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Aduriz, toujours plus près de Benjamin Button
Longtemps décrié et même viré de l'Athletic Bilbao, Aduriz en est aujourd'hui son porte-étendard. Un statut qu'il doit à sa ribambelle de buts et son amour intact du jeu, mais également à un physique qui n'a jamais semblé aussi juvénile.
Les supporters des Leones se frottent les yeux. Ils se pincent. Ou lavent leurs lunettes. Rien n’y fait, la donne ne varie pas d’un iota : depuis le début de saison, Aritz Aduriz est, devant Cristiano Ronaldo, Luis Suárez et Neymar, le meilleur buteur d’Espagne grâce à ses 14 banderilles. Une folie que ce vieux briscard aux 34 printemps raconte le plus simplement du monde : « Si je me sens bien physiquement, je vais m’améliorer dans tous les aspects chaque jour. Tout dépend de mon physique. » L’anatomie du natif de San Sebastián n’explique pas intégralement sa forme resplendissante. Car, longtemps en difficulté dans un Athletic Bilbao qu’il a quitté à deux reprises, il a dû s’exiler avant de revenir à l’été 2012. Désormais à une petite unité de la centaine de pions sous la liquette des Rojiblanco, il avoue n’avoir « jamais imaginé atteindre cette barre » : « Je me sens très fier d’avoir porté ce maillot tant de fois, d’avoir inscrit tant de buts et, surtout, de l’avoir fait devant ce public merveilleux. » Une aficion qui, aujourd’hui, se demande si Aduriz n’est pas le nouveau Benjamin Button.
Aduriz : « Le sens du but, cela s’apprend »
Actuellement idyllique, l’histoire qui lie Aritz Aduriz et Athletic Bilbao regorge pourtant de nombreux soubresauts. Des hauts, et beaucoup de bas, qui ont construit sa carrière. Car après des débuts chez l’anonyme Aurrera de Vitória, il rejoint la réserve des Leones au début du millénaire. Après trois années avec la filiale, il effectue ses débuts avec l’équipe première en 2002. Un one-shot, puisqu’après trois apparitions, il n’est pas conservé à la fin de saison. Trois ans plus tard, et des passages réussis à Burgos puis Valladolid, rebelote : l’Athletic le rachète avant de le laisser filer, en 2008, à Majorque. Ce, malgré un nouveau statut d’international espagnol. « J’étais forcément déçu, raconte-t-il dans une interview fleuve au Pais. Mais j’ai essayé de voir le positif de ces circonstances et de ne pas me plaindre tout le temps. J’étais enthousiaste face à d’autres défis, pour m’imposer dans d’autres lieux. Tout cela m’a aidé à réaliser mon rêve : être ici. » Son troisième come-back, le bon, il le doit à son passage remarqué aux Baléares, puis à Mestalla.
Surtout, durant ces quatre années d’exil, Aritz Aduriz se découvre un profil de buteur. « Parfois, l’on dit que le sens du but est inné. Je crois que cela peut se discuter. Dans le football comme dans la vie, tu apprends continuellement. C’est un apprentissage perpétuel » , expose-t-il. En chiffres, ses statistiques n’ont cessé de monter crescendo. Elles ont même explosé en 2012 lors de son retour à San Mamés : après deux premiers exercices facturés à 18 pions, il explose la saison passée avec pas moins de 26 banderilles. Après un peu plus de trois mois de compétition, il en affiche aujourd’hui 14. Une explosion sur le tard dont l’explication ramène à son enfance : « Chez moi, on n’était pas trop football. J’ai vécu d’autres passions que je partage toujours. Mes parents adorent la montagne, on faisait tout le temps des randonnées, du ski. Ils sont très aventureux et ne voulaient pas m’enfermer jeune dans un seul domaine. Pour aimer le football comme je l’aime aujourd’hui, j’ai dû expérimenter d’autres choses. » Des chemins de traverse, donc, qui ne l’empêchent pas aujourd’hui d’attirer l’attention du staff de Vicente del Bosque.
La meilleure tête d’Europe ?
Infatigable travailleur, Aduriz se démarque par un jeu de tête incroyable. Certains observateurs du championnat espagnol n’hésitent même pas à lui offrir le statut officieux de meilleur joueur aérien d’Europe en compagnie du Colchonero Godín. Avec son mètre quatre-vingt-deux, il fait ainsi la nique à légion de centraux de Liga en restant en l’air durant de nombreuses secondes. « Je pense que la gravité agit pareil sur tout le monde. Tu montes et tu descends pour la même raison, feint-il d’expliquer en enfilant son costume de professeur de physique. Je suppose que si je suis si bon, c’est grâce à la pratique. Je n’ai jamais été un attaquant très grand, je suis plutôt normal, et les défenseurs sont généralement plus grands. Du coup, je dois beaucoup sauter pour tenter de les battre. » Une recette toute personnelle, accompagnée d’une technique pas dégueu, qui lui permet ainsi, à 34 ans, d’être dans la pleine forme de l’âge. Son contrat prenant fin en 2017, certains aficionados basques espèrent le voir prolonger pour finir à 40 ans. « Tant que j’ai l’envie de m’entraîner, je jouerai » , lâche-t-il en guise de seule promesse.
Par Robin Delorme, en Espagne