- Liga
- J27
- Real Madrid-Betis Séville
Aïssa Mandi : « Gagner au Bernabéu, ce serait pas mal ! »
L'ex-Rémois Aïssa Mandi a traversé les Pyrénées cet été pour rejoindre Séville. Ce dimanche, il s'apprête à affronter le Real Madrid avec son club du Betis, actuel 14e de Liga. L'occasion d'évoquer avec le capitaine de l'Algérie le souvenir de Kopa et une saison 2016-2017 plutôt remplie entre un premier transfert, un mariage, un enfant, une défense à trois, une CAN et des souvenirs des cours d'espagnol au lycée.
En tant qu’enfant du Stade de Reims et ancien capitaine du club, la disparition de Raymond Kopa a forcément eu une résonance particulière pour vous.C’est sûr, comme pour tous les amoureux du football français. C’est une figure mythique qui est partie, un des meilleurs joueurs de tous les temps. Je l’avais déjà croisé plusieurs fois à Auguste-Delaune, en Ligue 1 comme en Ligue 2, il venait parfois. C’était une légende que l’on rencontrait et on en avait conscience quand on le voyait.
Quand on est formé à Reims, grandit-on dans le culte de Raymond Kopa et du grand Reims ? C’est une époque qui vous parle malgré la distance temporelle et les images en noir et blanc ?Bien sûr qu’au Stade de Reims, on grandit avec les références du grand Reims des années cinquante et soixante. C’est cette équipe-là qui a mis le club sur la carte du football européen. Dès les équipes de jeunes, les éducateurs nous parlent souvent de cette génération exceptionnelle, de Kopa, Fontaine… Ce sont des références qui nous parlent au club.
Coïncidence du calendrier, ce week-end avec votre nouvelle équipe, le Betis, vous jouez contre l’autre club de Raymond Kopa, le Real Madrid. Avec un digne successeur français sous la tunique blanche des Merengues en la personne de Karim Benzema.
C’est clair qu’il réussit une carrière exceptionnelle au Real. Je pense qu’en France, on ne mesure pas toujours ce qu’il réalise ici en Espagne. Cela fait maintenant des années qu’il est dans ce club mythique, qu’il met ses buts tous les ans et qu’il se construit un énorme palmarès. Tous les ans, il répond présent, il est titulaire dans l’une des meilleures équipes du monde. Je suis vraiment admiratif. C’est juste incroyable ce qu’il réalise au Real.
Justement avant de jouer face à la BBC, ressent-on une certaine forme d’appréhension ? Surtout que le match aller avait été difficile pour vous (défaite 1-6 à domicile)…Forcément, il y en a un peu. On va jouer contre trois des meilleurs joueurs au monde quand même ! Après, il ne faut pas se mettre plus de pression que ça et jouer notre match comme on sait le faire et on verra bien à la fin… On sait qu’on est capable de réaliser de bonnes choses. C’est à nous de tout faire pour les mettre en place.
Au moment de jouer chez des cadors comme le Barça ou le Real, l’entraîneur est-il tenté de mettre en place quelque chose de différent ? D’essayer un nouveau système, un changement tactique particulier pour essayer de contrer ces équipes-là ?Honnêtement, en Espagne, je n’ai pas constaté ça. Il n’y a pas de changement tactique de la part des équipes au moment d’affronter des grosses écuries comme le Real ou le Barça. Chaque équipe joue son jeu selon ses qualités. J’ai l’impression que ce n’est pas trop dans la culture. Ici, chacun joue avec ses armes même face à ces équipes.
Il y a trois semaines, vous avez livré un match plein à domicile contre le Barça (1-1)… Justement, contre le Barça, on a joué notre jeu et on a réussi notre match. On a fait un pressing comme on le souhaitait assez haut et on a pu faire un match complet. Il faut essayer de reproduire ce genre de prestations. Barcelone, ils n’ont pas eu beaucoup d’occasions pendant le match contre nous, mais ils marquent à la fin… C’est là-dessus qu’on voit que ce sont de très grands joueurs dans ce type d’équipe, car même en étant moins bien, ils arrivent à s’en sortir.
