- Français de l'étranger
«A côté, je travaille chez Arcelor Mittal »
Pierre-Olivier Piskor, 26 ans, « like Rémi Gaillard et Sexion d'Assaut », est passionné de chasse et tire sur les défenses du Luxembourg avec le FC Differdange 03. Un homme rare, quoi.
Tu reviens de blessure, comment ça se passe ?
C’est dur. Je me suis blessé vers le 15 août et j’ai recommencé à courir le 1er décembre. Juste courir. J’ai repris l’entrainement le 10 janvier. J’ai été plâtré donc ma jambe est restée inactive pendant 4 mois. Du coup, il y a des petites douleurs qui apparaissent.
Tu assistes à tous les entrainements ?
Oui. Enfin sauf là, en début de semaine parce que ma fille, Yelena, est née le week-end dernier.
Félicitations… Tu as toujours joué au Luxembourg ?
Non. J’ai joué en France de 5 à 19 ans. A l’US Jarny, puis à 13-14 ans, au FC Metz. J’avais déjà cinq entrainements par semaine. Et puis, je suis retourné à Jarny pendant 2-3 ans et je suis allé à l’US Batilly. Là, il n’y avait plus que deux entrainements par semaine. Vers 17 ans, j’ai failli arrêter le foot. C’était un échec de pas avoir réussi à percer au FC Metz. Et puis, un concours de circonstances à fait que je suis parti au Luxembourg. Je sortais avec une fille dont le beau-frère jouait là-bas. Je lui ai demandé s’il y avait moyen que je tente. J’ai fait un essai à Rodange, ils m’ont pris.
La vie au Luxembourg, ça te plait ?
En fait, je joue au foot au Luxembourg, je travaille au Luxembourg mais je vis en France. La vie au Luxembourg, elle est chère, quoi. Faut pas se voiler la face. Sinon, je me lève à 4h30 – je fais 6h-14h – et je vais à l’entrainement le soir. Quasiment tous les jours, sauf, parfois, il y a le jeudi qui saute. Mais en plus, là, avec la naissance de ma fille, les nuits sont courtes.
Tu travailles dans quoi ?
Arcelor Mittal, la sidérurgie.
Et le championnat luxembourgeois – la BGL Ligue – c’est comment ?
Y a Dudelange et le reste du monde. Ils ont donné un exemple tout simple en battant Wiltz 15-0. C’est la honte pour le Championnat. En Ligue 1, on verra jamais Lille mettre 15-0 à Avignon. Je sais pas, moi, je suis coach, je sors trois mecs et terminé, on perd seulement 3-0. C’est vraiment honteux. Je trouve pas ça beau. Mais en même temps, quand on voit les infrastructures de Dudelange et les moyens matériels et financiers qui sont mis à leur disposition, c’est le minimum pour eux de faire un doublé. Si nous, à Differdange, on avait la même chose, on serait sûrement pas troisième.
Vous avez quand même remporté la Coupe la saison dernière.
Oui, ça fait plaisir. Perso, j’ai remporté deux titres il y a deux ans : celui de meilleur buteur (30 buts en à peine vingt matches en 2008-09, ndlr) et celui de meilleur joueur du Luxembourg.
Et ça a changé quelque chose dans ton parcours ?
Pour moi, personnellement, non, mais pour les autres, oui. Forcément, les gens ont une image. Et, c’est pas pour me lancer des fleurs mais quand ils parlent des attaquants, ils citent Da Mota, Huss et Piskor. Même si je marque moins. On peut pas mettre 30 buts chaque saison. En plus, cette année-là, je n’ai pas eu de blessures. J’ai pas été blessé pendant 21 ans, d’ailleurs. Mais depuis, j’en ai eu deux : fractures de la malléole et du péroné.
Tu n’as jamais eu envie d’avoir la nationalité luxembourgeoise ? Ca t’aurait peut-être permis d’aller en sélection.
On m’a jamais demandé si je la voulais. Et puis il faut vivre au Luxembourg depuis 6 ou 7 ans et parler luxembourgeois. Mais en même temps, il y a déjà tellement de bons attaquants. Joachim, par exemple. D’ailleurs, c’est bizarre qu’il ait pas un club pro, lui, avec la carrure qu’il a. Mais être attaquant, c’est dur au Luxembourg. Il faut toujours courir, courir, pour au final toucher trois ballons. Quand t’es attaquant au Luxembourg, la priorité, c’est défendre. On joue tous derrière en bloc et on attend un contre pour partir. C’est pas le foot que j’aime. Mais l’équipe du Luxembourg est loin d’être ridicule, devant la France par exemple. Pour des mecs qui vont bosser le matin et s’entrainent le soir, ils se sont bien débrouillés. Même s’ils étaient onze derrière, quoi. S’ils n’avaient pas pris de carton rouge, ça n’aurait pas été pareil. Il n’y a plus de gros écarts avec les autres équipes. La sélection évolue en bien.
