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Aberdeen, trente ans plus tard
Le Celtic, malgré un match de retard, a certes repris les devants, mais revoir Aberdeen tutoyer les sommets écossais, ça goûte autant la nostalgie que le soulagement. Parce que même si l'avenir s'annonce radieux pour les Dons, les trente dernières années du club ont été traversées comme un rollercoaster.
Flashback. 20 décembre 1983, Pittodrie Stadium. En cette nuit froide et venteuse, le père Noël est passé en avance pour les ouailles d’Alex Ferguson, pas encore fait Sir, mais déjà adoubé par l’Écosse du football. Le Aberdeen FC est sur le toit de l’Europe après avoir battu Hambourg en deux manches en finale de la Supercoupe d’Europe. Deux ans plus tard, Jim Leighton, Gordon Strachan ou Alex McLeish iront jusqu’à ravir la victoire finale en championnat, généralement réservée aux duettistes Celtic et Rangers. Ce sera d’ailleurs la dernière fois qu’un autre club que les rivaux glaswégiens montera sur la plus haute marche.
Flash forward. 21 mai 2000. Malgré une dernière victoire face à Dundee, Aberdeen ne peut éviter ce qu’on lui prédisait depuis une série de sept défaites en début de championnat : la dixième et dernière place de Scottish Premier League. Pour la première fois de leur histoire, les Dons font face à une relégation… qui finalement n’arrivera pas, le championnat s’élargissant à douze clubs, et le promu Falkirk se voyant refuser l’accès en première division écossaise faute de structures adaptées. Un sauvetage in extremis que les deux places en finale de League Cup et de Scottish Cup ne peuvent effacer des mémoires dans un club endetté jusqu’au cou à cause des travaux de son stade dans les années 90. D’autant que le club se voit éliminé dès les préliminaires de Coupe UEFA l’année suivante par le Bohemian FC. Comme un ultime affront, c’est la première fois qu’un club irlandais élimine un club écossais en compétition européenne…
Des Dandies dans un grand huit
Quinze ans plus tard, les Dandies n’ont pas retrouvé le lustre des années 80 – mais les heures noires semblent bien loin. Plus forcément habitués aux places européennes ces dernières années, Aberdeen se retrouve leader, une fois le soufflé Hamilton Academic retombé, dans un championnat d’Écosse où le Celtic n’a jamais semblé aussi accessible. Avant la dernière journée, Aberdeen était même premier, grâce à une série de huit victoires consécutives. Certes, on est loin des vingt-cinq du Celtic de la doublette Henrik Larsson-John Hartson en 2003-04, mais Aberdeen ne s’était pas imposé un tel rythme depuis… vingt-six ans.
On ne mentionnera pas le fait que la trêve hivernale est passée entre la septième et huitième victoire. Scott Brown, le gardien des Dons tient, lui, un record : huit clean sheets pour lui. Ceci étant, le coach Derek McInnes sait que la route est encore longue et refuse de parler de course au titre. Un homme que l’on écoute parler, puisque c’est lui qui a rapporté son premier titre depuis dix-neuf ans à Aberdeen, une League Cup glanée en mai dernier face à Inverness, tandis que le club finissait troisième de Scottish Premiership. En 2009, le technicien écossais avait déjà fait des merveilles en faisant monter le club de St Johnstone lors de sa première saison en tant qu’entraîneur principal, avant de partir s’enfoncer dans les méandres de Championship avec Bristol City.
Craig Brown, le Ricardo de McInnes
Pour autant, la mue du Aberdeen FC n’est pas à mettre uniquement sur le compte de McInnes, qui a en partie récolté les fruits qu’avait semés son prédécesseur Craig Brown, façon Ricardo pour Laurent Blanc aux Girondins. Un nom qui sonne doucereusement aux oreilles des fanboys de football écossais, puisque Brown n’est autre que celui qui a offert à l’Écosse ses dernières qualifications en compétition internationale (Euro 96 et Coupe du monde 98). Si son bilan comptable ne plaide pas en sa faveur (32% de victoires sur deux ans, confortablement installé dans le ventre mou du championnat), l’influence de l’ancien sélectionneur de la Tartan Army a été structurelle. Nommé à la tête du club quelques semaines après la plus grosse branlée infligée au club (9-0 face au Celtic le 6 novembre 2010), Brown élague direct : à l’été 2011, il dégage vingt-trois joueurs de son effectif. En 2012, « seulement » dix-neuf prennent la porte. Seuls Andy Considine, Peter Pawlett et Ryan Jack font office de vétérans du groupe parce qu’arrivés avant l’ère Brown. Côté arrivées, le coach fait revenir Russell Anderson, formé puis resté au club pendant onze ans, ainsi que Mark Reynolds pour recomposer une charnière centrale en friche.
Les deux bougres sont actuellement capitaine et vice-capitaine des Dandies. Surtout, Craig Brown signe Niall McGinn, laissé libre par le Celtic à l’été 2012. Depuis, l’ailier nord-irlandais a pris le jeu d’Aberdeen à son compte et fait même dans l’excès de confiance, se plaignant récemment dans la presse de ne pas marquer assez de buts pour l’équipe… Une tâche qu’il laisse pour le moment à l’Irlandais Adam Rooney, attaquant déniché par McInnes en League One et qui en est déjà à 28 buts pour 34 matchs au sein du club écossais. Les deux bougres ont d’ailleurs resigné jusqu’en 2017, le mois dernier. Rien ne semble donc perturber le calme qui flotte au-dessus du Pittodrie Stadium. Pas même le buzz entourant Niall McGinn, vu il y a quelques semaines du côté du Celtic Park pour assister à un match de son ancien club en compagnie d’Anthony Stokes. D’ailleurs, Derek McInnes avait décidé de ne pas sanctionner son joueur. Peut-être parce que le technicien écossais a obtenu ce qu’il avait promis lors de sa première conférence de presse : « Faire en sorte que la ville d’Aberdeen tombe à nouveau amoureuse de son club. »
Par Matthieu Rostac