Avec le Betis, vous êtes sur une série plutôt paradoxale. Les prestations sont plutôt encourageantes, mais les points vous échappent…On fait de bons matchs, comme contre le Barça, Valence (0-0 le 11 février) ou la première mi-temps du derby contre Séville (défaite 1-2 le 25 janvier). Mais c’est vrai qu’en matière de points, on n’arrive pas à enchaîner. Même ce mercredi contre La Corogne, on se fait égaliser à la dernière minute sur penalty (1-1). Il nous manque ces temps-ci un petit quelque chose, un soupçon de réussite pour être mieux au classement.
Votre profil de défenseur-relanceur a donc trouvé son bonheur dans cette équipe du Betis et plus généralement en Liga.Mon choix de venir en Espagne était aussi lié à cette culture du jeu avec le ballon. Et je ne suis pas déçu, on essaye de repartir proprement de derrière, on joue au ballon. Et c’est vraiment ce qui me plaît. Séville et le Betis, ça me convient parfaitement. C’est vraiment ce que j’étais venu chercher ici, c’était un choix très réfléchi et j’en suis pleinement satisfait.
Vous avez eu un bac ES il n’y a pas si longtemps. En arrivant cet été, il y avait encore quelques restes des cours d’espagnol ?Ah oui ! J’avais des restes et ça m’a bien aidé.
En arrivant ici, j’arrivais à me faire comprendre, sans être flamboyant non plus, mais l’essentiel était en place et ça m’a bien aidé. Quand je vois les anglophones qui viennent en Espagne et qui galèrent un peu avec la langue, je me dis que je suis plutôt pas mal. Bon après, ici en Andalousie, ils parlent vite et n’articulent pas trop, mais ça va, je m’y fais !
Quand on est jeune, à la fois jeune footballeur en centre de formation et en même temps un étudiant qui prépare son bac, imagine-t-on que les cours d’anglais ou d’espagnol du lycée pourront un jour servir dans le foot ?Pour dire la vérité, je n’en avais pas vraiment conscience à l’époque. Donc pour être franc, je ne portais pas une attention particulière aux langues, c’était un cours comme les autres. Heureusement, j’ai eu de bons profs d’espagnol, ce qui m’a permis de me débrouiller en arrivant ici ! En revanche, en anglais, j’avais plus de difficultés et je me suis vite rendu compte qu’on a besoin de l’anglais dès qu’on voyage un peu. J’ai même pris des cours pendant deux ans après ma scolarité pour améliorer mon niveau d’anglais, car j’ai conscience que maîtriser les langues étrangères, c’est vraiment quelque chose d’important dans la vie.
Vous avez vécu une année 2016 plutôt riche sur le plan personnel : un mariage, un enfant, un premier transfert. Et en janvier de cette année, vous avez reçu le brassard de la sélection algérienne avant la CAN… Pas mal quand on a vingt-cinq ans.On m’a toujours dit que j’étais assez mature. C’est vrai que cette année 2016 a été riche en événements pour moi : mon mariage, la naissance de ma fille en fin d’année, un changement de club et de pays… J’ai quitté Reims et ma famille pour la première fois. Cela fait beaucoup en peu de temps, mais je vis tout ça très positivement. Le capitanat avec ma sélection était quelque chose de nouveau aussi, le coach ne m’en avait pas parlé avant, mais à partir du moment où il m’en a parlé, j’étais prêt à assumer ce rôle, comme précédemment avec mon club de Reims.
La CAN a été un moment difficile pour un baptême du feu comme capitaine…C’est exact, l’échec au premier tour de la CAN a été un coup dur pour tout le monde. Mais ça a été une fierté de porter ce brassard. Pour la qualification pour le Mondial 2018, on est également mal partis, mais je sais qu’on ne va rien lâcher. Cela peut paraître facile de dire ça et il y a une expression parfois galvaudée, mais qui je pense nous correspond bien en sélection : « On est comme des frères » . C’est pourtant vraiment ce que l’on ressent. On a un groupe de talent avec la sélection algérienne, assez jeune, mais qui arrive à maturité et on va apprendre de nos erreurs pour faire honneur à nos couleurs.
En attendant, que peut-on vous souhaiter pour le match de dimanche face au Real et d’ici à la fin de saison avec le Betis ?Gagner au Bernabéu, ce serait pas mal ! En tout cas une bonne performance là-bas permettrait surtout de valoriser notre travail et notre qualité de jeu. Et surtout, ça nous permettrait de ne plus regarder derrière au classement et de nous projeter vers une fin de saison plus positive en cherchant à aller le plus haut possible.
Propos recueillis par Benjamin Laguerre