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Akanji, garde suisse

Par Julien Duez
5 minutes
Akanji, garde suisse

Alors que la Suisse se cherche toujours un buteur digne de ce nom, la relève est déjà assurée côté défensif. À seulement 22 ans, Manuel Akanji s’est imposé comme le taulier de la charnière centrale aux côtés de Fabien Schär. Décisif face au Brésil et à la Serbie, le joueur du BvB symbolise mieux que personne le futur de la Nati.

Sur son avant-bras, un tatouage. Jusque-là, rien d’étonnant. Sur ce tatouage, une maxime. Là non plus, pas de quoi sauter au plafond. Sur cette maxime, trois mots : « Prove them wrong » , « Montre-leur qu’ils ont tort » en VF. Si la devise peut prêter à lever les yeux au ciel au vu de son caractère apparemment naïf, il n’en est pourtant rien. Elle est, au contraire, remplie de symbolique.

Le symbole d’un miracle : celui de participer à une Coupe du monde un an et demi après s’être remis d’une rupture des ligaments croisés, le tout avec seulement sept sélections dans les pattes en équipe nationale. Mais Manuel Akanji ne perd pas de temps à regarder dans le rétroviseur. Ses plus belles années doivent s’écrire maintenant.

Encore amateur il y a trois ans

Né d’un père nigérian et d’une mère suisse, le petit Manuel grandit dans un environnement sportif au cœur du canton de Zurich. Sa sœur Sarah tape également le cuir en première division et est même à l’origine de la création de la section féminine du FC Winterthour. Là où tout a commencé pour le frangin, comme il l’expliquait en 2017 au moment de recevoir le trophée d’espoir de l’année : « J’ai remporté à onze ans un concours national d’athlétisme. À l’époque, je jouais également au tennis. Ce n’est qu’à treize ans que je me suis concentré exclusivement sur le football. » Autant d’expériences qui lui permettent de développer ses qualités de vitesse et d’endurance, ainsi que ses réflexes sur le terrain. Constamment maltraité sur la pelouse de la Rostov Arena, le Brésilien Gabriel Jesus peut en témoigner.

Et dire qu’il y a encore trois saisons, Akanji n’était qu’un anonyme des terrains cabossés de D2 suisse… Dans le même temps, ses parents bienveillants le poussent à terminer son apprentissage d’employé de commerce achevé il y a à peine deux ans. Rien ne le prédisposait donc à connaître une telle ascension. L’intéressé est d’ailleurs le premier à le reconnaître : « En catégorie junior, j’étais un joueur moyen. Je ne me voyais pas faire une grande carrière, je me contentais de jouer. Et puis à 17 ans, j’ai fait une poussée de croissance, ce qui a amélioré mes performances. Ce n’est qu’à ce moment-là que je me suis rendu compte de mon potentiel. » Il n’est pas le seul : à l’été 2015, le FC Bâle vient le chiper à Winterthour contre un chèque de 750 000 euros. L’histoire est en marche.

Dortmund en attendant Manchester United ?

Au sein du deuxième club le plus titré de Suisse, Manuel Akanji se révèle parmi les meilleurs espoirs du football helvétique. Son grand gabarit (1,87 m pour 85 kg) en fait un colosse infranchissable. Ce qui ne l’empêche pas de se révéler très adroit des deux pieds, loin du rôle de boucher qu’on lui collerait presque naturellement sur le dos. Pour preuve : seulement treize cartons jaunes et aucun rouge en 108 matchs professionnels. Les titres s’enchaînent : deux d’affilée entre 2015 et 2017, dont un couplé avec une victoire en Coupe de Suisse. Il n’en fallait pas plus pour que Vladimir Petković ne le teste avec la Naticontre les îles Féroé en juin 2017. L’examen est concluant puisque les Helvètes s’imposent 0-2 et poursuivent avec brio leur campagne de qualification pour le Mondial. Jusqu’au barrage contre l’Irlande du Nord, que la Nati remporte dans la douleur.

« Sincèrement, avec Manuel, je n’avais pas l’impression d’avoir devant moi un jeune joueur. Il a joué tout en contrôle comme s’il avait l’expérience d’un défenseur de trente ans » , analysait Yann Sommer après le match aller. En seulement sept sélections, Akanji s’est naturellement imposé dans un noyau en pleine cure de rajeunissement. À l’aise dans ses baskets, il parvient à s’intégrer sans mal : « L’accueil a été très chaleureux. J’ai tout de suite pu jouer à la Playstation avec les « anciens » de l’équipe et ils ont vu que je n’étais pas là par hasard. » Dans l’axe de la défense, il devient le complément de Fabian Schär.

Complémentarité et ambition

La fougue pour le premier, l’expérience pour le second. Avec un perdant dans l’histoire : Johan Djourou, qui finit par se retrouver dans le rôle du super sub de la pépite. Parallèlement à sa trajectoire en équipe nationale, c’est toute l’Europe qui le découvre sur la scène continentale avec Bâle. Lors de la double confrontation face à Manchester United – le club de ses rêves –, il tape dans l’œil de plusieurs clubs de Bundesliga. L’hiver dernier, c’est finalement à Dortmund qu’il décide de poser ses valises et de goûter pas à pas à l’échelon supérieur. Mais nul doute que l’arrivée de Lucien Favre aidera à le sublimer encore davantage.

Aujourd’hui, tout semble réussir à Manuel Akanji. À tel point que certains observateurs locaux voient en lui le futur capitaine de la Nati. Au même titre que Denis Zakaria ou Breel Embolo, il est décrit par Le Temps comme faisant partie de cette nouvelle « génération cool » qui caractérise l’équipe suisse. « Ces footballeurs-là sont plus décomplexés que Xhaka, Rodríguez et Seferović, qui eux-mêmes l’étaient davantage que leurs aînés » , peut-on lire dans les colonnes du quotidien. Même s’il est toujours difficile de prédire l’avenir, tout semble indiquer que le futur leur appartient. C’est pourquoi ils auront à cœur de le prouver dès ce mercredi face au Costa Rica. Quand la machine est lancée, pas la peine de freiner inutilement.


Dans cet article :
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Par Julien Duez

Propos de Manuel Akanji recueillis par credit-suisse.com, ceux de Yann Sommer recueillis par Le Temps.

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