- Ligue des champions africaine
- Finale
- Al Ahly/Espérance Tunis
Al Ahly-Espérance, duel de géants
Les deux plus gros clubs africains se retrouvent en finale de la 48e édition de la Ligue des champions de la CAF (ce dimanche à 18h, match retour le 17 novembre). Si l’Espérance Sportive de Tunis entend bien conserver son trophée, Al Ahly, lui, compte bien le lui enlever et remporter le titre le plus prestigieux du continent pour la septième fois de son histoire.
Au Caire et à Tunis, les étagères sont larges et d’excellente qualité. Et pour cause, il faut bien que les 63 trophées du Zamalek et les 36 du Club Africain tiennent dessus. Mais surtout, il faut veiller à ce que les 123 trophées d’Al Ahly ne se cassent jamais la gueule. Ni les 53 récompenses glanées par l’Espérance Sportive de Tunis. Le « National » contre l’Espérance (ou « Taraji » en VO), simplement la plus belle affiche que pouvait proposer cette 48e finale de la Ligue des champions de la CAF. L’EST et ses deux couronnes qui va tenter de conserver son titre face à l’ogre égyptien, déjà détenteur de six titres dans cette compétition. Un record.
Champion d’Égypte 10/11, Al Ahly débute la compétition en seizièmes de finale. Il ne se fait pas sucrer par Ethiopian Coffee, dont il dispose assez facilement (0-0, 3-0) avant d’avoir quelques petites frayeurs face au Stade Malien (0-1, 3-1). Après quoi le National se retrouve dans un groupe B assez relevé, en compagnie du Berekum Chelsea et son redoutable buteur Emmanuel Clottey (qui finira sûrement meilleur buteur avec 12 buts et qui a signé en septembre dernier à…l’Espérance), mais surtout du TP Mazembe (vainqueur des éditions 2009 et 2010) et son rival éternel, le Zamalek. Malgré un manque de rythme du fait d’un championnat suspendu depuis le mois de mars 2012 suite aux événements de Port-Saïd et de matchs à domicile à huis-clos, Al Ahly s’en tire très bien, avec 3 victoires, 2 nuls, une petite défaite face au Tout Puissant et finit premier de sa poule. Un nul au Nigeria et une courte victoire 1-0 permettent aux « Red Devils » de sortir les Sunshine Stars et d’aller retrouver l’Espérance en finale, cette équipe qui en 2010 l’avait éliminée en demies suite à une manchette de Michael Eneramo.
Les éternelles querelles entre l’Espérance et le TP Mazembe
Des « Sang et Or » qui ont eu la tâche un peu plus facile en préliminaires, disposant tour à tour des Gambiens de Brikama United (1-1, 3-1) puis des Zimbabwéens du Dynamos FC (6-0, 1-1). En poules, le groupe A composé des Tunisiens de l’EST et de l’Étoile du Sahel, des Sunshine Stars et des Algériens de l’ASO Chlef a été réduit au nombre de trois équipes suite aux incidents lors du match entre l’Étoile et l’Espérance. Alors que le « Taraji » menait 2-0 à Sousse, les supporters de l’Étoile ont balancé pléthore de projectiles et ont envahi la pelouse. Match arrêté à la 69e, disqualification de l’Étoile, résultats annulés, l’Espérance finit en tête de son groupe avec neuf points. En demies, la double confrontation avec le TP Mazembe s’annonce électrique. D’un côté, les Tunisois ont toujours soupçonné le club de Lubumbashi d’avoir triché lors de la finale de 2010 (5-0, 1-1). De l’autre, le président du Mazembe, Moïse Katumbi, accuse l’Espérance d’avoir volontairement porté plainte contre son club suite à l’alignement de Janvier Besala Bokungu en Ligue des champions. Ancien joueur de l’EST transféré à Mazembe, Besala Bokungu n’était semble-t-il pas qualifié. Son alignement semblait donc injustifié. La FIFA finira par trancher et par disqualifier le Mazembe.
