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All Blacks or Whites
Terre de rugby par excellence, la Nouvelle-Zélande joue ce samedi face à la Russie pour le match d’ouverture de la Coupe des confédérations 2017. Pour leur quatrième participation dans ce tournoi, les All Whites comptent bien montrer qu’ils savent se débrouiller avec un ballon rond dans les pattes.
Difficile d’exister face aux All Blacks. L’équipe de Nouvelle-Zélande de rugby à XV est tout simplement monstrueuse. En tête du classement des équipes nationales de rugby depuis 2009, les rugbymen à la tenue noire et à la fougère argentée sont les seuls à avoir rapporté trois titres mondiaux dans leur pays. Forcément, à côté de ça, une quatre-vingt-quinzième place au classement de la FIFA, c’est beaucoup moins vendeur. Et pendant que les All Blacks écrasent l’Australie, l’Afrique du Sud et autres grandes nations du rugby, les All Whites, surnom de l’équipe de football masculine de l’île, se défont difficilement de la Papouasie-Nouvelle-Guinée aux tirs au but en finale de la Coupe d’Océanie de football 2016. Mais qu’importe la manière, cette victoire leur a quand même permis de participer pour la quatrième fois de leur histoire à la Coupe des confédérations où ils rencontreront la Russie, le Mexique et le Portugal. Un gros défi pour cette équipe qui n’a réussi qu’à arracher un seul tout petit point contre l’Irak en 2009 dans cette compétition.
Des Kiwis pas encore mûrs
« Les All Blacks restent l’équipe n° 1 du pays, oui. » Dans une interview accordée au Monde en 2015 à l’occasion de la Coupe du monde de rugby, Jonathan Coleman, ministre de la Santé néo-zélandais, avait été très clair. « On place de telles attentes dans notre équipe de rugby que, par le passé, quand on jouait mal, nos défaites affectaient vraiment l’humeur du pays. En 1999, après la défaite contre la France (en demi-finale de Coupe du monde, ndlr), l’humeur était si pesante que certains avaient du mal à vouloir se rendre au travail les jours suivants » , avait-il ajouté. Autant dire que s’ils faisaient la même chose avec leur équipe de football masculine, le pays serait rapidement en crise.
Pourtant, les All Whites arrivent globalement à se faire respecter dans leur région du globe, eux qui disputeront un match aller-retour contre les îles Salomon pour les barrages de qualification de la zone Océanie, pour ensuite affronter le cinquième de la zone sud-américaine et enfin espérer mettre le pied en Russie pour la Coupe du monde 2018. Mais dès que l’équipe s’éloigne un peu des kiwis et des kangourous, c’est une tout autre histoire. Les hommes entraînés par Anthony Hudson ont enchaîné deux défaites en juin contre l’Irlande du Nord et la Biélorussie et s’étaient fait marcher dessus lors de la Coupe des confédérations de 2009 (défaite 2-0 contre l’Afrique du Sud et 5-0 contre l’Espagne). Cependant, les All Whites avaient été capables d’un coup d’éclat l’année suivante en Coupe du monde, arrachant un nul face aux champions du monde italiens et face à leurs deux autres adversaires, pour finir comme la seule équipe invaincue de la compétition.
Le football derrière le rugby et la voile
Une performance apparemment insuffisante pour faire décoller la hype All Whites au pays. « En football, pour qu’il y ait du monde devant un match de notre sélection nationale, il faut vraiment que l’enjeu soit d’importance » , avait aussi confié Jonathan Coleman. Et visiblement, les Néo-Zélandais ont d’autres chats à fouetter en ce début d’été. « En Nouvelle-Zélande il y a plusieurs sports qui intéressent les gens et en particulier le rugby. En ce moment, le pays accueille le « British and Irish tour » (une équipe formée des meilleurs joueurs de rugby du Royaume-Uni et d’Irlande affrontent des équipes néo-zélandaises, dont les All Blacks, ndlr) et c’est la priorité des médias ces jours-ci. Cependant, il y a aussi la Coupe de l’America à la voile où Team New Zealand est en tête, donc ce n’est pas étonnant que ça attire l’attention aussi, explique Steve Jackson, professeur spécialisé dans l’analyse socio-culturelle du sport à l’université d’Otago. Forcément, dans tout ça, la Coupe des confédérations est moins médiatisée. Mais en 2018, en fonction des performances des All Whites, il y aura une couverture médiatique bien sûr. Les gens s’intéressent aux All Whites, mais ils sont encore très loin de l’intérêt pour les All Blacks. »
Pourtant, Steve Jackson reconnaît que la situation pourrait évoluer un jour. « Il semble que le rugby restera le sport numéro un en matière d’affluence dans un futur proche, mais cela va changer sans aucun doute. Doucement, le football prend de plus en plus d’importance. Comme dans beaucoup d’autres pays, c’est le sport le plus populaire chez les jeunes jusqu’à l’âge de treize ans. L’intérêt pour le football augmente, mais il n’est pas encore une menace pour le rugby au niveau international » , confie-t-il. La sécurité joue aussi parfois plus en faveur du football que du rugby. Certains jeunes garçons, parfois poussés par leurs parents, abandonnent des lycées avec une section rugby et se tournent vers d’autres sports comme le football qui serait moins « dangereux » . « Le rugby n’est plus autant au centre de la vie des gens comme c’était le cas auparavant » , avertit à nouveau le professeur. Même s’il faudra encore pas mal de temps pour qu’un footballeur soit autant vénéré en Nouvelle-Zélande qu’un rugbyman. Ce serait quand même un comble que les All Whites prennent la main dans un pays où les All Blacks, c’est le pied.
Par Robin Richardot
Propos de Steve Jackson recueillis par RR