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A la recherche du « vrai foot »?

Nicolas Kssis-Martov
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L'US Quevillaise (basée au Petit-Quevilly en Seine-Maritime) va donc affronter le puissant Olympique Lyonnais. Derrière toute la symbolique strictement footballistique - tout le charme de de la Coupe de France-, ce match inattendu incarne sur la pelouse du bien nommé Stade de France quelques-unes des thématiques les plus radicales qui ont formaté le premier tour de la présidentielle et aujourd'hui organisent la droitisation du discours du candidat de l'UMP. Bref la Nationale contre la L1, ou les équipes de « vrais Français » provinciaux, bien de chez nous, contre les grandes villes cosmopolites et leurs banlieues ? Nul doute, on sait parfaitement quelle écharpe va porter samedi soir Patrick Buisson par-dessus la croix celtique de sa jeunesse...

Le FN ne s’y est pas trompé, et on sait désormais y flairer la bonne affaire consensuelle. Le parcours de Calais l’avait laissé indifférent en 2000, pas question de louper une telle opportunité entre les deux tours et avant les législatives. Jacques Gaillard, candidat du « Rassemblement Bleu Marine » dans la troisième circonscription du 76, s’est donc fendu d’un communiqué enthousiaste. « Loin du football business et des salaires indécents, les joueurs de Quevilly, entourés de dizaines de bénévoles, démontrent que les petits clubs peuvent faire jeu égal, voire être victorieux face aux multinationales du football français, bien souvent financées par des pays étrangers ! » Évidemment, il ne s’arrête pas trop sur la composition de l’équipe ou le tee-shirt « Mahmoud, on pense à toi » adressé au manager du club. Mais tout le monde a compris de quoi il retourne. On doute d’un pareil soutien de la part de la fédération FN du Rhône en faveur des Lyonnais, et cela malgré les orientations assumées de certains supporters.

Banale tentative ?

Le football ne constitue d’ailleurs pas franchement l’un des sports préférés de l’extrême-droite tricolore dont le Front est et reste l’héritier, que ce soit pour des raisons historiques (depuis Vichy, elle le voit comme une passion de « métèques ouvriers et citadins » ), de contexte (le repoussoir black-blanc-beur de 98) et factuelle (Marine Le Pen avait de la sorte expliqué encore récemment, au sujet de l’affaire de l’agression du couple Montebourg-Pulvar dans le 16e arrondissement, qu’il s’agissait apparemment d’ « un groupe de supporters de foot probablement lié au PSG, dont on connaît la radicalité » , et qui « n’a strictement rien à voir avec le FN » ). Cependant, impossible aujourd’hui de réaliser totalement l’impasse sur le sujet, même quand par conviction idéologique, comme Marine, ou par goût tel son compagnon Louis Aliot, ancien joueur, on d’abord pense ovalie plutôt que ballon rond, dès qu’il s’agit d’aimer « sa patrie » .

Car le fond de l’affaire se révèle plus profond qu’une banale tentative de récupération. Le FN a réussi à imposer son interprétation politique de la fameuse « fracture française » décryptée par le géographe Christophe Guilly, lui aussi bien à gauche (Libération lui a déroulé le tapis rouge) qu’à droite, ou l’ouvrage un tantinet austère est devenu le livre de chevet des néo-réac à la Zemmour et cie, jusqu’au cercle intime du président en campagne. Dans Marianne, le chercheur résume simplement son analyse : « Apparaît alors un pays à la géographie sociale fracturée entre une « France métropolitaine » hyper adaptée à la mondialisation et une « France périphérique » à sa traine. La première est dominée par la gentrification et l’immigration. (…) De façon caricaturale, à l’université comme dans les médias, s’est imposé un paradigme faux : les banlieues concentrent tous les problèmes, sous entendu, il n’y en a pas ailleurs. Au-delà, émerge une France périphérique où se concentre à présent la majorité de la population et parmi elle, le gros des troupes des classes populaires touchées par la pauvreté, le chômage, le travail peu qualifié, le mal logement. » Au passage, ce sont les mêmes territoires qui élisent massivement des collectivités de gauche par besoin de protectionnisme, cette fois-ci social, c’est-à-dire de service public, un protectionnisme qui ne se limite pas uniquement aux frontières mais déborde aussi dans la vie quotidienne. Et qui dans le foot se nourrit d’une vision patrimoniale d’un sport à l’ancienne, idéalisée dans les associations de sous-préfectures qui fournissent le gros des divisions inférieures, ces US et AS qui subsistent largement grâce aux subventions des communes et des conseils généraux.

Les smicards du foot pro

En gros, cette vision de la société française, projetée dans le petit monde du ballon rond, se manifesterait entre autres avec l’antagonisme silencieux, car occulté par l’idéal officiel de la FFF d’un seul foot à l’image d’une république indivisible, entre le foot des cités, avec tous ses travers supposés (communautarisme, buffet hallal, islamisation des joueurs, violence, le tout arrosé de subventions de la politique de la ville) et dont le débouché naturel se situerait dans les grands clubs des grosses agglomérations (Psg « islamisé » , OM « immagrationiste » ou encore OL « mondialiste » ), contre celui des petits clubs « près de chez vous » (exception de Strasbourg et de Nantes, supposons) qui se démènent seuls, avec humilité et avec les bons noms et prénoms. La finale de samedi sert donc de métaphore absolue, mettant face à face le Petit-Quevilly (21 000 hab), lieu de naissance de Franck Duboscq et Patrice Rio, qui offrit 18,86% de ses voix à Marine Le Pen contre Lyon (479 000 hab) ou le FN atteint péniblement les 9,87%.

Toutefois, le foot permet aussi de nuancer cet imparable et apparente pesanteur des statistiques et des cartes électorales. Car les fameuses zones rurbaines sont aujourd’hui elles aussi traversées de « mixité » et d’aspiration d’ascension sociale, y compris de la part de populations issues de l’immigration. Et si les clubs de National et de CFA réussissent en coupe, ils le doivent également au fait d’être largement approvisionnés par les surplus des centres de formation, bref des smicards du foot pro pas si éloignés dans leurs origines et leurs aspirations de ceux qui crient d’effroi en L1 devant la taxe Hollande à 75%…

Dans cet article :
Roberto De Zerbi, apprentissage incontrôlé
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Nicolas Kssis-Martov

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