- Français de l'étranger
Abdou : «Je croise beaucoup de français»
C'est dans un café, à côté de la gare de South Bromley, au sud de Londres, que nous avons rencontré Nadjim Abdou. Né et formé à Martigues, le milieu de terrain est aujourd'hui appelé Jimmy et évolue en League One, à Millwall. Interview d'un mec sympa de 25 ans avec son fils d'un an dans la chaise-bébé.
Comment tu t’es retrouvé à Millwall ?
Ça s’est fait vite, en fait. J’étais à Plymouth, j’avais un an de contrat. Ils m’ont proposé de prolonger mais on ne s’est pas mis d’accord avant que je parte en vacances. Entre-temps ça a un peu capoté, les choses ont trainé. Je suis allé en France et sur le trajet du retour, j’ai su que je ne serais plus à Plymouth. Mon agent avait pris contact avec l’entraineur d’ici, qui s’est renseigné sur moi, et sur le trajet j’ai appris que je serais à Millwall. Je suis juste repassé à Plymouth puis je suis revenu sur Londres et j’ai signé à Millwall.
Plymouth était en Championship (D2), Millwall en League One (D3), c’était quand même intéressant ?
Bah, comme tout est allé vite, je n’ai pas eu vraiment le temps d’analyser la chose, mais ce qui m’intéressait était de retrouver du temps de jeu. Je savais que l’entraineur me voulait vraiment et qu’il comptait sur moi. Et puis c’était intéressant de tenter une nouvelle expérience. C’est quand même le plus gros club de la division par rapport à son passé, même si maintenant il y a Leeds.
Et ça se passe bien ?
Oui, ça se passe bien. La saison avant que j’arrive, ils luttaient pour le maintien, mais la saison passée, on est allés en finale des play-offs (entre la 3e et la 6e place, les équipes disputent des play-offs pour déterminer le troisième club promu en Championship, ndlr). Cette année, on est encore en course pour la montée, donc pour l’instant c’est satisfaisant.
Tu es titulaire ?
Oui, j’ai fait quasiment tous les matches cette saison. J’en ai raté trois ou quatre pour blessure, c’est tout. Ça me fait presque 40 matches dans la saison, un peu plus en comptant la Cup. On est quand même 24 équipes dans le championnat. Et l’année dernière on jouait beaucoup en milieu de semaine. Quand on s’habitue, ça ne pose plus de problèmes.
L’objectif, c’était la montée automatique ?
L’objectif de l’année, c’est la montée, par les play-offs ou pas. Au début, on était vraiment loin des premières places. Là on est à trois points du deuxième (Leeds, ndlr), alors qu’au mois de janvier, on avait 20 points d’écart. On les a rencontrés lundi dernier, on a gagné. Maintenant, si on doit prendre les play-offs, on prendra.
Avant de signer, tu connaissais la réputation des supporters du club ?
En fait, j’en avais entendu parler avant, mais c’est quand j’ai signé que je m’en suis rappelé. Maintenant, ils sont dans leur club… Moi, je n’ai pas eu de problèmes, personnellement. Depuis que je suis là, je n’ai pas relevé d’incident particulier…
Cet été, quand même, il y a eu l’affrontement avec les supporters de West Ham.
Oui, mais ça s’est passé à West Ham. Ce sont les supporters de West Ham qui ont envahi le terrain. Après, il y a eu quelques échauffourées avec la police, quelques blessés (un fan de Millwall a reçu un coup de couteau, ndlr). Moi, en plus, je n’y étais pas, j’étais blessé. Ce ne sont plus les gros incidents qu’il y a eus il y a une dizaine d’années, quand il y avait des bastons à tous les matches. Maintenant, ça se passe relativement bien. Les déplacements à risques, comme à Leeds, se passent bien. Ils ont réduit le nombre de supporters en déplacement, donc il n’y a plus de soucis.
Ils ont aussi la réputation d’être racistes sur les bords.
Oui, c’est un tout. Quand tu penses hooliganisme, tu penses racisme (sic). Je n’ai pas eu de souci avec ça jusqu’à présent. Au contraire, j’ai été adopté par les supporters. C’est vrai que si j’avais ce genre de problèmes, ce serait délicat, mais ce n’est pas le cas. Il peut toujours y avoir une partie de supporters racistes, mais tant qu’on ne vient pas me faire chier, je fais mon travail du mieux que je peux.
Le club souffre-t-il de cette réputation ?
Quelque part oui, sur certaines décisions. Millwall est directement assimilé à tous les dérapages qu’il y a eus dans le passé. Dans certains matches à l’extérieur, on peut être désavantagés à cause de cette image de voyous. Ça peut arriver.
Pas mal de joueurs français décident de partir jouer dans des petits clubs anglais. A quoi est-ce dû ?
En Angleterre, déjà, il y a beaucoup de clubs. Tu as le choix. Aujourd’hui, tu peux être un an dans ce club-là et facilement trouver un autre club ailleurs. Et puis tu vis un autre football, un autre environnement. Ça ne plait pas à tout le monde, mais je pense que ça attire. Et le rêve de tous les joueurs qui viennent ici, c’est de jouer en Premier League, même si on n’a pas tous cette chance. C’est vrai que depuis que je suis ici, je croise beaucoup de joueurs français.
Le niveau est-il plus élevé qu’en National ?
Pour avoir joué en National et en D2, je dirais que c’est un mix des deux. Les équipes qui viennent de descendre de Championship seraient de bonnes équipes de Ligue 2.
Les joueurs n’aiment pas trop parler de ça mais financièrement, c’est sans doute plus intéressant que l’équivalent français.
Oui, je pense, quand même. Le système est différent, aussi, au niveau des taxes. Ici, tu n’as pas d’impôts après salaire. Pour moi, c’est le plus gros avantage. Après, c’est sûr que l’avantage financier par rapport au National et à la Ligue 2 n’est pas négligeable.
C’est aussi ça qui t’a motivé à venir ?
Oui, mais après ma première saison en Ligue 1 (avec Sedan, ndlr), même s’il y a eu la relégation, j’aspirais à continuer ma carrière en France. Malheureusement, je n’ai pas trouvé preneur et j’ai eu l’opportunité de jouer en Angleterre. En Ligue 2, il y a eu beaucoup de discussions, on m’a fait poireauter. Juin, juillet, rien n’arrivait. La reprise arrivait et ma seule proposition était Plymouth.
Et la vie en Angleterre ?
C’est vrai qu’en arrivant ici, j’avais un peu peur. Il y avait les clichés de l’Angleterre : le temps, les gens, etc. Et Plymouth, c’est vraiment loin d’ici, c’est à 5 heures de route, au milieu de nulle part. Mais bon, la ville est sympa, il faut s’habituer.
Et puis tu avais vécu à Sedan avant…
(rires) Ouais, c’est vrai, ça a joué. J’étais resté quatre ans à Sedan, il en fallait peu pour revivre. Maintenant je suis ici, à Londres, c’est encore mieux, donc la vie me plait. Ici, c’est sympa, c’est encore Londres, et la famille y est bien. Ma femme est là, le petit est né en France mais ils sont venus me rejoindre après.
Dans l’avenir, tu penses rester à Milwall ?
J’ai prolongé mon contrat en novembre dernier, je suis lié au club jusqu’en 2013. Après, j’espère déjà qu’on va monter, c’est mon plus grand souhait, mais ça va tellement vite, je peux me retrouver là ou ailleurs, j’en sais rien. Je profite du moment présent.
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