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Algérie-France : rendez-vous en octobre 2020 ?
L’Algérie et la France pourraient s’affronter en octobre 2020, en match amical. Les deux fédérations partagent cette volonté commune et les gouvernements des deux pays devraient prendre contact prochainement pour discuter des conditions de sécurité. En Algérie, l’idée est relativement bien accueillie.
Chez Noël Le Graët, l’organisation d’un match entre l’Algérie et la France – et de préférence avant la fin de son mandat, en 2020 – n’est pas une idée nouvelle. Le big boss de la Fédération française de football (FFF) l’a dit et redit ces derniers mois, et pas plus tard que le mardi 10 septembre, chez nos confrères de France Info. « Il est temps de faire ce match. Depuis que je suis en place, je veux aller en Algérie, car c’est le seul pays qu’on ne rencontre pas. Il est temps, 60 ans après(l’indépendance de l’Algérie vis-à-vis de la France, N.D.L.R.), qu’on puisse jouer au football. Je suis partisan depuis huit ans d’organiser cette rencontre. » Le Graët n’avait fait que répéter ce qu’il avait déclaré en juillet dernier, sur la Chaîne L’Équipe, en assurant ne pas comprendre que « deux pays amis ne puissent pas se rencontrer. »
Le projet, qui était donc dans les cartons depuis un bail, pourrait se concrétiser en octobre 2020 (entre le 5 et le 13, N.D.L.R.), dans le nouveau stade d’Oran (40 000 places), lequel sera bientôt livré, ou à Alger. Sur France Info, le président de la FFF a ajouté qu’il se rendrait prochainement à Alger afin d’en discuter avec Kheireddine Zetchi, son homologue algérien, sans oublier d’évoquer les questions de sécurité, un dossier qui sera directement traité entre les gouvernements des deux pays. Car la dernière fois que les Bleus et les Fennecs s’étaient croisés, le 6 octobre 2001 au Stade de France, la soirée s’était achevée dans la confusion la plus totale. La Marseillaise avait été sifflée, et la pelouse envahie à un quart d’heure de la fin, obligeant l’arbitre portugais Gomes Costa à mettre un terme définitif au match, alors que la France menait 4-1. Plusieurs jours avant ce match, un rapport des Renseignements généraux avait pourtant annoncé ces débordements. Un avertissement dont les autorités françaises n’avaient pas tenu compte.
« Ce serait un évènement »
Ces derniers jours, certains des acteurs potentiellement concernés par cet Algérie-France ont dit tout le bien qu’ils pensaient de ce qui n’est encore qu’une hypothèse. Djamel Belmadi, le sélectionneur des champions d’Afrique en titre – et qui était sur le terrain en octobre 2001 – a promis, sur RMC, « un très bel accueil aux Bleus » . Raphaël Varane, sondé lors du rassemblement des Bleus à l’occasion des matchs qualificatifs pour l’Euro 2020 face à l’Albanie (4-1) et Andorre (3-0), a validé l’idée. Rabah Madjer aussi. L’ancien international algérien, qui était sur le banc de touche des Fennecs le 6 octobre 2001, estime que le temps de tourner la page est venu. « Ce qui s’est passé il y a dix-huit ans est regrettable. Cela n’aurait jamais dû se produire, même si je n’avais pas senti de réel danger ce soir-là lors de l’envahissement du terrain. Aujourd’hui, il me semble nécessaire de se tourner vers le futur. Un match entre l’Algérie et la France championne du monde serait un évènement. Accueillir les Bleus, à Oran ou Alger, ce serait quelque chose. J’espère que cela se fera » , clame l’ancien attaquant du FC Porto.
La visite de la bande à DD en Algérie ne serait historiquement pas une première, puisque les deux pays s’étaient affrontés à Alger le 6 septembre 1975 à l’occasion de la finale des jeux méditerranéens (3-2 pour l’Algérie), mais il ne s’agissait pas des sélections A (Olivier Rouyer, Dominique Rocheteau et Jean Fernandez, notamment, figuraient dans cette équipe de France B). Mais quarante-cinq ans plus tard, la présence des champions du monde aurait une tout autre portée. « Il n’y a pas eu beaucoup d’équipes étrangères et surtout européennes ces dernières années à venir jouer contre les Fennecs » , poursuit Madjer, qui se souvient de matchs amicaux organisés en Algérie, dans les années 1980, « face à l’Éire, la Suisse, le Pérou, ou de grosses équipes européennes » . Depuis le début de la décennie, seules la Bosnie-Herzégovine (0-1, le 14 novembre 2012) et la Slovénie (2-0, le 5 mars 2014) ont fait le voyage depuis le Vieux-Continent. « Mais la France, c’est autre chose » , intervient l’ex-international Nordine Kourichi. « Ce match, il faut l’organiser. Tous les Algériens, je pense, veulent voir les champions du monde. Ce serait positif pour les relations entre les deux pays, dont on connaît les liens, la fraternité. Oui, il y a eu des blessures. Trop de blessures, mais il faut avancer, regarder l’avenir. Si ce match ne devait pas se faire, cela signifierait qu’on regarde encore derrière nous. »
Élargir le débat
Abdelkrim Medouar, le président de la Ligue de football professionnel (LFP), croit aussi à la faisabilité du projet. En élargissant aussi un peu le débat. « On veut prouver que l’Algérie est capable d’accueillir de très grandes équipes, dont la France. Notre pays est capable d’organiser un évènement comme celui-ci, ce que je souhaite. Au niveau de la sécurité, je n’ai aucune inquiétude. Tout cela se réglera entre les gouvernements des deux pays » , explique le dirigeant. L’Élysée, qui n’est pas opposé à l’organisation de cette rencontre, exigera évidemment des conditions de sécurité maximales pour la délégation française. « La France a joué ces dernières années au Maroc (2-2, le 29 mai 1998, et 5-1, le 6 juin 2000, N.D.L.R.)et en Tunisie(1-1, le 30 mai 2010), sans qu’il y ait le moindre problème. Et la CAN en Égypte s’est déroulée dans d’excellentes conditions de sécurité » , plaide Kourichi.
Reste à savoir quel accueil pourrait être réservé aux Bleus de l’autre côté de la Méditerranée. « Les Algériens adorent le foot, ceux qui viendront au stade se déplaceront pour voir des stars comme Pogba, Mbappé ou Griezmann et assister à un spectacle » , reprend Madjer. Pourtant, le football local est régulièrement confronté à des actes de violence lors des matchs de Ligue 1 ou de Ligue 2, mais cette réalité n’inquiète guère Bilel, un supporter d’un club de la capitale. « Les autorités feront le nécessaire. Quand elles veulent mettre le paquet sur le maintien de l’ordre, elles en sont capables. Elles ne pourraient pas se permettre que cela dégénère. Ce serait très mauvais pour l’image du pays, alors que presque toutes les manifestations qui ont lieu depuis le mois de février pour réclamer un changement de système politique se déroulent sans le moindre incident. Les Bleus ? Il y a des gens qui apprécient cette équipe, d’autres non. Lors de la finale de la Coupe du monde, certains étaient ouvertement pour la Croatie. Ils étaient même majoritaires. Tout n’est pas réglé entre l’Algérie et la France. Je ne sais pas si un match de foot contribuera à apaiser certaines tensions, mais moi, j’ai envie que ça se fasse ! »
Par Alexis Billebault