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Affaire Hamraoui : un mystère et des questions
C’est l’histoire d’une agression qui n’en finit pas de faire du bruit, et dont l’écho ne se limite pas à la simple rubrique des faits divers. Le 4 novembre dernier, la milieu de terrain parisienne Kheira Hamraoui était rouée de coups par un agresseur. Placée en garde à vue quelques jours plus tard, sa coéquipière Aminata Diallo a finalement été relâchée, sans charge retenue contre elle, mais avec une réputation inévitablement salie. Et puis, il y a le PSG qui, dans un climat loin d’être idéal, a dû préparer l’un des rendez-vous majeurs de sa saison, ce dimanche à Lyon (21h). On fait le point sur une affaire qui soulève encore de nombreuses interrogations.
Reprenons les faits depuis le début. Jeudi 4 novembre au soir, à l’issue d’un dîner en compagnie de leurs coéquipières du PSG dans un restaurant situé au cœur du bois de Boulogne, Aminata Diallo, Kheira Hamraoui et Sakina Karchaoui montent dans la voiture de la première citée pour regagner les Yvelines, comme cela a été relaté par L’Équipe. Vers 22h30, peu de temps après avoir déposé l’ancienne Montpelliéraine devant son domicile, les deux joueuses encore présentes dans le véhicule voient apparaître deux individus cagoulés. Pendant que l’un d’eux immobilise Diallo (qui est au volant), l’autre extrait Hamraoui de l’habitacle et la frappe durant quelques minutes, la rouant « de coups sur les jambes avec une barre de fer », précisera la procureure de Versailles. Les deux agresseurs prennent ensuite la fuite. La milieu parisienne, elle, est conduite à l’hôpital de Poissy.
Qui se cache derrière l’agression d’Hamraoui ?
Dans un premier temps, personne n’a vent de cette violente attaque. Seuls certains observateurs avisés s’étonnent de ne pas voir l’ex-Barcelonaise sur la feuille de match de PSG-Real Madrid (4-0), mardi. C’est le lendemain que cette affaire éclate au grand jour. À en croire les informations de L’Équipe, Aminata Diallo vient alors d’être mise en garde à vue. La joueuse de 26 ans est soupçonnée d’être impliquée dans l’agression de sa partenaire, qui joue au même poste qu’elle en club comme en sélection. Cette piste d’une rivalité sportive entre deux coéquipières est donc sérieusement étudiée par les enquêteurs, mais la native de Grenoble, qui refuse d’être assistée d’un avocat, est finalement relâchée jeudi soir, sans qu’aucune charge ne soit retenue contre elle.
L’AFP précise en outre qu’un ami des deux joueuses a lui aussi été interrogé dans le cadre de cette enquête. Âgé de 34 ans et placé en détention provisoire à Lyon-Corbas pour des faits d’extorsion et de séquestration, l’individu « avait eu des contacts téléphoniques avec elles dans le passé, mais sans aucun rapport avec cette affaire », a assuré à l’AFP son avocat, Me Frédéric Lalliard. Mais qui se cache donc derrière cette agression ? Selon RMC Sport, celle-ci pourrait être liée à une affaire d’ordre privé. « Alors comme ça, on couche avec les hommes mariés ? », auraient lancé les deux malfrats avant de s’en prendre à leur victime. D’après L’Équipe, ces propos auraient mis la puce à l’oreille des enquêteurs. Ils pourraient être ainsi liés à de mystérieux coups de fil anonymes passés quelques jours auparavant à quatre Parisiennes – Diallo, Karchaoui, Grace Geyoro et Marie-Antoinette Katoto – par un homme qui prétendait avoir eu une relation avec Hamraoui lorsque celle-ci portait le maillot du Barça. Le grand flou.
Diallo, victime d’un acharnement médiatique ?
Devant les enquêteurs, Aminata Diallo s’est employée à clamer son innocence, se justifiant sur sa vitesse de conduite juste avant l’agression – la victime aurait signalé qu’elle roulait lentement – et rejetant l’hypothèse d’une concurrence trop accrue dans son secteur de jeu. « Aminata, c’est une fille qui fonctionne au mérite, confie Nicolas Bach, entraîneur de l’intéressée à Claix de 2011 à 2013. Si, à un moment donné, elle doit être appelée en équipe de France, c’est parce qu’elle le mérite et pas autrement. » Des sources relayées par Le Parisien insistent par ailleurs sur le fait que les deux internationales françaises sont amies dans la vie et sont déjà parties en vacances ensemble.
Agression de Kheira Hamraoui: selon l’avocat d’Aminata Diallo, sa cliente est « fragilisée psychologiquement » après sa garde à vue pic.twitter.com/Pg0m17sk5p
— BFM Paris (@BFMParis) November 13, 2021
La milieu du PSG a pu quitter le commissariat de Versailles après 35 heures de garde à vue. Libre, certes. Mais son image, elle, a inéluctablement été écornée. « Aminata Diallo regrette l’emballement médiatique qui l’a d’ores et déjà condamnée, sans fondement, et elle rappelle qu’elle n’hésitera pas à défendre ses droits en justice si nécessaire contre toute diffamation », a affirmé Me Mourad Battikh, l’avocat de la Bleue, dans un courrier transmis à l’AFP vendredi. « Elle est fragilisée psychologiquement, et très affectée que son nom ait été jeté en pâture dans les médias nationaux et internationaux », a-t-il poursuivi le lendemain, sur le plateau de BFM TV. Nicolas Bach dénonce lui aussi une forme d’acharnement médiatique à l’encontre de son ancienne protégée : « Les médias ont déconné complet, ce n’est pas possible de parler d’une fille comme ça, sans la connaître, et de lui coller une étiquette qui n’est pas du tout représentative de ce qu’elle est et de la manière dont elle s’est battue toute sa vie. »
Et le PSG, dans tout ça ?
Il paraît aussi évident que cette affaire n’est pas sans conséquences pour le PSG. Au milieu de la tempête, le champion de France a tenté de garder le cap, se limitant à deux communiqués pour soutenir ses joueuses et réitérer « sa confiance dans la justice ». Mais le club de la capitale est forcément ébranlé par les événements des derniers jours, qui n’ont pas permis à Didier Ollé-Nicole et à ses troupes de préparer l’importantissime déplacement à Lyon, dimanche soir, dans des conditions optimales. Les dirigeants parisiens auraient d’ailleurs demandé à ce que ce choc soit reporté à une date ultérieure. Une requête rejetée par la FFF. Mises au repos, Kheira Hamraoui et Aminata Diallo n’ont pas repris l’entraînement avec l’effectif vendredi. Chamboulé et certainement affaibli, Paris jouera très gros au Groupama Stadium. On peut même aller jusqu’à penser que l’affaire en cours risque de perturber sa saison pendant encore un certain temps.
Par Raphaël Brosse, avec Antoine Donnarieix
Propos de Nicolas Bach recueillis par AD.