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Adieu « Domi »
Ce matin, le football français a perdu un de ses meilleurs soldats. Car en plus d'être un excellent gardien de buts à la vitrine de trophées bien garnie, Dominique Dropsy était de l'avis de tous un mec bien. Hommage à celui qui, à 63 ans, a connu sa pire défaite. 63 ans, merde.
En mai dernier, Dominique Dropsy n’était pas présent sur la scène dressée place de la République par les Ultramarines, sur laquelle quelques anciennes gloires des Girondins, telles qu’Alain Giresse, Lilian Laslandes, Marius Trésor, Bixente Lizarazu et bien d’autres, s’étaient massées pour rendre un dernier hommage au Parc Lescure. Mais parmi la foule de supporters présents ce jour-là, chacun avaient eu une pensée pour l’ancien gardien bordelais, dont l’absence inquiétait. Et très vite, ce sont des « Domi ! Domi ! » qui résonnèrent dans le centre ville de la capitale girondine. Mais ces cris, les globules blancs, qui s’étaient remis à envahir le corps du gardien international, ne les ont pas entendus. Et ont continué à proliférer anormalement jusqu’à ce matin, pour finalement venir à bout de « Domi » . Trop vite, trop tôt. À seulement 63 ans, Dominique Dropsy a effectué son dernier envol.
« Un bon mec »
Atteint d’une leucémie détectée en mars 2011, Dominique Dropsy affirmait être guéri en septembre de la même année, suite à une greffe de moelle osseuse. Mais l’homme se savait en sursis, et se donnait cinq ans pour se considérer totalement hors de danger. Un délai que ces foutus globules blancs n’ont pas respecté, refaisant leur apparition en mai 2015. Aujourd’hui, c’est toute la France du football qui pleure la disparition de celui qui faisait l’unanimité par sa bonne humeur, sa joie de vivre, et ses qualités humaines. Tous les gens qui l’ont côtoyé se souviendront de Dominique Dropsy comme d’un « bon mec » . Probablement le plus bel épitaphe qu’un homme puisse espérer. Aux Girondins de Bordeaux, l’institution qu’il avait rejointe en 1984, personne ne parvient à retenir ses larmes, depuis ce matin. Marius Trésor se remémore ces réveillons passés en compagnie de « Domi » et Suzon, sa compagne. Gaëtan Huard, de son côté, gardera à jamais gravé dans sa mémoire les vannes racontées par son entraîneur spécifique, lors des longs trajets à pied effectués dans l’interminable couloir qui menait des vestiaires à la pelouse de Lescure. « C’était toujours les mêmes, on les connaissait par cœur, mais elles nous permettaient d’entrer sur le terrain relâchés » , explique aujourd’hui « Guéguette » , la gorge nouée. « C’était vraiment une bonne personne. 63 ans, putain… »
Du titre strasbourgeois à l’orgie de trophées avec les Girondins
Avant de finir sa course dans le Sud-Ouest, c’est en Picardie que Dominique Dropsy a poussé ses premiers cris, avant d’y enfiler ses premiers gants. En août 1972, c’est dans les buts de Valenciennes qu’il effectue ses débuts en Division 1. 595 autres suivront. Après deux saisons passées dans le Hainaut, c’est à Strasbourg que « Domi » part accomplir le plus gros de sa carrière. Au pays des cigognes, le portier dispute 473 rencontres, avec en point d’orgue cette saison 78-79, lors de laquelle le Racing remporte son seul titre de champion de France. Ses performances, aux côtés de Gemmrich, Tanter, Domenech ou Specht, lui permettent de se faire une place chez les Bleus, au sein desquels il empile dix-sept sélections, entre 1978 et 1981, dont une lors du Mondial 1978. Victime des performances moyennes de son club, il voit Jean-Luc Ettori s’installer dans le but bleu, et n’est même pas du voyage espagnol de 1982. Ce qui n’empêche pas le grand Bordeaux de Claude Bez de l’attirer en 1984. Avec ces Girondins bâtis pour s’empiffrer de titres, Dominique Dropsy est de toutes les épopées, de la demi-finale de Coupe d’Europe des clubs champions perdue face à la Juve dès sa première saison au doublé coupe-championnat de 1987, en passant le tire de champion de France en 1985 et une autre Coupe de France glanée en 1986. En 1990, il met un terme à sa carrière avec un seul regret : celui de ne pas avoir passé la barre des 600 matchs en D1, le compteur bloqué à 596. Un record qui ne sera battu que par Jean-Luc Ettori, puis Mickaël Landreau.
Pionnier, entraîneur et confident
Dès sa retraite sportive annoncée, Dominique Dropsy convainc les Girondins de le garder en tant qu’entraîneur des gardiens. Un poste pas si courant, à l’époque. Il fait même figure de pionnier, devenant un des premiers gardiens de haut niveau à occuper la fonction. Jusqu’en 2011, et la découverte de sa maladie, il s’occupe de Joseph-Antoine Bell, Gaëtan Huard, Gilbert Bodart, Stanley Menzo, Ulrich Ramé, Cédric Carrasso et leur remplaçants. Autant de gardiens avec qui il noue des relations fortes, guidé par sa devise : « Dans la confrérie des gardiens, on n’est pas beaucoup, mais on est nombreux. » Sa façon à lui de dire qu’à ce poste très particulier, où l’erreur technique est plus interdite que pour un joueur de champ, le mental et le bien-être en dehors du terrain comptent plus que tout pour être performants. Ainsi, en plus de s’attacher à travailler les prises de balle de ses ouailles, l’homme passe du temps à s’enquérir de la vie privée de ses gardiens, se faisant leur confident. Avec la réussite que l’on connaît. Depuis ce que tout le monde espérait être une rémission totale en 2011, Dominique Dropsy venait autant qu’il le pouvait au Haillan, faisant pleurer Cédric Carrasso, lors de sa première visite post-opératoire. Face à Montpellier, lors du prochain match à domicile des Bordelais, des « Domi !, Domi ! » résonneront de longues minutes dans les tribunes de ce Nouveau Stade, qui aurait pu porter le nom d’un bon mec.
Par Mathias Edwards, triste