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Griezmann, comme un poisson dans l’Atlético
Auteur d’un début de saison tonitruant avec l’Atlético de Madrid, Antoine Griezmann démontre qu’il est toujours en forme. De quoi contraster avec son rendement récent en équipe de France.
Parfois, une phrase glissée au milieu d’un discours classique peut révéler beaucoup de choses. En témoigne la sortie d’Antoine Griezmann au micro de Canal+, après la victoire de l’Atlético de Madrid face à Leipzig (2-1), en ouverture de la Ligue des champions. Interrogé sur le décalage de performances qu’il affiche entre l’équipe de France et les Colchoneros, l’attaquant a en effet laissé planer le doute sur son bien-être en Bleu : « Ici (à l’Atlético), je sais ce que je dois faire. » Une manière – implicite ou non – de mettre la lumière sur le lien visiblement rompu qui le rattachait jusque-là à la tactique de Didier Deschamps. Sans pour autant en expliquer les causes.
En club, Griezmann fait du Griezmann. Même s’il admet ne pas « encore être à 100% », le Maconnais a entamé cet exercice 2024-2025 comme il a conclu le précédent : en forme. Depuis août, il facture ainsi à trois buts et trois passes décisives en six matchs toutes compétitions confondues, pour ajouter du poids statistique à un rendement global bien chargé durant les rencontres (élu homme du match contre Leipzig). Pour rappel, la saison dernière s’est achevée avec un bilan de 24 buts en 48 matchs, et un statut de meilleur buteur de l’histoire de l’Atlético de Madrid. Mais voilà, au milieu de cette routine enchantée, s’est posée une parenthèse plus contrastée. Celle de l’équipe de France. Depuis la Coupe du monde 2022, Antoine Griezmann peine à retrouver son statut d’indispensable dans le système bleu, une situation qui a atteint un niveau critique durant l’Euro.
Mental à deux vitesses ?
Effacé dans les débats en Allemagne, il paraît en manque de repères une fois la tunique au coq enfilée, s’efforçant de courir partout, sans jamais se montrer efficace. En disant, « ici, je sais ce que je dois faire », l’intéressé pointe donc un changement de rôle imposé en sélection, dont il ne souhaite pas se satisfaire. Après la victoire des Bleus contre l’Autriche en ouverture de l’Euro (1-0), il détaillait : « J’essaie de trouver les espaces. J’étais moins dans le cœur du jeu, j’essayais de faire le lien avec mes attaquants. Je n’étais pas très bon. On a un match demain (face aux Pays-Bas). J’espère toucher plus de ballons. » Raté, et rebelote après l’élimination face à l’Espagne en demi-finales (2-1) : « J’ai mal commencé, après je me sentais de mieux en mieux, et j’ai fini sur le banc. » Comprenez donc qu’Antoine Griezmann n’est plus le meneur de jeu qu’il pense (ou doit) être en sélection. Un constat d’autant plus difficile à théoriser, puisque le joueur côtoie Didier Deschamps et Diego Simeone depuis le même nombre d’années : dix. Difficile donc de parler de lassitude.
Du côté de l’Atlético, on est bien loin de ces tracas. Simeone, qui n’a, lui non plus, pas échappé aux questions sur son Français après Leipzig, a tenu à apporter sa maîtrise en psychologie : « C’est probablement lui qui est le plus heureux. […] Quand il va bien, il se passe toujours quelque chose. » Merci le Cholo. Pour autant, ces portes ouvertes enfoncées par l’Argentin illustrent grandement le curieux ressort mental de Grizou. Blasé avec la France – dont il voit le changement de génération arriver, sans toujours parvenir à servir de relais – il semble, à l’inverse, complètement à l’aise dans ce registre en club. Libre sur le terrain, celui qui rappelait « toujours préférer jouer dans l’axe » et « avoir besoin de cela pour être bien mentalement », l’affiche clairement à Madrid. Au soutien d’Alexander Sørloth et Julián Álvarez devant, ou en appuie de Koke, Rodrigo de Paul et Marcos Llorente au milieu, le numéro 7 ne cesse de prouver que cette capacité de « relais » est toujours imprimée dans son circuit technique. Comme quoi, Antoine Griezmann sait évoluer avec son temps.
Par Adel Bentaha