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Adel Taarabt et Benfica se sont enfin trouvés
Arrivé au Benfica Lisbonne à l'été 2015, Adel Taarabt a dû attendre près de quatre ans avant de porter pour la première fois la tunique du SLB. La faute à un surpoids et des déclarations mal placées. Des bisbilles qui sont désormais oubliées, puisque l'international marocain est titulaire depuis le début de saison. Et il compte bien profiter du match de C1 face à Lyon pour confirmer son retour en grâce et pourquoi pas inscrire son premier but avec Benfica.
Les mentalistes du monde entier vous le diront : lorsqu’une personne baisse la tête et réduit la puissance de sa voix, c’est qu’elle est en train de mentir. Et le langage corporel de Luis Felipe Vieira n’échappe pas à la règle. Invité sur le plateau de la TVI en septembre 2016, le président du Benfica Lisbonne évoque le cas Adel Taarabt : « C’est de ma faute et de celle de Rui Costa. Il ne portera plus jamais le maillot du Benfica, c’est une certitude. » Raté. Trois ans après cette déclaration, Adel Taarabt est l’un des meilleurs joueurs du Benfica Lisbonne et compte bien le prouver face à Lyon en Ligue des champions. Quelques mois après avoir prolongé son bail au SLB jusqu’en 2022. Une prolongation immortalisée avec une jolie photo aux côtés de Luis Felipe Vieira qui a visiblement caché sa rancœur derrière sa moustache.
Les huit kilos de la discorde
Pour comprendre pourquoi Luis Felipe Vieira s’est montré si véhément envers Adel Taarabt, il faut remonter à l’été 2015. En délicatesse chez les Queens Park Rangers, où le courant n’est jamais passé avec Harry Redknapp, l’international marocain s’engage avec le Benfica Lisbonne pour se relancer après une saison quasi blanche. Sauf que le joueur formé à Lens débarque au Portugal avec près de huit kilos en trop. Un surpoids qui n’est pas vraiment du goût du nouvel entraîneur Rui Vitória, qui met alors Adel Taarabt de côté. Une mise à l’écart qui va durer 18 mois durant lesquels le Franco-Marocain dispute quelques rencontres avec l’équipe B, s’offre quelques virées nocturnes dans les bars de Lisbonne et demande des explications à sa direction comme il l’expliquera à France Football à l’été 2016 : « Ne pas jouer, ça m’a rendu fou. Être à l’écart comme ça, ça m’a fait péter les plombs. Le président lui (Rui Vitória, N.D.L.R.) est rentré un peu dedans en expliquant que j’étais le troisième salaire du club. Du coup le coach est parti au clash. Il a dit que c’était son équipe, qu’il ne me voulait pas, et que c’était donc soit lui, soit moi. Benfica, aujourd’hui, ça les fait chier de payer un salaire comme le mien. » Des propos qui donneront lieu à la célèbre sortie médiatique de Luis Felipe Vieira, qui aura une nouvelle fois parlé un peu trop vite.
Boycotté par le Benfica Lisbonne, indésirable chez les grands clubs européens, Adel Taarabt est alors un homme perdu qui traîne son spleen en repensant à ses belles années. Celles qui l’ont vu quitter Lens à 17 ans pour s’engager avec Tottenham avant de régaler les supporters des Queens Park Rangers et les jeunes du club. « Raheem Sterling m’a envoyé un message il y a quelques mois. J’étais en train d’écouter une interview où il disait que j’étais son idole au club » , a récemment avoué Taarabt à FourFourTwo. Le natif de Taza est alors demandé par le PSG et rêve même du Real Madrid : « Je n’aime pas dire cela de moi, mais je pense que si vous parlez à ceux qui m’ont vu jouer lorsque j’étais un jeune talent, beaucoup auraient dit que j’évoluerais au Real ou au Barça un jour. Même Luka Modrić m’avait dit cela une fois. » Ce sera finalement Fulham – où il côtoie son futur adversaire du soir Moussa Dembélé – et l’AC Milan.
668 jours à la cave
Encore bien décidé à ne pas voir Adel Taarabt porter le maillot du Benfica Lisbonne, Luis Felipe Vieira cède alors son technicien en prêt au Genoa pendant 18 mois. En Italie, Taarabt ne régale pas forcément, mais a le mérite de fouler à nouveau un rectangle vert. Et ainsi mettre fin à 668 jours sans disputer le moindre match officiel. De retour à Lisbonne à l’été 2018, il retrouve alors Rui Vitória qui n’a toujours pas changé d’avis sur lui et le laisse à nouveau à disposition de la réserve. Celui qui a retrouvé récemment la sélection marocaine – où il en a profité pour glisser un violent dribble à Pierre-Emerick Aubameyang – ne dit rien et bosse dans son coin avec l’équipe B d’un certain Bruno Lage. Jusqu’au 3 janvier dernier et le licenciement de Rui Vitória et son remplacement par… Bruno Lage. La fin du tunnel pour Adel Taarabt qui connaît alors ses 20 premières minutes officielles avec le SLB lors d’une victoire face à Tondela le 30 mars 2019 (1-0), soit près de quatre ans après son arrivée dans la capitale portugaise.
Une prouesse qui est due à ses bonnes performances à l’étage inférieur et à l’envie de ses coéquipiers de le voir jouer, à écouter Bruno Lage dans les colonnes de Record au lendemain du titre de Liga Nos : « Adel est champion, car le groupe lui a donné une seconde chance. Ce n’est pas l’entraîneur. J’ai juste compris que le groupe voulait lui donner une seconde opportunité. » Et Luis Felipe Vieira a alors rangé sa fierté : « Comment ai-je changé d’avis ? La qualité du joueur et de l’entraîneur. Il a prouvé qu’il pouvait être digne de nous, il s’est amélioré et Lage l’a vu. » Les supporters du SLB aussi. Il faut dire que dans ce début de saison moribond des Lisboètes, le joueur de 30 ans est l’un des rares à apporter un peu de bonheur, par ses dribbles et ses passes laser. Et son discours envers son club est donc tout autre qu’il y a quelques années : « Benfica a été la meilleure chose qui me soit arrivée dans ma carrière. Je pensais que j’avais toujours raison, mais ils m’ont fait comprendre que j’avais tort. Ils m’ont changé à tous les niveaux, dans mon style de vie, en tant que personne et en tant que joueur. Je n’ai jamais travaillé aussi dur de ma vie pour avoir la chance de jouer dans ce club. » Des mots qui devraient plaire à Luis Felipe Vieira.
Par Steven Oliveira