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À Nice, Dante ne veut plus faire la Comédie
Durablement touché par l’échec monumental du Brésil en demi-finales du Mondial 2014, le défenseur central brésilien débarque sur la Côte d’Azur après une saison mitigée à Wolfsburg. Mais grâce à Lucien Favre et son projet de jeu ambitieux, il pourrait bien définitivement retrouver le sourire sous le soleil de Nice.
C’était un soir maudit de juillet 2014. Une demi-finale de Coupe du monde en forme de cauchemar éveillé pour toute une équipe et toute une nation. Dante, titulaire dans l’axe central en raison de la suspension de Thiago Silva, est plongé quatre-vingt-dix minutes durant dans ce qui s’apparente au neuvième cercle de l’enfer. Le Brésil est piétiné par l’Allemagne, 7-1. La plus lourde défaite à domicile de l’histoire de la Seleção. Après un Mondial irrespirable, où ils n’auront cessé d’être accablés par les critiques, les joueurs auriverde, de Neymar à David Luiz en passant par Marcelo, vont chercher un peu de sérénité en club. Mais pas Dante, qui évolue en Allemagne, au Bayern Munich qui plus est, et pour qui il devient éminemment plus difficile de prendre de la distance avec cette cuisante humiliation.
Le début de la saudade
Le désastre du Mondial brésilien marque le début de la régression du défenseur central brésilien au plus haut niveau. Joueur incontournable du onze du Bayern pendant deux saisons consécutives, vainqueur de la Ligue des champions 2013 avec le Rekordmeister, Dante va voir son statut connaître une lente érosion. Le problème est double. Mental, en premier lieu. À Munich, Dante est entouré d’Allemands fraîchement champions du monde. Et ceux-ci n’ont vraisemblablement pas le triomphe modeste. Au point que le Brésilien doit leur demander de se calmer un peu sur le chambrage : « J’ai parlé avec les Allemands du Bayern, et particulièrement à Thomas (Müller, ndlr), je lui ai dit qu’on pouvait rigoler sur n’importe quoi, mais pas sur ça, ça ne me fait pas rire. Ce chambrage n’est pas sain » , expliquait-il début 2015 au journal brésilien O Globo.
« Je suis toujours triste. J’ai vécu une grosse déception et il n’y a que mes proches pour me remonter le moral. » Des paroles qui illustrent le mal-être d’un joueur qui n’a pas encore réussi à tourner la page, plus de six mois après le Mondial brésilien. D’autant plus que Dante doit désormais faire face aux critiques récurrentes quant à son niveau de jeu. Si le Brésilien continue de cumuler les titularisations, profitant des déboires physiques fréquents de Badstuber, il est de plus en plus critiqué par les supporters, mais aussi au sein du club. Notamment par Pep Guardiola, qui n’est pas satisfait du rendement de son joueur.
Un brin maso
En février 2015, Dante fait part à Bild de ses difficultés actuelles dans une déclaration qui semble autant adressée aux observateurs de la Bundesliga qu’à son entraîneur : « Je suis très, très, très, très, très, très, très déçu. Quand je joue mal, critiquez-moi ! Quand je fais une erreur, insultez-moi ! Quand j’ai été nul, je dis que j’ai été nul. Insultez-moi, n’importe quand ! Mais seulement si c’est justifié. » Mais les performances du Brésilien ne décollent pas, et Guardiola semble décidé à assumer ouvertement sa rupture avec son défenseur en le faisant remplacer en mars 2015 face à Hanovre… à la 32e minute de jeu. Dante sort sans un sourire ni une poignée de mains pour son entraîneur, qui se contentera de déclarer à la fin du match : « Je n’ai pas aimé ce que j’ai vu en première période de la part de toute l’équipe. J’ai donc procédé à un changement. » Ambiance.
Dante est pourtant réputé pour être un mec plutôt marrant. Le genre de gars à mettre son spleen de côté pour fêter le titre de Munich en 2015 en se chopant un banjo pour s’organiser un concert brésilien avec Rafinha dans les vestiaires du Bayern. Il faut dire qu’avec sa coupe d’inspiration Jackson Five et son éternel sourire aux lèvres, le joueur a laissé quasi invariablement un bon souvenir à ceux qu’il a côtoyés sur et en dehors des terrains. Alors, pour ne définitivement pas perdre sa bonne humeur, le Brésilien s’entend avec ses dirigeants à l’été 2015 pour un transfert du côté de Wolfsburg.
Les prémices d’un retour
Avec les Loups, Dante connaîtra une saison en forme de montagnes russes. Son association avec son compatriote Naldo fait recette en Ligue des champions, où Wolfsburg termine premier de son groupe avant d’être à deux doigts d’éliminer le Real Madrid après s’être imposé 2-0 en quarts de finale aller (les Madrilènes l’emporteront 3-0 au retour). Mais Dante n’est pas aussi impérial en Bundesliga, où il ne peut notamment pas empêcher Lewandowski d’inscrire cinq buts en neuf minutes lors d’un mémorable match de championnat.
Il sera tout aussi impuissant lorsque Wolfsburg se fera sèchement baffer par le Bayer Leverkusen trois à zéro en avril 2016. Wolfsburg finit à une décevante huitième place en championnat, et la saison de Dante, loin d’être catastrophique mais irrégulière, a un goût d’inachevé. Et n’a vraisemblablement pas entièrement convaincu les dirigeants des Loups qui acceptent de le transférer à Nice.
L’amour du coach
Nice, où Dante pourrait donc définitivement confirmer que sa carrière prend un nouveau tournant. Car l’ex-Lillois y retrouve l’entraîneur qui lui a véritablement permis d’éclore au plus haut niveau. C’est sous les ordres de Lucien Favre que Dante est devenu un pièce maîtresse de la défense du Borussia Mönchengladbach et a tapé dans l’œil du Bayern Munich, qu’il rejoignait à l’été 2012. Sous les ordres du technicien suisse, Dante et les siens terminaient ainsi quatrièmes de la Bundesliga 2011-2012, avec la seconde meilleure défense du championnat (seulement 24 buts encaissés). Sur la Côte d’Azur, l’ex-Munichois de trente-deux ans devrait retrouver un groupe très jeune où son expérience devrait permettre d’encadrer Plea (vingt-trois ans), Sarr (dix-sept ans), Dalbert (vingt-trois ans), Seri (vingt-cinq ans) et autres Koziello (vingt et un ans).
Soit un groupe étrangement similaire à celui que Dante a connu à Mönchengladbach, où la majorité des joueurs de l’effectif ne dépassaient pas les vingt-cinq ans. Tant qu’au projet de jeu esquissé par Lucien Favre, plutôt séduisant et offensif au regard des deux premiers matchs des Niçois, il devrait sans doute épouser les qualités du Brésilien. Défenseur au placement parfois hasardeux, mais redoutable dans les duels et dans les airs, Dante est également doté d’une technique franchement pas dégueulasse, et notamment d’un jeu long précis et précieux dans la phase de construction. Un entraîneur qui l’aime, du soleil, du beau jeu, tous les ingrédients sont donc là pour que l’ancien de Munich réussisse son retour dans l’Hexagone. Et s’autorise un petit solo de banjo pour fêter une qualification de Nice en Coupe Europe en mai prochain ?
Pour Leonardo, Zinédine Zidane a bien fait de refuser le BrésilLes premières images de @dante_bonfim à l’entraînement de l’OGC Nice #IssaNissa pic.twitter.com/Pv6rktD1uW
— OGC Nice (@ogcnice) 23 août 2016
Par Adrien Candau