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À quoi ressemblera la Ligue des champions en 2024 ?
Vous vous y êtes habitué, vous prenez du plaisir, chaque saison, à regarder la Coupe d'Europe, avec sa phase de poules en première partie de saison, puis sa phase finale. Eh bien préparez-vous, car tout risque de changer en 2024. Lorsque la fiction rencontre la réalité...
La saison 2019-2020 vient de s’achever sur le titre européen du Bayern Munich, après avoir battu le Paris Saint-Germain. Et alors que le Final 8 devait être unique et sans suite, il semblerait que ces matchs secs sur terrain neutre aient beaucoup plu aux dirigeants européens. Le jour même de la finale, à Lisbonne, le président de L’UEFA, Aleksander Čeferin, a donné une interview à l’agence de presse Reuters et a affirmé son attachement à ce format. « Les matchs ont été plus intéressants, plus intenses, plus excitants. Tout se jouait sur un match, si une équipe marquait, l’autre devait impérativement inverser la tendance, sans se dire qu’il restait encore un retour. » De là à dire que ça va se répéter dans le futur, il n’y a qu’un pas. Čeferin a néanmoins précisé que le malheur d’une telle organisation était « la réduction du nombre de matchs », donc de la potentielle valorisation des droits TV, nerf de la guerre de l’UEFA. Comment faire alors ?
En 2024, on passe à une immense C1 ?
Pour le journaliste Simon Evans, tout devrait se jouer à partir de la saison 2024-2025, au moment où les contrats droits TV européens prendront fin et que le format des coupes d’Europe sera rediscuté. Révélé par le New-York Times en mars 2019, le syndicat européen des clubs, l’ECA, dirigé par le président de la Juventus, Andrea Agnelli, a proposé une solution. Pour assurer à la fois plus de matchs, donc plus de retransmissions à la télé, et plus de suspense, avec un tournoi final, la Ligue des champions, dès 2024, pourrait passer à une phase de groupes plus intense : 4 poules de 8 plutôt que 8 groupes de 4 actuellement.
Cela signifierait 14 matchs par équipes au lieu de 6, soit 2,3 fois plus de soirées foot à la télévision, 2,3 fois plus de recettes publicitaires et marketing, 2,3 fois plus de revenus billetterie, de visibilité et de gains commerciaux. Puis, afin de conserver une relation avec leurs supporters, les 4 premiers de chaque groupe, soit 16 équipes, joueront les huitièmes de finale et les quarts de finale en match aller-retour, sur leur terrain. Enfin, pour intégrer l’idée du Final 8, un Final 4 sera joué dès les demi-finales, sur terrain neutre en match sec, ailleurs qu’en Europe : aux États-Unis, au Qatar ou en Chine. On pourrait même rajouter une petite finale afin d’assurer une rencontre supplémentaire. Au total, on passerait de 111 matchs européens à 238. L’équipe victorieuse devrait passer de 13 rencontres disputées à 20. Les télévisions se frottent déjà les mains rien que de penser à cette organisation intense et spectaculaire.
Le football européen, la nouvelle NFL ?
D’ailleurs, le principal argument d’Agnelli, cité par le New-York Times, ce sont les droits TV. Le dirigeant italien, en 2019, s’étonnait que la compétition phare du sport le plus populaire du monde n’engendre que 2,04 milliards d’euros de droits TV alors que le championnat de foot US était à 6 milliards. Selon lui, en augmentant le nombre de rencontres et d’affrontements, et en offrant la possibilité d’organiser des rencontres sur différents créneaux horaires, à 15h pour le marché asiatique, 21h pour le marché européen et 23h pour le marché américain, on démultiplierait les perspectives d’audience.
En agissant ainsi, les droits de la C1 exploseraient et rattraperaient la NFL. Plus d’argent, c’est aussi plus de distributions, plus de gains, plus de revenus, et l’explosion absolue du foot business. Mais comment le faire accepter ? Comment faire passer la pilule auprès des clubs qui s’ingurgiteront au moins 8 matchs supplémentaires ? La perspective de plus d’argent devrait rapidement les faire sourire. Avec des contrats multipliés par deux a minima, la seule prime de participation passerait de 15,25 millions d’euros à plus de 30 millions d’euros. Et plus de matchs, c’est aussi plus de gains et de recettes billetterie. Vont-ils vraiment discuter ?
Une compétition semi-fermée pour plus de suspense ?
L’autre élément qui devrait leur faire accepter le changement, c’est la fameuse perspective d’une Ligue des champions semi-fermée. L’idée, annoncée très tôt dans la presse, c’est que l’ensemble des qualifiés en huitièmes de finale serait automatiquement qualifié pour l’édition suivante, quelle que soit leur place finale en championnat. Sur le modèle de l’EuroLigue en basket, les ligues nationales deviendraient secondaires et pratiquement inutiles une fois passée la première partie de saison.
Sauf que là, c’est le syndicat européen des ligues, l’European Leagues, qui monte au créneau et s’attaque à cette perspective de réforme. Les championnats nationaux doivent rester maîtres du destin des clubs, il en va de leur réputation et de leur valorisation économique. Sauf que, si la Ligue des champions rapporte plus, l’UEFA pourra parfaitement compenser financièrement les pertes des championnats. Des négociations houleuses vont très certainement avoir lieu entre 2020 et 2024.
Un nombre plafonné de matchs pour les joueurs ?
Enfin, dernier point, et non des moindres, comment les joueurs accepteront-ils de jouer plus de matchs, alors que les stars du ballon rond en empilent jusqu’à 50 par an ? La FIFpro, le syndicat international des joueurs, pourra se saisir du dossier et imposer un plafond maximum de matchs, en club ou avec la sélection, joués par saison, allant de 35 à 45 par an.
On peut ensuite aller très loin dans l’imagination. Peut-être que les cinq changements seront confirmés voire augmentés, avec six, sept ou huit. Et les pauses fraîcheur normalisées, même pendant l’hiver, avec des quart-temps, afin à la fois de reposer les organismes, mais aussi de passer des fenêtres publicitaires à la télévision, etc. Ce qui est certain, c’est que le football va changer à l’avenir. Il ne ressemblera plus à ce que nous avions l’habitude de voir depuis 25 ans, tout va être bouleversé en 2024 et nous serons aux premières lignes pour le constater. Et le critiquer ?
Par Pierre Rondeau