certitudes.
Andrea Pirlo n’est pas un type particulièrement expressif. Planqué derrière sa barbe, les bras croisés qui nouent la veste de son costard cintré, le Mister bianconero savoure en silence. Sa Juventus vient de baffer la Sampdoria 3-0 ce dimanche, et le résultat n’est pas le seul motif de satisfaction de la soirée côté piémontais. Le football routinier, tristement répétitif de la saison dernière, a semblé d’un coup rétrécir dans le rétro de la Vieille Dame, qu’on a vu renouer avec une notion qui lui était depuis longtemps étrangère : le plaisir.
Milieu moelleux
Bien sûr, tout n’a pas été parfait pour la première des Piémontais cette saison. Leur performance, décousue, a d’abord débouché sur 20 premières minutes pétillantes sur le plan collectif, récompensées par l’ouverture du score de Kulusevski à la 13e minute de jeu. Le reste fut plus convenu, même si, par séquences, on a pu se régaler de mouvements et de combinaisons qu’on se désespérait de revoir à Turin depuis trop longtemps. Surtout au milieu de terrain, atone la saison dernière, mais beaucoup plus structuré hier soir par un projet de jeu que Pirlo a orienté autour d’un 3-5-2 qui bascule vers l’avant. La Vieille Dame a carburé avec un seul vrai milieu défensif, la recrue Weston McKennie, qui, avec 7 ballons interceptés (meilleur total de sa formation) et 10 tacles tentés, a joyeusement consenti à faire le sale boulot. Un cran plus haut, Adrien Rabiot a endossé le rôle de plaque tournante de l’équipe, en distribuant 93 passes, le meilleur total juventino derrière Danilo, mais surtout en imprimant une vitesse et une verticalité qui faisaient défaut à la Juventus la saison dernière.
La meilleure surprise de la soirée reste néanmoins Aaron Ramsey. Le Gallois, aligné en numéro 10 derrière la doublette Kulusevski-Ronaldo, aura donné une passe décisive pour le Portugais et a multiplié les décalages malins pour ses attaquants. Le bloc haut de la Juventus lui aura également permis de faire jouer son art du pressing : avec 11 tacles tentés, l’ex-Gunner a harcelé sans discontinuer la défense de la Sampdoria, dont les relances ont souvent été réduites à leur plus simple expression. Pirlo devra désormais songer à comment intégrer Arthur – remplaçant dimanche – à cet entrejeu blanc et noir, qu’on n’avait plus vu aussi dynamique et entreprenant depuis un bon bout de temps.
Du flou et des promesses
L’autre grande satisfaction de la soirée côté bianconero, c’est le retour de la défense à trois : avec 88% de duels gagnés, meilleur total de son équipe, Giorgio Chiellini prouve que sa blessure de la saison dernière semble largement digérée. Leonardo Bonucci n’a pas été en reste, le quarterback juventino multipliant les transversales impeccables, avec la facilité qu’on lui connaît. Son but sur corner venait récompenser un match presque irréprochable sur le plan technique. Ses 94% de passes réussies en attestent, un chiffre exceptionnel, compte tenu du nombre de transmissions longues que le défenseur aura déposé dans les pieds de ses équipiers. Danilo, troisième larron de la défense dimanche et auteur d’une performance solide, pourrait lui, à terme, être remplacé par Demiral, puis De Ligt (blessé, pour encore trois mois environ).
En somme, de quoi renforcer Andrea Pirlo dans ses convictions. Le natif de Flero a rapidement affirmé sa volonté de produire un football à la fois offensif et agressif à la récupération du ballon. Pour que la théorie rejoigne la pratique, il va évidemment encore falloir cravacher. Notamment sur les ailes, où l’animation hier soir a semblé timide. Juan Cuadrado n’a tenté que deux centres face à la Sampdoria, même si le retour du Colombien à un poste de piston droit, la position où il avait explosé quand il évoluait à la Fiorentina, est porteur de belles promesses. À gauche, Pirlo a aligné le jeune espoir transalpin Gianluca Frabotta, auteur d’une partition honnête, mais appelé à jouer les remplaçants pour le restant de la saison. À terme, ce sont Alex Sandro et Federico Bernardeschi (actuellement blessés) qui pourraient se partager alternativement le couloir.
Devant, c’est encore le flou qui prédomine : face à la Samp’ dimanche, Cristiano Ronaldo a attisé tous les regards et magnétisé tous les ballons dans la surface adverse. Sans doute un peu trop : à lui seul, le Portugais a botté 10 des 16 tirs de son équipe. Le Suédois Dejan Kulusevski, élu meilleur jeune de Serie A la saison dernière, a inscrit un but tout en finesse, mais devrait surtout jouer les jokers de luxe cette saison. C’est Paulo Dybala, ménagé hier, qui devrait en effet être associé à Ronaldo devant, en attendant qu’un avant-centre de métier, peut-être Edin Džeko, ne vienne éventuellement apporter plus de poids à l’ensemble. Si la venue du Bosnien est confirmée, on imagine que la Juve pourra alterner devant entre les trois larrons, pour porter l’estocade au sein de son 3-5-2. Voilà qui augure peut-être quelques belles choses dans le Piémont, même si Andrea Pirlo va devoir confirmer sur le long terme les premières impressions entrevues cette saison.
Par Adrien Candau