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Abdoul Titi Kone : « Je veux que le monde entier sache que j’ai un talent »

Propos recueillis par Flavien Bories
Abdoul Titi Kone : «<span style="font-size:50%">&nbsp;</span>Je veux que le monde entier sache que j’ai un talent<span style="font-size:50%">&nbsp;</span>»

Beaucoup l’ont découvert dans l’émission L’Afrique a un incroyable talent. Multiple champion de Côte d’Ivoire de football freestyle, Abdoul Titi Kone ambitionne une carrière à la Sean Garnier, référence française et mondiale. Mais à dix-huit ans, l'ancien protégé de l'Académie Jean-Marc Guillou nourrit encore secrètement un rêve : devenir footballeur professionnel et porter la tunique des Éléphants.

Tu as récemment participé à Incroyable talent. Comment s’est finie l’émission ? Ça s’est très bien passé. Je suis arrivé jusqu’en demi-finales. Au départ, il y avait deux cents candidats. Seuls douze ont atteint la finale.

Qu’est-ce qu’il t’a manqué ?Plein de trucs. Pour dire la vérité, j’étais un peu stressé. Je n’ai pas eu assez de temps pour monter ma chorégraphie. À la base, elle devait être réalisée avec plusieurs danseurs. Finalement, je n’en ai eu qu’un pour m’accompagner. Ça m’a un peu pénalisé. Je n’ai pas pu être à la hauteur. En revoyant l’émission, j’ai quelques regrets.


Comment en es-tu venu à participer à cette émission ?Je suis à la maison et reçois un appel du groupe Périscope, les organisateurs de l’émission. Ils m’ont demandé de leur envoyer une vidéo de deux minutes. Ils l’ont montrée au patron qui m’a trouvé bon, mon profil l’intéressait, je pouvais donc participer à l’émission qui se déroulait à Abidjan. Je suis trois fois champion de Côte d’Ivoire, mais ça ne me suffit pas. Je voulais que d’autres gens me voient et reconnaissent mon talent. Je veux que le monde entier sache que j’ai moi aussi un talent ! Je veux mieux représenter la Côte d’Ivoire et avoir d’autres expériences. J’ai appris plein de choses durant cette émission. Il y avait deux comédiennes (Angélique Kidjo et Claudia Tagbo) et puis Fally Ipupa. Il m’a encouragé, m’a donné beaucoup de conseils. Il m’a dit de travailler encore plus pour obtenir un contrat.

Le jury de l’émission n’est pas composé de spécialistes de football freestyle.Le jury d’Incroyable talent ne connaît pas les gestes difficiles pour un freestyler, au contraire du jury du football freestyle qui a pratiqué. Il sait comment le freestyler doit synchroniser ses gestes et reconnaître une belle chorégraphie. Incroyable talent, c’est faire ressortir ce qu’on n’a jamais vu en deux minutes.

Ça doit quand même être plus facile d’impressionner un jury d’Incroyable talent. Oui, parce qu’il n’a jamais vu ce genre de trucs. Tu dois les impressionner, faire un peu de comédie. Tu dois lui couper le souffle, lui faire plaisir. En compétition de freestyle, tu es face à un adversaire sur trois minutes. On alterne trente secondes par trente secondes. Tu dois créer, avoir du style et improviser en même temps. Participer à Incroyable talent est plus difficile, et puis il faut que tes gestes soient calés avec la musique. Tu ne dois pas t’énerver et garder le sourire.


Tu es triple champion de Côte d’Ivoire en football freestyle, comment se déroulent les compétitions ?La plupart des participants ne s’entraînent qu’à la dernière minute, au moment où la compétition est annoncée. Moi, je m’entraîne toute l’année. Nous sommes seize candidats. Ils s’arrangent toujours pour que les meilleurs se croisent en finale. Dans les premiers matchs, on me met toujours face à de gens qui ne s’entraînent pas. Ce n’est qu’à partir de la demi-finale que le niveau s’élève.

Quelles différences avec les compétitions internationales ?Il y en a beaucoup. En Côte d’Ivoire, le jury est assez jeune, ou alors ce sont des coachs de centre de formation. On leur apprend en cinq minutes comment se passe une compétition de football freestyle. Mais ils ne connaissent pas les gestes de freestyle. Ils regardent avant tout les réactions de la foule. À l’occasion de petites compétitions, j’ai déjà été battu à cause de cela. Mais lors des compétitions internationales, ce sont des jurys professionnels. Ils ont pratiqué.

