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Alban Selami : « J’ai vendu mes maillots dans 35 pays différents »

Propos recueillis par Côme Tessier
6 minutes
Alban Selami : « J’ai vendu mes maillots dans 35 pays différents »

Sur son site, Alban Selami ne vend qu'une seule chose : des vêtements à l'effigie de l'aigle. Des maillots officiels, des shorts, tout ce qui a un rapport avec l'Albanie passe par Alban Football, qui livre ensuite dans le monde entier. Un marché de niche exploité par ce jeune entrepreneur passé par les États-Unis et retourné vivre dans son pays, pour y vivre le premier Euro de l'histoire.

Tu as vendu beaucoup de maillots après ce premier match de l’Euro ?Oh oui ! La journée a été la plus animée de l’histoire de notre boutique. Nous n’avions pas autant anticipé les choses aussi intenses dès le début de l’Euro pour l’Albanie. On ne s’attendait pas à cela.

Tu vends tes maillots où, dans quels pays ?En tout, on a vendu dans plus de 35 pays différents déjà. Notre principal pays acheteur, ce sont les États-Unis. Ensuite, il y a des maillots qui ont été expédiés vers le Canada, l’Australie, Israël, le Japon, Singapour, un peu partout en Europe… C’est infini ! Parfois, ce sont simplement des personnes qui ont un lien quelconque avec l’Albanie, par la famille lointaine ou des amis.

Comment l’idée est venue de faire un site pour vendre uniquement des maillots albanais ?Au départ, c’était un problème purement pratique : je cherchais moi-même des maillots de l’Albanie. Il était alors très difficile de s’en procurer, surtout pour moi qui vivais alors aux États-Unis. Je suis né en Albanie, mais j’ai vécu à New-York et à Boston pendant une quinzaine d’années. Je travaillais dans une autre start-up du même genre, qui s’est arrêtée malheureusement. En cherchant des maillots et en me rendant compte de la difficulté pour les avoir, avec mon expérience, j’ai décidé de me lancer dans ce business. On a débuté en 2014.

Cette boutique, c’est une façon de défendre ton identité albanaise ou il s’agit plutôt d’une passion pour le foot qui t’incitait à te lancer ?Hum… C’est difficile à dire. C’est probablement un mélange des deux. Il y a clairement une part de moi patriote, qui souhaitait porter les couleurs de son pays. Je savais aussi que ces deux choses-là n’allaient pas disparaître, le patriotisme et le football. Par conséquent, c’est un bon business de mélanger les deux aspects. Pour l’Albanie encore plus. Beaucoup de mes compatriotes vivent en dehors du pays, que ce soit en France, en Suisse ou aux States. Le football est l’une des seules choses qui permet d’unir les gens, à travers le monde. C’était la principale raison pour laquelle je souhaitais me lancer dans cette boutique. J’avais en plus la solution pour permettre à tout le monde de trouver des maillots.

Tu as ouvert le site au début des qualifications pour l’Euro. Tu t’attendais à ce que l’Albanie réussisse à atteindre la phase finale ?Personne ne pouvait s’attendre à cela. Il y avait certes un petit frémissement autour de l’équipe nationale, sans plus. À l’époque, Adnan Januzaj commence sa carrière à Manchester United et n’a pas encore fait son choix pour l’équipe nationale. En Albanie, on comptait beaucoup sur un choix en notre faveur de sa part. Finalement, il a préféré la Belgique. Mais quelque part, on a réalisé qu’il y avait une bonne énergie autour de notre équipe de football.

Avec la qualification obtenue contre l’Arménie, une belle victoire 3-0, cela a été le tournant pour moi. Je vivais encore aux USA, mais quand j’ai appris la nouvelle, je me suis décidé immédiatement à retourner vivre à Tirana pour continuer à faire grandir la boutique.

Ta boutique en ligne a alors suivi plus ou moins la même progression que l’Albanie dans son groupe ?J’ai commencé avec une centaine de maillots. On a effectivement grandi ensuite petit à petit, par à-coups. Il y a eu un certain engouement en particulier pour le match contre la Serbie, qui a ravivé les passions nationales. Puis avec la qualification obtenue contre l’Arménie, une belle victoire 3-0, cela a été le tournant pour Alban Football. Je vivais encore aux États-Unis, j’étais en cours d’économie quand j’ai appris la nouvelle et je me suis décidé immédiatement à retourner vivre à Tirana, pour continuer à faire grandir la boutique.

Cela n’a pas été trop dur de recommencer dans un autre pays ?Le plus difficile a alors été l’installation. L’Albanie est encore un pays en voie de développement, il n’y a pas les infrastructures suffisantes pour une boutique en ligne. En fait, ici, personne ne fait comme nous, il n’y a pas de business du genre. Le déménagement a donc été une étape à franchir. Mais nous sommes passionnés, motivés, on a fait ce qu’il fallait pour continuer.

Ce premier match de l’Albanie, comment l’as-tu vécu ?C’était passionnant. Je suis allé dehors, avec des amis. L’atmosphère était dingue. On était particulièrement impatient en Albanie pour ce match parce que c’était pratiquement un derby. Beaucoup de joueurs côté albanais ou suisse ont des liens avec les deux pays. Et puis, c’était notre première dans une grande compétition. Mais bizarrement, nous avons eu le sentiment que ce match ne serait pas non plus le dernier. On a prouvé qu’on pouvait faire quelque chose, que nous n’étions pas là pour faire de la figuration. Notre équipe a joué une grande partie du match à 10 et n’était pas loin de faire nul, sans la maladresse de notre attaquant (Gashi, ndlr). Donc, depuis, les joueurs et les supporters sont confiants. La France a probablement réalisé aussi que cela ne serait pas si facile que cela de nous battre. On peut même gagner, je ne serais pas surpris. Ce sera intéressant dans tous les cas pour nous – alors que le match contre la Roumanie, je ne le sens pas du tout. Comme nous, la Roumanie, personne n’en attend rien. On a du mal contre les équipes de la sorte. Face à une grosse écurie, l’Albanie est toujours meilleure. On sous-estime trop les équipes qui nous ressemblent.

L’ambiance est bonne au pays ?Ici, l’atmosphère est surprenante. Pour une fois, on supporte notre propre équipe. D’habitude, à chaque compétition du genre, on est contraint de choisir un pays différent. Généralement, il y a des fans de l’Italie – par la proximité géographique – ou de l’Allemagne – qui a une grosse base de supporters ici. Cette fois-ci, la place principale de Tirana a des écrans géants, tout le monde se réunit pour son propre pays, l’Albanie. C’est incroyable. Je serai à Lyon pour le match contre la Roumanie, samedi et dimanche prochains, mais à part en France, je ne souhaiterais voir les matchs nulle part ailleurs qu’en Albanie.

Qu’as-tu pensé du match de Lorik Cana et de son carton rouge ?Je continue de penser qu’il a fait le bon geste, malgré tout. À 2-0, c’était plié. Il y a sûrement son côté italien et son entente avec le coach De Biasi – je sur-interprète peut-être son choix – qui lui ont permis de se rendre compte qu’il valait mieux être à un joueur de moins, plutôt que d’en prendre un deuxième à ce moment-là du match. Les équipes italiennes ne sont pas forcément moins bonnes après une expulsion, elles savent faire avec. C’était pas pire finalement. Naturellement, j’étais vraiment énervé sur le coup, mais on a mieux joué par la suite, à 10. Je veux croire qu’il savait ce qu’il faisait.

Sagna, l’heure de la mise au point
Dans cet article :
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Propos recueillis par Côme Tessier

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