- C1
- 8es
- PSG-Manchester United (1-3)
Allez, Ola, Ole
Dix-sept matchs, quatorze victoires et une qualification pour les quarts de finale de la Ligue des champions : un peu moins de trois mois après son retour à Manchester United, Ole Gunnar Solskjær a réussi à redresser un navire qu’il connaît et incarne mieux que personne. Give him the job.
22h37 sur l’horloge du Parc des Princes. Dans sa zone technique, un homme couvert d’un dossard jaune tourne en rond et fait face à un énième verrou. Un verrou fermé : si Manchester United est aux commandes de ce huitième de finale retour depuis un peu plus d’une heure, Ole Gunnar Solskjær, aux yeux de qui aucune mission n’est impossible, tripote son trousseau stratégique. Alors, le Norvégien échange avec Michael Carrick, son Jiminy Cricket, et transforme la vie de deux puceaux : Tahith Chong (19 ans), double buteur face à la réserve du PSG en janvier, et Mason Greenwood (17 ans), gâchette en puissance de l’académie mancunienne. Puis, deux minutes après l’entrée du second, un nouveau verrou saute : alors qu’il n’avait jamais tiré le moindre penalty au niveau professionnel, Marcus Rashford s’élance, bat Gianluigi Buffon et retourne un morceau d’histoire. Tiens, l’histoire : « Il y a quelques années, alors que je dirigeais Molde et qu’on jouait un match de Ligue des champions à Bâle, on avait eu un penalty qui pouvait nous qualifier à la dernière minute d’un troisième tour préliminaire. On l’avait raté et on avait été éliminés. Là, Marcus a été courageux, a gardé ses nerfs… » Et Manchester United a braqué un PSG pour qui un film semble se jouer en boucle : un film dont on connaît la fin, mais pas le déroulement. Celui-ci aura été tragi-magique.
Bailly éjecté, le plan exécuté
La magie est le verrou principal du mandat d’Ole Gunnar Solskjær, nommé en plein mois de décembre, deux jours après un tirage au sort pour les huitièmes de finale de la Ligue des champions que l’entraîneur norvégien avait regardé sur un canapé avec son fils. Depuis, Manchester United revit, vient d’empiler une neuvième victoire en neuf voyages et n’a perdu qu’un seul match toutes compétitions confondues : la manche aller (0-2) face aux Parisiens, le 12 février dernier, lors d’une soirée qui avait profondément touché Solskjær. Ce soir-là, à Old Trafford, on avait vu les Mancuniens perdre Paul Pogba (expulsé), Jesse Lingard et Anthony Martial (blessés), mais surtout plus qu’un match de foot. Thomas Tuchel avait donné à son homologue scandinave une leçon de contrôle, de structure et de maîtrise du rythme. Et alors ? Si tout le monde donnait MU pour mort, Solskjær y croyait et ne cessait de le répéter. Même avec une dizaine d’absents et un banc composé essentiellement de gamins ? Même avec tout ça, oui.
Lundi, le Norvégien l’avait formulé ainsi : « C’est une tâche difficile, mais nous pouvons le faire. Nous avons besoin de marquer le premier but. S’il reste une demi-heure et qu’il y a une différence d’un but, tout peut arriver. Nous avons besoin d’un bon plan, et de très bien l’exécuter. » Son Manchester United, organisé dans un 4-4-2 d’où Éric Bailly a rapidement été éjecté pour faire entrer le jeune Diogo Dalot, s’est retrouvé exactement dans cette situation grâce à un doublé inscrit par Romelu Lukaku au cœur d’une période pourtant traversé avec douleur par les Red Devils.
« Sir Alex Ferguson m’a dit qu’il était fier »
« Dans le football, le mental est important, est venu raconter après la rencontre Ole Gunnar Solskjær. Sir Alex Ferguson m’a dit qu’il était fier. Il n’y avait pas besoin de faire de discours après ce match. C’est une soirée incroyable. On y a toujours cru, on a respecté notre plan : il ne fallait pas garder la balle car, face à cette équipe, on devait surtout éviter de laisser trop d’espaces. En première période, on a commis plusieurs erreurs défensives, mais on a réussi à se reprendre et, à dix minutes de la fin, on était toujours dans le match… » Cela s’explique d’abord par l’explosion d’un bloc parisien où Fred et McTominay ont réussi à planter leurs dents et où Romelu Lukaku est venu, à plusieurs reprises, s’insérer pour permettre au bloc mancunien de remonter et de s’organiser autour de ses déplacements. Puis, le rêve est né et Solskjær semble avoir tamponné pour de bon son avenir sur le banc de Manchester United. « J’essaie de faire mon job du mieux possible chaque jour. Je vais voir où ça me mène, s’est-il contenté de sourire. J’en profite, c’est fantastique. Ce soir, nous avions beaucoup de blessés et un suspendu, c’était peut-être finalement une bonne chose, car cela nous a permis d’avoir une équipe fraîche pour défendre et travailler dur. » Maintenant, il a surtout une équipe qu’il incarne mieux que personne : une équipe d’assassins avec des visages d’enfants.
Par Maxime Brigand, au Parc des Princes