Pourquoi le foot freestyle et pas le football sur gazon ?Tout s’est fait en 2009. J’étais à l’école. Mon père m’a fait appeler. Un de mes amis était à la maison et expliquait que des Blancs cherchaient des gars qui font du freestyle. Je savais faire quelques gestes. J’y suis allé. On a fait des concours. J’ai battu quelques-uns de leurs jeunes et on a commencé à m’apprécier. Les Blancs m’ont laissé quelques CD pour que je m’améliore. Je m’y consacre, je m’y donne depuis ce jour.

Le freestyler peut devenir artiste, car il a de l’art en lui.

Ça n’a pas été difficile de convaincre tes parents de faire du foot freestyle ton métier ?Non. Mes parents étaient vraiment en joie lorsqu’ils voyaient que je remportais quelques prix. Ils ont bien vu que je ne me décourage jamais. Avant, quand je faisais du freestyle, les gens se moquaient, mais lorsque ça a commencé a évolué, lorsque j’ai commencé à passer à la télévision, ils ont vu que ça devenait sérieux et ont commencé à m’encourager aussi.

Malgré cette carrière de freestyler, tu nourris l’ambition de devenir footballeur professionnel, mais à dix-huit ans, tu n’as plus de temps à perdre.Je veux jouer au football. Ce sera très difficile, mais le courage et la volonté feront la différence, et puis il y a un joueur, Cyriac Gohi Bi Zoro, qui joue en Belgique. Il me suit. Il me donne beaucoup de conseils.

Tu as participé à l’Académie Jean-Marc Guillou en tant que footballeur.Je jouais dans un centre de formation dans ma commune. Je devais entrer en sixième. Mais à ce moment-là, mon coach m’a demandé de venir passer un test. Ils m’ont pris et quelques semaines plus tard, nous sommes allés au Mali à l’Académie Jean-Marc Guillou. Ils m’ont gardé, et puis on nous a emmenés faire un stage en Thaïlande.

Depuis que je suis passé à Incroyable talent, les gens m’appellent, me reconnaissent. Avant on faisait comme-ci je n’étais personne. Avant pour négocier ton contrat, tu donnais ton prix, c’était toujours trop. Maintenant, ils ne discutent plus.

Comment ce voyage s’est organisé.J’étais avec l’Académie Jean-Marc Guillou et nous quittions le Mali pour Abidjan. Et là, ma tante m’appelle pour me dire que je suis sélectionné pour aller en Thaïlande. J’étais surpris, d’autant que je ne n’avais pas beaucoup joué au Mali à cause d’une blessure. Je n’y croyais pas, mais mon coach est venu me le confirmer. Avant de monter dans l’avion j’avais peur. Nous avons fait une escale au Cameroun, puis nous sommes allés au Kenya pour obtenir un visa pour la Thaïlande. On devait y rester cinq à six mois. Une fois là-bas, on a été très bien accueillis. On faisait surtout des entraînements, mais ce n’était pas facile. Les premiers jours, on nous a donné le ballon pour travailler sa maîtrise. Chaque lundi, on devait montrer notre niveau de progression. On se levait donc à 5h30 du matin pour progresser. En tant qu’africain, s’adapter à la nourriture n’a pas été facile non plus.

En France, on a un freestyler connu, Sean Garnier…(Il coupe) Oui, il est venu à Abidjan il y a peu. On se connaît bien. Je suis comme son petit.


Lui mélange freestyle et hip-hop. Et toi ?J’essaie d’avoir un style ivoirien. Le coupé décalé. Il y a beaucoup de blocages. Tu écoutes la musique et tu essaies d’allier les deux.

Tu gagnes ta vie avec le foot-freestyle ?Actuellement, c’est difficile. On ne paye pas bien, on te parle mal, on ne te prend pas au sérieux. Ce n’est qu’une fois que tu passes à la télé qu’on te considère. Depuis que je suis passé à Incroyable talent, les gens m’appellent, me reconnaissent. Avant on faisait comme-ci je n’étais personne. Avant pour négocier ton contrat, tu donnais ton prix, c’était toujours trop. Maintenant, ils ne discutent plus.

Pour un freestyler, la communication est importante. Il faut savoir se vendre.Oui, c’est très important d’avoir quelqu’un qui s’occupe de ça pour ne pas te faire avoir. J’ai été beaucoup utilisé à mes débuts.

Tes perspectives d’avenir ?Représenter la Côte d’Ivoire aux Jeux de la francophonie en 2017. Il ne faut pas que je me blesse, mais ce qui est difficile, c’est qu’ici en Afrique, les gens ne sont pas tous bons. Ils en ont après toi et veulent souvent te blesser. Histoire de jalousie. C’est pour ça que j’ai arrêté les petits Maracanã du quartier.

Tu te considères comme artiste ou footballeur ?Je me considère comme un freestyler. Mais le freestyler peut devenir artiste, car il a de l’art en lui.

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Propos recueillis par Flavien Bories

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