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Ahmed Kollab : « C’est presque un miracle de sortir de Gaza »

Propos recueillis par Amaury Gonçalves
5 minutes

À 22 ans, Ahmed Kollab aimerait ne penser qu’au football. Mais il est né dans la bande de Gaza et depuis autant d’années, il doit vivre sur ce ruban de terre où la guerre n’a jamais sommeil. Depuis les attentats du 7 octobre perpétrés par le Hamas et la réponse israélienne qui a suivi, le football gazaoui a été enterré sous les bombes. International palestinien (16 sélections) et joueur de l’Ittihad Khan Younes, il accorde à So Foot un entretien exclusif marqué par les coupures de connexion internet et le besoin régulier de contenir ses émotions lorsqu’il évoque ses souvenirs d’une terre qu’il a aujourd’hui quittée.

Ahmed Kollab : «<span style="font-size:50%">&nbsp;</span>C’est presque un miracle de sortir de Gaza<span style="font-size:50%">&nbsp;</span>»

Comment était la vie pour un footballeur de Gaza avant le 7 octobre 2023 ?

On vivait plutôt bien de notre passion avant tout ça, même si ça n’avait rien de comparable avec les footballeurs du reste du monde. Le siège de Gaza et l’occupation israélienne ont toujours mis des obstacles, surtout administratifs, sur notre route de joueurs de football. Notre salaire demeurait très modeste, mais suffisant pour une personne vivant à Gaza avec sa famille. Ce qui était beau avec le football, c’est qu’il représentait une échappatoire pour tous les joueurs et les supporters de Gaza.

Y avait-il une grande ferveur populaire autour du championnat local ?

À Gaza, tout le monde était très enthousiaste dès qu’un match de football avait lieu. C’était presque une obsession tant les Gazaouis aiment ce sport. À chaque match, on avait des tribunes pleines à craquer. C’était surtout le cas à Rafah et Khan Younes où l’on trouvait les trois plus grands clubs de la région.

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Les joueurs de Gaza et de Cisjordanie pouvaient-ils se rencontrer ?

Oui, c’était possible et ça créait de véritables moments d’union du peuple palestinien. Mais on ne pouvait être réunis que pour des matchs se jouant en dehors de la Palestine, pour des rencontres internationales avec la sélection. Ce sont les plus beaux souvenirs que j’ai en tant que joueur.

Le stade Yarmouk était de loin l’une des meilleures infrastructures sportives de la région. L’occupant israélien l’a complètement détruit à coups de missiles, puis l’a rasé avec des bulldozers pour le transformer en prison à ciel ouvert.

Ahmed Kollab

Au mois de février se jouait la Coupe d’Asie, où la Palestine a réalisé un beau parcours. Était-ce possible de suivre la compétition depuis Gaza ?

J’étais moi-même censé participer à la compétition avec la sélection nationale, mais les difficultés de déplacement puis la guerre m’ont empêché de faire partie de l’aventure. Depuis Gaza, c’était tout simplement impossible de suivre la Coupe d’Asie. On n’avait plus ni électricité ni internet, ce qui nous a littéralement coupés du monde.

Depuis le 7 octobre, qu’est devenu le football à Gaza ?

C’est tout simplement devenu impossible de jouer au football. Il n’y a plus aucun endroit pour le faire, tous les bâtiments sportifs et les stades ont été détruits. Le stade Yarmouk, par exemple, était de loin l’une des meilleures infrastructures sportives de la région. L’occupant israélien l’a complètement détruit à coups de missiles, puis l’a rasé avec des bulldozers pour le transformer en prison à ciel ouvert. La vie des joueurs de football est devenue la même que pour les autres Gazaouis. On se bat pour survivre, pour trouver de la nourriture, de l’eau et de quoi vivre.

As-tu toi-même perdu des proches ?

Beaucoup de joueurs, arbitres et entraîneurs que je connaissais sont morts lors de bombardements. C’est le cas d’Hani Al-Masdar, qui m’avait entraîné avec la sélection olympique. J’ai aussi perdu des amis de toujours, à qui je pense tous les jours.

En avril, tu annonçais la destruction de ta maison sous les bombardements israéliens. Quelques jours plus tard, tu quittais la bande de Gaza…

Oui, j’ai quitté la bande de Gaza il y a tout juste quelques semaines. C’était beaucoup trop dangereux de rester, je pense que les images parlent d’elles-mêmes. À Gaza, tout le monde est confronté à la mort au quotidien, des plus jeunes enfants aux personnes les plus âgées. Personne n’est épargné.

Des enfants palestiniens jouent au football à Beit-Hanoun, dans le nord de la bande de Gaza en avril 2023.
Des enfants palestiniens jouent au football à Beit-Hanoun, dans le nord de la bande de Gaza en avril 2023.

Comment as-tu fait ?

C’est presque un miracle de sortir de la bande de Gaza. Beaucoup tentent de le faire sans y parvenir, car tous les postes-frontières sont fermés. J’ai dû payer 5 000 dollars que j’ai empruntés à différentes personnes. J’ai dû abandonner ma famille, car avec cette somme, une seule personne peut passer la frontière avec l’Égypte par le biais de tunnels.

S’il le faut, on reconstruira tout à partir de rien, même si cela demande beaucoup de temps et d’efforts. Notre terre est immortelle et pure, elle restera toujours ce qu’elle est.

Ahmed Kollab

As-tu encore des contacts avec l’intérieur de la bande de Gaza ?

Ma famille et mes amis n’ont plus internet, mais j’arrive à communiquer avec eux une fois toutes les deux semaines. C’est horrible, vraiment horrible. Mon Dieu, on vit dans une situation si difficile, vous ne pouvez pas l’imaginer. Je dois réussir dans ma carrière, et je vais le faire pour mes proches, pour les aider à sortir de Gaza. Pour les aider à vivre une vie meilleure, si Dieu le veut.

Comptes-tu y revenir un jour ?

Bien sûr, j’ai l’intention de retourner dans la bande de Gaza. C’est notre terre et elle le restera. S’il le faut, on reconstruira tout à partir de rien, même si cela demande beaucoup de temps et d’efforts. Notre terre est immortelle et pure, elle restera toujours ce qu’elle est.

Dans quelques semaines, la France accueillera les Jeux olympiques. La sélection israélienne de football y est qualifiée. Selon toi, faut-il laisser les athlètes israéliens y participer ?

L’occupation israélienne doit être punie pour ses crimes et massacres à l’égard du peuple palestinien. Pour moi, la réponse est claire : il faut bannir Israël de toutes les activités sportives et sociales tant que la Palestine n’est pas libre.

Dans cet article :
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Propos recueillis par Amaury Gonçalves

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