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Allemagne-Irlande du Nord : on prend les mêmes et on recommence
Quatre mois après avoir battu l'Irlande du Nord lors du dernier match de poule de l'Euro 2016, l'Allemagne retrouve les hommes de Michael O'Neill. Si en France, la Mannschaft avait largement dominé son adversaire tout en galérant à marquer un but, la donne devrait être bien différente ce soir.
26 frappes pour un but : la dernière fois que l’Allemagne a croisé l’Irlande du Nord, l’efficacité n’était clairement pas au rendez-vous côté teuton. « Avec 80% de possession de balle à certains moments, nous aurions clairement dû marquer un ou deux buts de plus » , avait concédé Joachim Löw après la rencontre. Tout en n’hésitant pas à affirmer que sans un match quasiment parfait du portier nord-irlandais, Michael McGovern, auteur de neuf arrêts, le score final aurait sans doute été un peu différent. Si cette rencontre, comme celle face à la Pologne, avait mis en lumière les difficultés de la Mannschaft à convertir ses occasions, la perspective d’affronter potentiellement la bête noire italienne en quarts de finale avait vite pris le dessus sur un simple match de poule. Pourtant, l’Allemagne aurait mieux fait de prendre ce résultat face à l’Irlande du Nord comme un avertissement. Contre la France, Thomas Müller et ses copains ont connu les mêmes difficultés que contre l’Ulster. Dominatrice en première mi-temps, l’Allemagne n’a pas su profiter de ses temps forts, ne serait-ce que pour ouvrir le score. Une absence de réalisme que la Mannschaft payera très cher, Griezmann ouvrant le score sur penalty avant la pause, contre le cours du jeu. La suite, on la connaît : les hommes de Löw s’emmêlent les pinceaux et ne bousculent pas assez franchement les Bleus qui finissent même par doubler la mise. Cette défaite en demi-finales relance un débat qui sent le réchauffé outre-Rhin : peut-on réussir sans attaquant de pointe ? Tout l’été, les médias taclent Jogi Löw et son incapacité à vouloir prendre un véritable 9 qui ne s’appellerait pas Mario Gómez. Sauf que, depuis, l’Allemagne a largement dominé la Finlande (2-0) en amical, mais surtout la Norvège (3-0) et la Tchéquie (3-0) lors des éliminatoires à la Coupe du monde 2018. Tout ça sans avant-centre.
Un groupe quasiment identique
Sur le papier, l’équipe d’Allemagne actuelle ressemble donc trait pour trait à celle de juin. Seul Mario Gómez, blessé et peu en vue avec Wolfsburg, manque à l’appel. Attaché à son groupe de joueurs, Joachim Löw n’a pas souhaité remanier son équipe, alors qu’elle n’a pas gagné l’Euro et qu’elle a un peu galéré à marquer des buts. Et qu’importe si l’opinion publique réclamait Gonzalo Castro, impressionnant avec le BvB depuis la reprise, ou encore Lars Stindl, homme fort du Borussia Mönchengladbach et capitaine après seulement une saison au club : Jogi est têtu. Surtout, il ne ressent que très rarement le besoin de changer son fusil d’épaule. Depuis la reprise de la Bundesliga, le sélectionneur a assisté à de nombreux matchs, ce qui ne s’est aucunement traduit par l’arrivée de nouvelles têtes – si on excepte évidemment les vice-champions olympiques Max Meyer et Julian Brandt, qui avaient déjà connu quelques sélections auparavant. En revanche, ce qui a changé, c’est l’état de forme du groupe. Contrairement au mois de juin dernier, la plupart des titulaires de la Mannschaft sont actuellement en pleine bourre. Sami Khedira, enfin débarrassé de ses nombreux pépins physiques, est encore plus indispensable à la Juventus que la saison passée. Toni Kroos, pour sa troisième saison en Espagne, continue d’être un des joueurs les plus réguliers du Real Madrid et en plus n’oublie pas d’effrayer les gardiens adverses. Revenu à son meilleur niveau la saison passée, Mesut Özil semble avoir enfin mis sa dépression de côté. Joshua Kimmich ne s’arrête plus de marquer. Mats Hummels se ré-intègre tranquillement à la Bavière. Même Mario Götze semble avoir retrouvé un certain niveau de jeu depuis son retour au BvB. Finalement, seuls les états de forme de Jérôme Boateng, blessé au début de la saison, et de Thomas Müller, qui n’a toujours pas marqué en championnat, représentaient une incertitude. Mais le match contre la Tchéquie, où les deux joueurs du Bayern ont régalé, a balayé les inquiétudes.
À l’assaut du mur nord-irlandais
Samedi soir, l’Allemagne a livré un match abouti de bout en bout, n’offrant aucun répit à son adversaire. Le genre de match que l’Allemagne avait l’habitude d’enchaîner entre 2010 et 2014, mais qui n’était plus trop au programme depuis le Mondial. Après la rencontre, Joachim Löw s’est dit très satisfait de « l’implication de [ses] joueurs » . « Nous étions très présents dans la surface de réparation, et c’était une vraie volonté de ma part. Ces derniers temps, notamment pendant l’Euro, nous n’étions pas aussi agressifs dans cette zone du terrain » , a-t-il ajouté concernant l’animation offensive. Mais comme l’a fait remarquer Mesut Özil en zone mixte, la Tchéquie n’a pas vraiment évolué au niveau attendu. Face à l’Irlande du Nord, la tâche devrait être plus compliquée. « C’est une équipe beaucoup plus robuste derrière » , a assuré le meneur d’Arsenal. Si l’Allemagne montre de belles choses depuis le début des éliminatoires, le match de ce soir est déjà un mini-test. Contrairement à juin dernier, la Mannschaft doit montrer de quoi elle est capable. « Nous devons aller de l’avant, imposer notre tempo, être réaliste même si l’équipe adverse risque de fermer le jeu » , a affirmé le sélectionneur allemand. Pour son homologue, Michael O’Neill, le fait d’avoir rencontré la NM il y a peu est « un énorme avantage, les joueurs savent à quoi s’attendre. » Mais comme tout le monde, le sectionneur nord-irlandais a bien remarqué que si l’Allemagne n’avait pas changé de visage depuis l’Euro, son état d’esprit était, lui, un peu différent. « Ils ont commencé très fort ces éliminatoires, alors que pendant l’Euro, lorsque nous les avons affrontés, ils venaient de perdre des points contre la Pologne et étaient plus fébriles. Cette fois-ci, ce sera beaucoup plus dur. » Si ce soir, l’Ulster s’en sort aussi bien qu’à l’Euro, on pourra presque parler de victoire.
Par Sophie Serbini