T’as pensé quoi d’autre de France-Luxembourg ?
Dans tous les cas, j’étais gagnant. C’était soit mon pays, soit le pays dans lequel je joue qui gagnait (rires). Mais j’étais content qu’il y ait des potes à moi qui jouent, c’est surtout ça.
Quels joueurs du Luxembourg la France doit-elle craindre pour la rencontre du 25 mars ?
(Rires) « Craindre » , c’est un peu fort. Y a le petit Payal, Da Mota qui est en pleine réussite ou Schnell. C’est des chiens sur le terrain. Après, y en a qui devraient revenir. Kintziger par exemple. J’ai pas compris pourquoi il était sur le banc la dernière fois. Peut-être que ça marche à la tête avec le nouveau coach, c’est souvent comme ça. Y a des jeunes aussi qui devraient être là mais les places sont très chères. Surtout que c’est pas souvent que le Luxembourg peut jouer contre la France. D ‘habitude, c’est la Biélorussie ou des trucs comme ça. Des équipes de second plan. Ce qui est bien avec le Luxembourg aussi, c’est que le plus gros déplacement national, c’est 60 km .
D’autres loisirs en dehors du foot ?
La chasse, depuis l’âge de 8-10 ans. En plus, j’aime bien les armes à feu donc ça fait d’une pierre deux coups. Mais je ne peux pas y aller souvent. La saison de chasse c’est de septembre jusqu’à fin janvier à peu près. Je peux y aller en décembre, en fait. En plus, c’est un loisir qui coûte cher. Et puis le coach ne me laisserait pas y aller. Si je lui demande une journée pour aller à la chasse, après, pendant six mois, je joue plus. (Rires)
Comment définirais-tu ton style de jeu ?
Pour l’instant, j’en ai plus (rires). Mais, plusieurs fois, on m’a dit que j’avais pas le style de mon poste. Tous les attaquants courent. Moi j’aime pas trop. Un attaquant est là pour marquer des buts, il ne doit pas courir beaucoup comme les milieux de terrain. Il doit être là au bon moment, à la bonne place et garder des forces pour mettre le ballon dans les cages. Les premières années, j’avais une certaine liberté, on me disait de jouer comme je voulais. Mais après, on m’a demandé de courir plus, de défendre. Je déteste défendre. Quand je suis arrivé au Luxembourg, à Rodange, on m’a fait jouer libéro et même arrière gauche. C’est un comble ! Mais l’Humain est capable de beaucoup de choses. Pour jouer, on est prêt à tout. Si le coach me dit « Tu es gardien ou tu joues pas » ben, ok, je vais dans les cages.
En 2008, un site luxembourgeois te comparait à Gerd Muller.
Non mais Muller, c’était un taulier à l’époque. On peut pas comparer. De toute façon, des très bons attaquants, y en a pas 1000. Y a Inzaghi, Muller, Ronaldo – pas Cristiano, le Brésilien – ou Papin. Muller, c’était la classe. Même si, en jouant avec Beckenbauer, y a pas trop de mérite.
Concernant ton physique, tu n’as pas vraiment celui d’un footballeur classique…
Je devrais faire 5 kg de moins. Mais j’ai un rythme de vie qui ne me permet pas d’avoir une bonne alimentation. Je me lève à 4h30, je reviens le soir après l’entrainement, il est 21h… D’ailleurs, pour ça, faut trouver une compagne qui accepte.
Dans quel club de Ligue 1 aurais-tu aimé évoluer ?
Marseille ou Lens, ne serait-ce que pour les supporters. Ca doit être terrible de jouer devant 40 000, 50 000 personnes. C’est énorme. Une fois, j’étais allé voir Marseille-Liverpool, c’était impressionnant. Au Luxembourg, ils disent qu’il y a 1000 abonnés mais bon, on joue devant 500 personnes. En plus, avec un Championnat coupé en deux, c’est difficile de ramener du monde. On sait très bien que Dudelange va gagner le championnat la coupe et voilà. En tout cas, la chance qu’on à a Differdange, c’est que c’est le club qui a le plus d’internationaux.
Et à l’étranger ?
Le championnat allemand.
Tu comptes aller jouer ailleurs qu’au Luxembourg ?
Tu veux que j’aille où ? (rires) Non mais à 26 ans, c’est mort pour une carrière pro. Faut pas se voiler la face. En plus, ici, t’as beau être le meilleur buteur avec 30 buts, c’est 30 buts dans le championnat luxembourgeois. Tu peux même en mettre 60, ça sera toujours 60 dans le championnat luxembourgeois. Payal, Bettmer, Joachim, eux ils pourraient être pro. Ils ont le physique. Mais bon, faut connaître la bonne personne, être là au bon moment. C’est comme tout dans la vie, faut avoir de la chance.
Propos recueillis par Noémie Pennacino
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