- International
- FIFA
- Présidence
Ali, le trop petit prince ?
Perdant magnifique contre Blatter en mai 2015, le prince Ali Bin Al Hussein va retenter sa chance pour la présidence de la FIFA, avec une probabilité de succès quasi nulle pour le plus jeune des candidats. Et ce, malgré son positionnement en totale rupture avec l'ordre établi.
« J’aimerais exprimer ma gratitude au prince Ali parce que c’est un compétiteur. Il a obtenu un excellent résultat, et ce n’était pas facile pour lui de se retirer. Il aurait pu continuer. C’est tout à son honneur. » Lors de son éphémère réélection à la tête de la FIFA en mai dernier, Sepp Blatter avait le propos élogieux envers son challenger d’un jour. En obtenant 73 voix, le prince Ali Bin Al Hussein de Jordanie venait de pousser l’inamovible président sortant à un second tour. Avant de se retirer d’un combat perdu d’avance. Qu’importe, en étant le seul à se dresser contre le monstre politique suisse, il est devenu à sa manière une incarnation de l’anti-establishment à la FIFA. Ce qui dans la période actuelle équivaut à passer pour un chevalier blanc.
Légion d’honneur, saut en parachute et port du hijab
Une étiquette qui semble coller parfaitement au frère du roi Abdallah. À seulement 40 ans, il affiche un CV digne d’un héros de fiction avec une éducation au Royaume-Uni et aux États-Unis, un solide parcours de soldat, quelques décorations – dont la Légion d’honneur française – et quelques tendances idéalistes. Spécialiste du saut en parachute et éclaireur pour les forces spéciales jordaniennes, il est devenu responsable de la sécurité du roi en même temps que président de la Fédération de football de son pays, en 1999, à seulement 23 piges. Aujourd’hui, il est toujours en charge de la seconde fonction, s’étant même offert une présence au comité exécutif de la FIFA de 2011 à 2015, son mandat dans la direction du football mondial, étant marqué par la levée de l’interdiction pour les femmes musulmanes de jouer avec un hijab. Mais il a été éjecté lors du dernier congrès au profit du cheikh Salman, aujourd’hui favori de l’élection.
Le candidat auto-proclamé de la transparence
Face au Bahreïni, le prince Ali va user de la même stratégie que contre Blatter : se présenter comme le candidat de la réforme et de la transparence. Il a ainsi saisi le Tribunal arbitral du sport pour imposer des isoloirs transparents dans le but d’empêcher les votants de photographier leur bulletin de votes, une technique qui permet à ceux qui ont reçu des consignes de prouver qu’ils les ont respectées. Sa principale promesse est d’éradiquer la corruption qui gangrène le football mondial, et pour prouver sa bonne foi, il a admis à GQ avoir un jour reçu une montre qu’il s’est empressé de restituer au comité d’éthique de la FIFA. La publication du rapport Garcia comme celle d’un audit de l’AFC réalisé par Price Waterhouse Coopers ou la rémunération des pontes de l’institution, le Jordanien veut tout déballer. Car même si ses chances sont infimes, il est celui qui a le plus à gagner du congrès de Zürich, même s’il ne jouira plus du sentiment anti-Blatter pour récolter des voix.
Son programme
S’il n’apparaît pas comme un vainqueur potentiel, le prince Ali propose paradoxalement une large proportion de mesures réclamées par le public : publication du rapport Garcia dans la première année de son mandat, une transparence totale, notamment concernant les niveaux de rémunération des hauts dirigeants de la FIFA, une limitation à deux mandats de quatre ans pour le président et les membres du comité exécutif, et la fin des conflits d’intérêts qui plombe l’instance. Et pour séduire les votants, car ce sont les présidents de fédérations nationales qui peuvent lui faire décrocher le Graal, il envisage de quadrupler les subventions annuelles que la FIFA consent envers ses affiliés. Il arrose, mais il le fait en pleine lumière.
Ce qu’il pourrait aimer à Zürich
De ses études aux States, le prince Ali aurait gardé un goût pour la lutte, un domaine où il excellait. Une bonne idée quand on est militaire, que de savoir réaliser une clé de bras ou une prise de soumission. Mais sans pratique, la technique se perd très vite. Pas de soucis, Zürich ne manque pas de clubs d’arts martiaux comme la Frota Academy, avec son fondateur ancien combattant de MMA (Mixed Martial Arts) et de ju-jitsu brésilien, ou encore le 360 Martial Arts Center, qui offre même des classes de boxe thaïlandaise. Comme ça, même non élu, le prince Ali sera affûté pour mettre la misère au cheikh Salman s’il lui manque de respect.
Ses chances de réussir
73/209 x nombre de présidents de fédérations africaines qui veulent dévoiler leur niveau de rémunération = 0%, il va se faire défoncer
La chanson
Par Nicolas Jucha