A la découverte du Red Star Lab

15h30, température négative, rendez-vous au club house du Stade. Le planning est simple : discours de Patrice Haddad, président du club, et Richard Descoings, boss de Sciences Po, petit tour sur les terrains, puis retour au chaud pour un casse-croûte. La salle est quasi-vide, les chaises alignées, les gobelets jetables en place sur le bar pour le gueulton. En attendant, on se plonge dans les souvenirs. Accrochée au mur, on reconnaît la photo de Steve Marlet en DH (août 91) sous le maillot du Red Star et la trogne de Rudi Roussillon version eighties, sans son sous-pull. Tout d’un coup, c’est l’ébullition. Un photographe en doudoune mitraille. Avec ¾ d’heure de retard, le crew de Richard Descoings déboule, en costumes-cravates-boléro, la classe. Le frère de Patrick M’Boma, Alain, entraîneur des séniors, arrive aussi : « On va au fond, comme à l’école » . La conf’ débute.

« Les talents sont partout »

Le projet n’a pas l’air de sonner creux. Patrice Haddad, également PDG de Première Heure, société de films publicitaires, souhaite créer une passerelle entre les arts numériques et la pratique sportive sous forme d’ateliers artistiques : le Red Star Lab. Sciences Po doit auditer le projet et fournir des recommandations pour le rendre pérenne. « Les talents sont partout, et Sciences Po veut aller à leur rencontre » rapporte Descoings. « Très peu feront du foot leur métier. On doit les ouvrir à d’autres horizons » ajoute Haddad et ses lunettes de soleil. Les ateliers du Red Star Lab ont déjà débuté sous la houlette de Djeff Regottaz : fresque murale éphémère, stop motion ou reconstitution vidéo des meilleurs souvenirs footballistiques des jeunes. Conf’ terminée, pas de question, place aux solennelles signatures. L’homme-doudoune refait surface.

« La politique m’a appris à serrer les mains »

Les 13 ans de Soumah jonglent de la tête. Même le gardien, Khalil, gère le cuir. « C’est une génération très talentueuse » confesse Patrice Lecornu, directeur sportif du club. Soumah invite ses jeunes à rencontrer le crew Descoings. En file indienne, Khalil et sa bande, polis et bien éduqués, serrent les pinces. Un cliché de moins, c’est ça de pris. Un jeune membre du conseil municipal est content : « Ça tombe bien, on m’a appris comment serrer les mains depuis que je fais de la politique, je viens de le mettre en pratique » . Et un cliché en plus. Si seulement la politique ne se résumait qu’à serrer des mains… Petite photo de groupe et les costards-cravates rentrent au chaud. Ils n’assisteront pas à la fin de l’entraînement. Pourtant, il y avait matière à mater. Ça joue propre, juste. Un petit black gaucher décoche une chouquette de 20 mètres en lunette. Et ouais Gédéon, ne jamais dégager dans l’axe, le B-A-BA.

« Fiers d’appartenir au Red Star »

Retour au club-house. Descoings et son sourire à la François Damien ne s’éternisent pas, malgré le champagne-macarons au menu. Son chauffeur l’attend dans la 607 garée devant Bauer. Les jeunes arrivent 30 minutes après dans une salle quasi-déserte –dommage– et prennent leur goûter. « Excusez-moi monsieur, vous savez où est la poubelle ? » . Bah ouais, les macarons, ça passe pas. Khalil, qui n’a pas l’air d’être la dernière des truffes, nous parle du Red Star Lab : « On se connaît mieux maintenant, ça nous sert pendant nos matches. Ça nous rend surtout fiers d’appartenir au Red Star » . Et il retourne auprès de ses potes, mais pas pour longtemps. Un petit jeune d’1m70 n’a manifestement pas bien digéré le goûter. « C’est abusé, t’as le cul pourri ou quoi ? » . Cette sortie lyrique ponctue l’après-midi. Jules Rimet, fondateur du club, doit jubiler. Il voulait que ce Red Star fasse « travailler le corps et éveille l’esprit » . On en prend le chemin.

Par Ronan Boscher