C’est donc dans cette atmosphère tendue que les deux clubs se retrouvent, donc. Après un 0-0 à Lubumbashi, les deux équipes sont censées se retrouver à Tunis pour disputer la seconde manche. Problème, le TP Mazembe n’approuve pas la décision de la commission des arbitres de la CAF d’avoir confié le sifflet au Gambien Gassama Papa Bakary. Commission dirigée par Tarek Bouchamaoui, Tunisien d’origine. Et qui est soupçonné par le Mazembe de ne donner aux clubs tunisiens que des arbitres qui peuvent les favoriser. L’arbitre gambien est donc récusé, la CAF désigne un officiel sénégalais, Badara Diata. A Tunis, l’Espérance s’imposera sur le plus petit des scores, et tentera de remporter sa troisième couronne continentale.
« Nous gagnerons pour nos fans morts à Port-Saïd »
Encore faudra-t-il passer la montagne (la pyramide?) égyptienne. Malgré l’absence des frères Msakni (le plus talentueux des deux, Youssef, s’est fait opérer de l’appendicite quelques jours avant la rencontre), l’Espérance pourra toutefois compter sur des cadres comme Khaled Chemmam, Mejdi Traoui, le Ghanéen Harrisson Afful ou encore le Camerounais Joseph Yannick Ndjeng, sans oublier Hocine Ragued, qui voit le match comme « une partie d’échecs » . En gros, ça va être compliqué, d’autant plus qu’il y a une grosse carotte au bout: outre la prime 1,425 millions de dollars versée au club vainqueur, il y a une place pour la Coupe du monde des clubs au Japon. « Pour nous, c’est une source de motivation supplémentaire. La plupart des joueurs de l’équipe ont déjà disputé la Coupe du monde des clubs l’an dernier. Ils ont raconté aux nouveaux à quel point cette expérience est extraordinaire. Nos supporters veulent eux aussi que l’on gagne la Ligue des champions africaine pour que la Tunisie représente l’Afrique à la Coupe du monde des clubs » , ainsi l’ancien Parisien.
Un match qui ne s’annonce pas des plus faciles, donc. Et le coach tunisien Nabil Maâloul en est parfaitement conscient : « Ahly-EST, c’est un derby. […] Ils ont un style de jeu différent et une équipe plus homogène » . En effet, finie la période faste sous le Portugais Manuel José de Jesus (entre autres, 4 Ligues des Champions, 4 Supercoupes d’Afrique, entre 2001 et 2009), place à la rigueur avec Hossam Al Badry, 52 ans, pur produit du club. Un homme qui n’a pas hésité à bannir sa star Mohamed Aboutrika pendant deux mois (et lui infliger une amende de 500 000 livres égyptiennes, soit un peu plus de 80 000 dollars) pour avoir snobé la Supercoupe d’Égypte en septembre dernier. Aboutrika sera là, de même que Walid Soliman et Mohamed Nagy, dit « Gedo » . Le public aussi sera là. La partie se déroulera non pas au Caire, mais à Alexandrie. Au stade Burj el Arab, il y aura un millier de Tunisiens, mais surtout 15 000 Égyptiens, qui n’attendaient que cela. Afin de limiter au maximum les dégâts, les ambassades des deux pays se sont déjà accordées pour que les spectateurs des deux matchs soient âgés de plus de 25 ans. « Nous ferons de notre mieux pour gagner le titre et le dédier à nos fans qui ont perdu la vie à Port-Saïd » , promet déjà Emad Moteab. En attendant, dans les cafés du Caire et de Tunis, ce sont des milliers de chichas, de thés à la menthe et de jus de mangue qui risquent de voler dans tous les sens durant 90 minutes. Tant que ce ne sont pas des étagères…
Match aller ce dimanche à 18h, match retour le 17 novembre
Par Ali Farhat