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À qui profite une qualification en Coupe du monde ?

Par Nicolas Kssis-Martov
À qui profite une qualification en Coupe du monde ?

Se qualifier pour une Coupe du monde comporte aussi une facette financière non négligeable. Car si c'est toujours la FIFA qui rafle la mise d'une manière ou d'une autre, tout le monde essaie d'y trouver son compte, quitte à déborder sur les côtés....

Premier fait important à souligner : la FIFA a su faire de la Coupe du monde un événement hautement rentable. Quand elle relève le tiroir caisse, elle consent néanmoins à refiler partiellement les sommes faramineuses que ce grand show du ballon rond font ruisseler dans ses comptes. Pour se rafraîchir la mémoire, le dernier Mondial a engendré des recettes à hauteur de 4,4 milliards d’euros, ce qui a permis d’engendrer de solides bénéfices, jamais imposés sous le doux soleil helvète.

Profitant donc de cette manne, notre glorieuse organisation « à but non lucratif » , sise du côté de Zurich, laisse retomber quelque menue monnaie dans les poches des équipes qui participent à ce prestigieux raout à crampons, qui n’existerait certes pas sans elles. De la sorte, rien que de se qualifier suffit déjà en soi à décrocher un petit jackpot. Et pour la FFF, les calculettes étaient surtout de rigueur au Stade de France. « La prime de qualification pour la Fédération française, précise Pierre Rondeau, économiste du sport, est de 6 millions d’euros et les primes augmentent après chaque victoire et qualification au tour supérieur durant le tournoi, jusqu’à atteindre 25 millions d’euros pour une victoire finale. Après, au-delà de la simple participation, tu as aussi la possibilité d’existence de clauses dans le contrat équipementier pour l’équipe de France. Peut-être que la FFF a négocié une prime de qualification en Coupe du monde avec Nike et aussi les joueurs. »

Les capés et leur part du gâteau

L’addition avait déjà été réalisé dans les bureaux de la FFF, dont l’équilibre du budget 2017-2018 (environ 224 millions d’euros) était fondé sur l’hypothèse de cette qualification directe pour la Coupe du monde en Russie, mais également en quarts de finale au milieu de la toundra. Un pari qui incluait 87,5 millions d’euros de partenariat et 52,7 millions d’euros de droits télévisuels, difficiles à garantir en cas de fiasco en phase qualificative. Le match contre le Luxembourg relevait finalement davantage de l’accident industriel que de la faute professionnelle.

Cela dit, il n’y a pas que cette noble institution de délégation de service public qui ait pu remercier le dieu Crésus le soir de l’étriquée victoire contre la Biélorussie. En effet, les capés ont aussi droit à leur part du gâteau, ce qui n’entache évidemment en rien leur évident amour du maillot (sponsorisé). « Les fédérations redonnent une partie des primes de la FIFA aux sélectionnés, continue Pierre Rondeau. En 2014, la Fédération française en avait redistribué 30% aux membres de la sélection nationale, soit 78 000€ de prime de participation et 320 000 euros par joueur environ en cas de victoire. » Inutile de préciser que cette dernière ligne comptable resta dans les caisses fédérales.

Visibilité sportive et médiatique

L’honnêteté impose toutefois de signaler que, depuis le Brésil, Noël Le Graët a suspendu cette logique automatique. Nos Bleus ont dû apprendre l’humilité pécuniaire, ou du moins à communiquer dessus. Ils ne recevront leur dû qu’une fois parvenus au cœur de la compétition elle-même, avec même des critères de performances censés montrer que, désormais, la maison bleue est une affaire sérieuse. Pour illustration, Payet ou Griezmann n’ont engrangé leur petit cadeau patriotique qu’à partir des quarts, environ un tiers de ce que l’UEFA a cédé généreusement à la FFF après la compétition (ce qui représentait quand même entre 240 000 et 250 000 par tête de pipe). Les villes hôtes auraient rêvé d’une telle solidarité.

Toutefois, il faudrait être d’une naïveté confondante pour ne pas comprendre l’impact sur la carrière d’un joueur du simple fait de se qualifier, au-delà des profits immédiats que nous venons d’évoquer. S’ouvrir le chemin des pelouses d’une Coupe du monde, épreuve incontournable en matière de visibilité sportive et médiatique, insuffle en soi une incroyable plus-value (en zéro à la fin des chèques) au premier concerné. « Participer à une Coupe du monde pourrait permettre aux joueurs de renégocier leur contrat en mettant en avant cette ligne de CV, détaille Pierre Rondeau. Le prestige de la participation incite le joueur à exiger une revalorisation, de même que le club propriétaire pourrait revendre plus cher son joueur qui a participé au Mondial, afin de réaliser une plus-value. » Or, le footballeur est à la fois travailleur et capital. Et rien ne remplace un Mondial pour réévaluer le salaire du premier et la rentabilité du second.

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