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Alessandro Florenzi, enfin chef de meute
À 28 piges bien tassées, Alessandro Florenzi semble comme arrivé à destination : le voilà capitaine d'une Roma qui a enfin décidé de tourner la page de l'ère Totti-De Rossi. Une promotion aussi valorisante que pesante, pour un joueur qui va tenter de devenir le totem identitaire d'un club en quête de nouvelles icônes. Pour y parvenir, il faudra déjà commencer par battre la Lazio ce samedi, à l'occasion du derby de la capitale, qui pointe le bout de son nez dès la deuxième journée.
Un derby, c’est aussi une routine. Deux fois par an, on retrouve passionnément l’ennemi intime et avec lui des visages bien connus, ces supporters et joueurs adverses qu’on a appris tantôt à détester, tantôt à respecter, souvent même un peu des deux à la fois. Forcément, il y a du sacré dans ce rituel-là. Surtout à la Roma, où les premiers rôles ne changent que rarement, alors que le brassard de capitaine a été quasi exclusivement monopolisé par l’increvable duo Totti-De Rossi entre 1998 et 2019. C’était beau, c’était bien, mais c’est aussi fini. Cette saison, c’est Alessandro Florenzi qui, après le départ de De Rossi au mercato estival, a hérité du capitanat giallorosso. Une rupture dans la continuité : comme Totti, comme De Rossi, le joueur est un Romanista pur jus. Encore faut-il savoir s’il a réellement les épaules pour représenter à son tour cette Roma.
L’héritier
La chose n’est pas tout à fait anodine dans un club comme celui-là, où Francesco Totti et Daniele De Rossi ont incarné aux yeux du grand public une Roma condamnée à rester dans l’ombre des grands clubs historiques du Nord lors de la décennie 2000, puis de la Juve et du Napoli plus récemment. Pourtant, même le profane, qui regardait d’un œil distrait le football italien, connaissait ces deux zigotos. Les mythes s’affranchissent des frontières et des différences culturelles. La Roma, qui depuis son Scudetto de 2001 n’a remporté que deux coupes d’Italie (là où la Lazio en remportait elle quatre), gardait un résonance médiatique importante grâce à Totti et De Rossi, deux joueurs différents, mais au storytelling similaire : Romains pur jus, surdoués à leurs postes respectifs, ils auraient pu évoluer dans des clubs de dimension supérieure, mais sont restés à la Roma par amour du club et de leur ville. Arrive Alessandro Florenzi, avec une histoire qui a trempé dans un jus similaire. Né à Rome, passé par le centre de formation de la Louve, le gamin, qui a grandi dans le culte de Totti, se fait les os en prêt à Crotone en 2011-2012, avant de revenir à la Roma l’exercice suivant, où il conquiert une place de titulaire. À partir de là, son chemin semble tracé : la prochaine bandiera romanista, celle qui reprendra le flambeau après la retraite de De Rossi et Totti, ce sera lui.
Évidemment, la réalité s’avère plus complexe. Presque idylliques lors de ses premières années romaines, les relations de Florenzi avec la curva sud de l’Olimpico se sont tendues dernièrement. Fin janvier 2018, la Roma s’inclinait contre la Sampdoria, et Alessandro empêchait après le match Nainggolan de discuter avec les tifosi de la curva, un geste très mal reçu par ces derniers. La cote de Florenzi ne s’améliorait pas davantage au regard de ses performances récentes, alors que l’électrique couteau suisse romain a vécu une dernière saison mitigée dans la capitale. En atteste cette faute grossière sur Fernando, l’attaquant de Porto, en huitièmes de finale de C1, qui provoquait un penalty synonyme d’élimination pour la Louve en mars dernier. Le joueur sera même sifflé à plusieurs reprises par les ultras lors du dernier exercice, un traitement sans doute injuste pour un type dont l’exemplaire sens du sacrifice a pu parfois jouer contre lui. À 28 ans, Florenzi a été aligné successivement comme ailier droit, milieu relayeur puis arrière droit, en fonction des besoins du collectif, et ce, sans jamais placer un mot plus haut que l’autre.
Capitaine Florenzi, hissez la grand voile
Difficile, dès lors, de trouver une vraie forme de continuité sportive, de construire des automatismes, autant de certitudes dont Florenzi, qui n’est manifestement pas un virtuose comme Totti et De Rossi, a besoin pour s’épanouir sur le pré. S’il n’a pas le talent de ses deux aînés, le bonhomme n’en dégage pas moins quelque chose de particulier, une rage de vaincre, d’honorer ses couleurs comme de bousculer l’ordre footballistique établi, quitte à parfois tenter des gestes insensés, comme ce but prodigieux qu’il avait marqué face à Barcelone en septembre 2015, en C1.
Pour retrouver une bonne fois pour toutes le feu sacré, Florenzi a heureusement un bon paquet d’atouts en sa faveur : d’un, il devrait se stabiliser au poste d’arrière droit, la Roma n’ayant recruté que Davide Zappacosta, prêté par Chelsea, à ce poste cet été. L’ancien du Torino devrait faire office de suppléant à Alessandro, qu’il a d’ailleurs remplacé en ouverture de la Serie A le week-end dernier face au Genoa. De deux, son nouveau statut de capitaine semble loué par ses équipiers, à l’image d’Edin Džeko, qui s’est allé dernièrement à quelques confidences : « Florenzi m’a promis :« Si tu prolonges, je te donne le brassard de capitaine. »Quand j’ai signé, il m’a dit: « Il est à toi. » Mais j’ai répliqué en lui disant qu’il restera notre capitaine, et que nous sommes tous avec lui. » Enfin, Florenzi a renoué avec les ultras, alors qu’une banderole où l’on pouvait lire « La tradition du brassard à un Romain se perpétue, aux côtés du capitaine Florenzi » a été déployée lors de la première journée de Serie A. De bon augure avant de recevoir la Lazio et peut-être progressivement endosser un costume de patron auquel il a toujours semblé prédestiné.
Par Adrien Candau
Tous propos issus de Roma TV.