A.Sars : «Une ambiance de feu sans le feu, c’est possible»

On ne parle plus que des fumigènes dans les stades en ce moment. Est-ce vraimentsi dangereux ?

Bien entendu, la dangerosité de ces instruments n’est plus à prouver. Il arrivesouvent que des fumigènes soient lancés à plein feu vers les tribunes adverses.
Je vous laisse imaginer les dégâts que cela peut causer. Même pourcelui qui les allume, l’utilisation est déjà un acte très risqué. Ça brûle quand même à
600 degrés ces choses-là, il ne faut pas rigoler avec ça. Je comprends tout àfait les décisions arbitrales du moment. Le jour où on se retrouvera avec un
supporter en flammes ou un joueur avec un trou dans la jambe, il sera trop tard.Je vous rappelle qu’il y a deux ans, un pompier avait eu deux doigts arrachés
suite à un incident similaire.

N’y a-t-il pas tout de même une distinction à faire entre fumigènes et bombesagricoles ?

Non, je ne crois pas. C’est tout aussi dangereux. Dans un cas comme dansl’autre, il s’agit d’un matériel prohibé. A partir du moment où ces objets n’ont
rien à faire dans un stade, il n’y a pas lieu de faire de distinctionsquelconques.

Mais d’où vient le problème ? De fouilles insuffisantes à l’entrée des stades ?

C’est l’éternel et délicat débat. Le problème avec les feux de Bengale, c’estque cela ne prend pas de place, et c’est donc très facilement dissimulable. Ceci
dit, la quantité que l’on retrouve parfois à l’intérieur d’une seule et mêmetribune doit faire réfléchir. Il est tout à fait anormal que l’on puisse en
retrouver en si grand nombre. Personnellement, je pense qu’il y a des cas decomplicités. C’est de toute façon une question qu’il faut se poser.

C’est quoi alors la prochaine étape, arrêter totalement le match ?

A partir du moment où la sécurité des spectateurs peut être mise en danger, jepense en effet qu’il faudra sans doute en arriver un jour à cette extrémité-là.
Et peut-être qu’à ce moment-là on verra un peu moins de laxisme, étrangement. Ceserait dommageable bien sûr, mais il faut aussi penser aux familles, aux enfants
qui viennent assister aux matchs. Quoi qu’il en soit, on s’aperçoit que lesmesures actuelles ne sont pas suffisantes, et il va falloir essayer d’être plus
répressifs encore pour enrayer durablement cette mode, parce que c’est une mode.

Quelle sanction attendez-vous ? Le retrait de points (évoqué par PascalGaribian, président de la commission de discipline de la LFP) est-il
véritablement une bonne solution ?

Il est évident que cela ne peut plus continuer comme ça, mais il faut trouverune solution juste, qui ne pénalise pas trop les principaux acteurs du jeu,
joueurs ou entraîneurs. Ce ne sont pas les responsables. C’est la direction desclubs qu’il faut sanctionner. C’est pour ça que je ne suis pas favorable à cette
idée d’enlever des points à des joueurs qui se battent sur un terrain. Lehuis-clos me semble plus intelligent, on aurait déjà moins de problèmes de
fumigènes !

Mais les fumigènes, ça met de la chaleur et des couleurs dans les tribunes. Nese dirige-t-on pas vers une aseptisation progressive des stades ?

Mais avant que les fumigènes existent, il y avait quand même de l’ambiance !Regardez l’Italie ou l’Angleterre. J’ai regardé le derby entre Manchester United
et Manchester City ce week-end, c’était chaud bouillant et il n’y a pas eu unseul fumigène. La preuve qu’une ambiance de feu, sans le feu, c’est possible.
Quand on veut faire vivre un stade, on fait des tifo géants, on chante. Il n’y avraiment pas besoin de fumigènes.

Toute cette polémique sur les engins pyrotechniques n’est-elle pas un moyen defaire diversion par rapport aux difficultés actuelles de l’arbitrage français ?

J’espère que non ! Mais je ne pense pas que ces problèmes de fumigènes viennentde l’arbitrage. Je suis totalement en phase avec les arbitres français
lorsqu’ils arrêtent le match suite à des fumigènes dangereux. Si j’étais à leurplace, je ferais la même chose. Un arbitre se doit d’être responsable, non
seulement des joueurs mais aussi des spectateurs qui ont payé leur place pourvoir un spectacle. Ces gens-là sont pris en otage par une certaine partie de
pseudo-supporters.

Donc toute cette histoire n’est pas qu’un pétard mouillé…

(Rires) Non. Sérieusement, là où il y a une volonté véritable, on peut trouverdes solutions. On peut éradiquer ce problème, il faut pour cela mettre en place
des mesures coercitives, et ça ira mieux. Il suffit de le vouloir vraiment.