- Les pelouses du Tour
- Étape 12
- Pau > Peyragudes
À Tarbes, le football sieste à l’ombre du rugby
Ce jeudi, les coureurs batailleront dans l’étape la plus longue du séjour pyrénéen. L’occasion de passer par Tarbes, préfecture des Hautes-Pyrénées, plus connue pour être une terre de rugby que de football. Mais au milieu des ballons ovales, le Tarbes Pyrénées Football fait son petit bonhomme de chemin et peut compter sur des coups de pouce du Téfécé et même du Real Madrid.
La fusion a porté ses fruits. En 2006, le Tarbes Gespe Football – un club axé sur les catégories de jeunes avec un aspect social plus important -, et le Tarbes Stado Football – plus compétitif, tourné vers les seniors et tout juste champion de DH Midi-Pyrénées -, décident de ne former plus qu’un. « C’est pour ça qu’il y a deux couleurs qui ne vont pas forcément ensemble sur le logo(rouge et violet, ndlr), ce sont les couleurs des deux anciens clubs qui ont fusionné en 2006. Au niveau sportif, cette fusion a été une totale réussite puisqu’on est passé du niveau régional à la CFA » , raconte Roberto Branco, ancien gardien du club et aujourd’hui responsable de la formation. C’est ainsi que naît le Tarbes Pyrénées Football. Le problème, c’est qu’en face, le Tarbes Pyrénées Rugby a quand même des faits d’armes un peu plus glorieux avec ses deux titres de champions de France (en 1920 et 1973), tandis qu’un peu plus loin, les voisins rugbymen de Lourdes font encore mieux avec huit titres pour onze finales de championnat disputées. C’est donc peu dire que, historiquement, les Hautes-Pyrénées sont plus friandes de rugby que de football.
Pratique contre croyance
« Ici, on a tendance à dire que le foot est un sport de pratiquants et le rugby un sport de croyants » , résume Christophe Guarinos, auteur du livre L’aventure du football en Haute-Bigorre et responsable de l’école de foot de l’Entente sportive du Haut-Adour, un peu au sud de Tarbes. Si le football compte plus de pratiquants que le rugby dans les Hautes-Pyrénées, il faut bien avouer que le ballon rond est loin d’être aussi populaire que son cousin difforme, même si le club de Tarbes évolue aujourd’hui en Fédérale 1 (troisième division en rugby). « Pour le moindre match de rugby, même pour de la Fédérale 1, vous avez trois ou quatre fois plus de monde que pour un match du TPF. Il n’y a du monde que quand Tarbes reçoit les réserves des équipes pros, genre Monaco, Nice, etc. ou alors pour les bons parcours en Coupe de France » , explique Christophe Guarinos qui est aussi coiffeur à ses heures perdues. « Historiquement, c’est un club qui est bien plus médiatisé que nous. C’est un club qui a déjà été champion de France, donc au niveau culturel c’est plus ancré depuis pas mal d’années » , reconnaît Roberto Branco.
Le premier club de rugby à Tarbes voit le jour en 1901, alors que son homologue du football ne naîtra qu’une vingtaine d’années plus tard. Ce n’est qu’à l’époque du Front populaire, en 1936, que le football commence à se développer dans la région, même si les joueurs sont souvent obligés de squatter les terrains de rugby et d’improviser des cages avec les poteaux de dix mètres. Christophe Guarinos en profite pour endosser le rôle du professeur d’histoire : « Le football dans la région s’est extrêmement développé grâce aux flux migratoires. Avec les Espagnols notamment pendant la guerre civile et puis avec les Pieds noirs après la guerre d’Algérie. Le rugby était plus joué par les mecs du coin. » Alors, pendant que le football progresse lentement, le rugby devient le sport de la région, d’autant plus qu’il correspond bien à la mentalité du pays. « Les valeurs du rugby correspondent assez bien à l’état d’esprit local. Le contact, le côté un peu viril des choses, bon… ça a plu quoi » , rigole l’historien de la région.
Toni Kroos, Téfécé et chasubles multicolores
À défaut de ne pas être de joyeux lurons dingues de troisième mi-temps, les joueurs du Tarbes Pyrénées Football font de leur mieux pour faire parler d’eux. « On est un club qui a quand même plus de 480 licenciés, donc on tient parfaitement la comparaison avec le rugby » , tient à rappeler Roberto Branco. Cette année, le club qui évolue en CFA a connu son heure de gloire pendant les vacances de Pâques, quand le grand Real Madrid est venu poser ses valises dans le sud de la France. Enfin, plus ou moins. « C’est la Fondation Real de Madrid qui est venue. Ils nous ont contactés, ensuite ils se sont déplacés pour voir les installations. En fait, c’est Toni Kroos qui avait lancé l’idée. Il voyait comment fonctionnait l’école de foot du Real et il pensait que c’était bien de l’exporter à l’étranger » , explique le responsable de la formation du TPF. Au total, quatre-vingts gamins inscrits pour un stage de quatre jours et trois qui ont été sélectionnés pour les phases nationales et qui peuvent espérer fouler la pelouse du Santiago-Bernabéu au bout du compte. Pas de panique pour les non sélectionnés, ils auront sûrement une seconde chance pour briller l’année prochaine. « Pour l’image du club, c’est une bonne chose. Et puis les gamins étaient comme des fous. Les mecs du Real sont arrivés avec des trucs que nous, en tant que petit club, n’avons pas et que même plusieurs clubs pros n’ont pas en France. Ils essayent des choses pour pouvoir les implanter après sur leurs équipes pros. Ils ont essayé des chasubles qui changent de couleur avec des tablettes électroniques, des buts qui changent aussi de couleur, des ballons qui donnent la vitesse de frappe, etc. Donc c’est une expérience que les gamins n’auront plus, c’est pour ça que c’était génial pour eux » , raconte Roberto Branco.
De manière plus locale, le TPF s’est aussi lié d’amitié avec le Toulouse Football Club. Il y a deux ans, le Téfécé cherchait une pelouse à mi-chemin entre Eibar et la ville rose pour disputer un match amical contre le club espagnol. Visiblement satisfait par l’organisation de ce match sur la pelouse de Tarbes, le club toulousain a décidé de remettre ça cette année contre Osasuna, le 28 juillet. « On essaye d’être le plus dynamique possible là-dessus. On essaye de faire partager le plus de choses possibles dès qu’on nous contacte pour organiser quelque chose. Pour faire connaître le foot et faire connaître le club à travers ces événements qui sont assez gros. Le Real de Madrid et un club de Ligue 1 qui viennent jouer à Tarbes, ça reste assez fort » , se réjouit Roberto. La prochaine étape ? « On a une structure féminine qui est en train de se construire. » L’équipe féminine du Tarbes Pyrénées Rugby, elle, existe déjà.
Par Robin Richardot
Tous propos recueillis par RR