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Allemagne : l’heure de trancher dans le vif
Après avoir annoncé une liste qui a fait couler beaucoup d’encre, entre écart de cadres et convocation de nombreux débutants, Julian Nagelsmann va profiter de la rencontre face aux Bleus, ce samedi à Lyon (21h), pour tester une nouvelle mouture de la Nationalmannschaft, à trois mois de l’Euro à domicile.
« Je sais que c’est une très bonne nation, une équipe de haut niveau avec des joueurs qui évoluent dans les meilleurs clubs européens. L’important est, pour nous, d’avoir notre idée directrice. Quand il y a l’Allemagne, il y a forcément du répondant et de l’adversité. » En conférence de presse ce lundi, Didier Deschamps jouait la carte du fair-play, n’ayant certainement pas oublié qu’en septembre dernier, à Dortmund, les Bleus avaient déchanté (2-1) face à une sélection allemande, pourtant en proie au doute après l’éviction de Hansi Flick et qui l’avait emporté Dieu sait comment avec Rudi Völler sur son banc. Ce samedi, la donne sera différente, car, outre-Rhin, peu sont celles et ceux qui donnent la Nationalmannschaft favorite contre sa voisine hexagonale.
Sur la pelouse du Groupama Stadium, l’heure sera à l’expérimentation. Nommé sélectionneur national le 22 septembre dernier, dans la foulée de la victoire de l’Allemagne contre la France, Julian Nagelsmann a commencé son mandat à moins d’un an de l’Euro à domicile, qui commencera le 14 juin à Munich face à l’Écosse, en récupérant un groupe encore sonné de son élimination en phase de groupes du Mondial qatari, complètement désorganisé et sans idée de jeu précise. Les Bleus sont prévenus : cet amical n’aura d’amical que le nom, car le temps presse et parce que Nagelsmann a choisi la stratégie d’une rupture brutale.
L’union fait la force
« Finalement, ce qui est important, ce n’est pas que nous n’ayons les vingt joueurs les plus talentueux et les plus grands noms qui évoluent dans les plus grands clubs, mais ceux qui s’accordent le mieux entre eux. » Voilà comment le sélectionneur allemand a justifié sa liste du 14 mars et la non-convocation de joueurs expérimentés comme Leon Goretzka, Mats Hummels et Serge Gnabry. Voilà aussi comment il a justifié la nomination de débutants connus des seuls suiveurs réguliers de la Bundesliga : Waldemar Anton, Maximilian Mittelstädt, Deniz Undav (Stuttgart), Maximilian Beier (Hoffenheim), Jan-Niklas Beste (Heidenheim), qui a quitté le groupe en raison d’une blessure aux adducteurs, et Aleksandar Pavlović (Bayern). Voilà enfin comment il a justifié le retour (attendu) de Manuel Neuer et celui (plus surprenant) de Toni Kroos, absent de la NM depuis trois ans. En conférence de presse, le milieu de 34 ans, qui brille avec ses 95% de passes réussies au Real Madrid depuis le début de la saison, a tenu d’entrée de jeu à mettre les choses au point : « Je suis un footballeur dans l’âme et j’ai été charmé par l’idée de pouvoir aider pour l’Euro dans mon pays, explique-t-il. Mais cela ne suffit pas de dire que tout va changer parce que je suis de retour. […] Beaucoup de choses ont effectivement changé ces dernières années et j’essaierai d’apporter ce que je peux. »
En suivant la logique de Julian Nagelsmann, on ne devrait donc pas voir la paire Kroos-Gündoğan évoluer ensemble comme milieux défensifs, sous prétexte que les deux sont super forts avec leurs clubs respectifs. Le second en est d’ailleurs conscient et semble avoir accepté son destin, lui qui va probablement devoir rendre le brassard de capitaine, récupéré en l’absence de Manuel Neuer. « Le plus important, c’est que chacun soit conscient de son rôle, affirme dans un long entretien au quotidien Süddeutsche Zeitung celui que Nagelsmann voit comme l’un de ses trois n°10 potentiels. Cela paraît banal, mais c’est la base de tout : chacun doit prendre du recul et ne pas se considérer plus important qu’il ne l’est vraiment. Les égos vont devoir se mettre en retrait pendant quelques semaines. »
Ne pas juger trop vite
Quant aux petits nouveaux, si rien n’indique qu’ils auront tous du temps de jeu face à la France, puis aux Pays-Bas trois jours plus tard, ni qu’ils seront forcément du voyage pour l’Euro à domicile, nul ne doute de la légitimité de leur place dans le groupe. « Ils jouent à un bon niveau en Bundesliga et méritent donc d’être ici. Cela ne peut nous faire que du bien de voir de nouveaux joueurs nous apporter leur patte », poursuit Gündoğan. Quand un reporter de la ZDF lui demande ce que ça fait d’être appelé à jouer avec Toni Kroos, Manuel Neuer et Thomas Müller, Deniz Undav, qui illumine le front de l’attaque du VfB Stuttgart, répond en complétant la liste : « Et aussi Waldemar Anton, Chris Führich, Maxi Mittelstädt… » Comme pour dire que les néos sont conscients qu’ils ont un rôle à jouer au sein d’une équipe qui a encore tout à prouver et qu’ils ne sont pas là pour faire de la figuration.
Une chose est sûre, ce n’est pas face aux Bleus que l’on verra l’équipe type de Julian Nagelsmann à l’Euro. Alors qu’il était sur le point d’être confirmé au poste de gardien numéro un lors du tournoi, Manuel Neuer, touché aux adducteurs, a finalement quitté le rassemblement et laissera (temporairement ?) sa place à Marc-André ter Stegen, visiblement condamné à être numéro deux tant que le vétéran n’aura pas officiellement annoncé sa retraite internationale. Même tarif pour son coéquipier au Bayern Aleksandar Pavlović, rentré à Munich pour cause d’inflammation des amygdales. C’est peu dire que, même si le sélectionneur a probablement une colonne vertébrale en tête, il y a encore des places de titulaires à prendre. Voire de jokers. Après tout, c’est cette complémentarité qui caractérise une équipe gagnante, et ce n’est donc pas le match de Lyon qui permettra à lui seul de tirer des conclusions définitives.
Par Julien Duez