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5 raisons de ne pas croire au fair-play financier

Par Nicolas Kssis-Martov
5 raisons de ne pas croire au fair-play financier

Fini de rire. Michel Platini le répète sur tous les tons, avec des accents keynésiens et des sanglots coubertiniciens, le temps du grand n'importe quoi est fini-fini dans le football pro européen. Sinon gare au krach tant annoncé, voire à la fin de la poule aux œufs d'or. Bref, à l'apocalypse dans les stades chèrement rénovés de l'Euro 2016.

Amis millionnaires à crampons et milliardaires russes ou qataris, le vieux continent traverse une crise économique plutôt désagréable qui ébranle même les sacro-saintes dépenses sportives (la ville de Rome vient de retirer sa candidature aux JO, une première!). Le président de l’UEFA a certes de bonnes raisons de s’alarmer. Le dernier rapport sur l’état des finances prédit que le plafond de 2 milliards d’euros de pertes sera surement explosé cette année (1,64 lors du dernier exercice) et que les championnats européens traînent un boulet de 6,9 milliards de dettes globales. De quoi provoquer la catatonie de n’importe quelle agence de notation. Alors celui qui aime se présenter comme le « seul couillon » à vouloir y mettre un terme, promet pour bientôt l’épiphanie régulatrice. Le fair-play financier devrait donc marcher à plein en 2013. Toutefois, adopté en 2010, on a pris le temps de la réflexion. D’ailleurs, entre 2013 et 2015, les clubs pourront continuer à cumuler 45 millions de trou budgétaire (contre une norme de 5 millions), puis 30 jusqu’en 2018. Après, il ne faudra pas dépenser plus qu’on ne gagne. Oui mais est-ce que cela va changer quelque chose ?

1) Cela ne va pas rééquilibrer le rapport de force

Voici le principal objectif affiché. Redonner un peu de sel sportif aux ébats de la Champions League en arrêtant de voir toujours les mêmes clubs truster les demi-finales à coups de déficit et de sur-endettemment. Seulement, les gaps financiers, et donc dans le recrutement, ne vont pas s’amoindrir. Cela conduira peut-être juste à un peu plus de sagesse et de retenue sur le marché des salaires. Peu de craintes pour les meilleurs et les stars, la baisse des couts salariaux se réalisera surtout sur le dos, ici comme ailleurs , des « bas salaires » … Enfin la position dominante du foot anglais, acquise de longue date et se traduisant notamment dans l’importance des droits télé à l’étranger (un tiers de son milliard de rente). Dur d’inverser ce genre de tendance historique, puisqu’en moyenne 35% des revenus du foot proviennent de la télé. Enfin, la rigueur ne sera pas assumée de la même façon d’un pays à l’autre, notamment au regard d’un certain inégalitarisme des mécènes, qui ont déjà comblé par le passé 3,4 des 4 milliards de pertes. Comme pour la DNCG, bien plus cruelle en National et en CFA qu’en L1 et L2 poussant à une certaine constance de l’élite (ce qui rassure par ailleurs les sponsors, 25% des revenus), les gros championnats qui attirent les bienfaiteurs généreux ont les moyens de camoufler le problème. « L’équilibre des pouvoirs ne sera que très légèrement modifiée en Europe,renchérit Bastien Drut, auteur de « L’économie du football professionnel » (Ed. La découverte).Les clubs anglais, le Real Madrid, le FC Barcelone et quelques clubs italiens auront toujours des recettes bien plus importantes que les clubs français : il ne faut donc pas s’attendre à ce que ces derniers gagnent la Ligue des Champions lors des prochaines années » .

2) L’origine des fonds n’est pas si obscure

Derrière la volonté de rationaliser la dimension « capitaliste absurde » du football pro, se cache aussi l’idée que ceux qui poussent à la folie manipulent des sommes aux origines douteuses ou « anormales » . Or, à bien y regarder, et sauf exception, l’argent des oligarque russes ou des émirs n’a rien de si condamnable à l’aune des règles de la finance internationale. En tout cas pas, davantage que ceux des fonds de pensions américains ou autres acteurs du BTP du Nord de la France. L’argent continuera à couler à flot et en toute légalité, comme si le capitalisme rimait avec éthique spinozienne ou morale kantienne.

3) Les grands ou « gros » clubs ne seront jamais sanctionnés

Comme nous l’avons dit, l’instauration du fair-play va encore s’étaler sur 5 ans avec beaucoup de latitude afin de permettre aux clubs de continuer un petit temps, histoire de consolider leur situation, de rééquilibrer les comptes, de trier entre les joueurs. Ensuite, une fois que les pertes et les dettes auront été épongées, seuls les petits championnats et les clubs modestes, sensés bénéficier du rééquilibrage des forces et ainsi rebooster le hasard sportif, auront le plus grand mal à répondre aux nouveaux critères, plombés également, comme en Grèce, par la crise. Le marché des transferts s’asséchera pour la masse, et comme dans toute régulation de type libérale – c’est à dire visant à protéger les entreprises surtout -, les soutiers en seront de leur poche…

4) Impossible de moraliser un capitalisme sportif

L’une des pierres d’achoppement les plus graves tient surtout aux problème de fond. Faute d’une véritable architecture européenne, politique et économique, cohérente et harmonisée, il s’avérera très compliqué et délicat de rendre efficientes des règles générales, plaquées sur un tel patchwork de situations nationales. Sans convergence réglementaire globale (fiscales, monétaires, législatives..), impossible d’importer le fameux modèle américain tant vanté avec son salary cap et ses ligues fermées. Le foot ne meurt pas de lui-même, il peut même nager à contre-courant : il faudrait l’effondrement de son infrastructure étatique et sociale, pour qu’il commence à vaciller. De la sorte, sa régulation ne pourra faire l’impasse au préalable d’un véritable gouvernance européenne, et quand on sait l’écart entre UE et UEFA (par exemple la Turquie), c’est pas gagné…

5) Il existe déjà mille et une façon de le détourner

« Par ailleurs, l’hyper-mécénat des milliardaires russes, émiratis ou indiens,explique encore Bastien Drut, a déjà commencé à se transformer : leurs fonds ne seront plus utilisés pour acheter des joueurs sur le marché des transferts mais serviront à construire de nouveaux stades, des centres d’entraînement et des succursales aux quatre coins du monde pour pouvoir détecter les grands joueurs de demain. En effet, les dépenses « hors football » ne sont pas concernées par le fair-play financier » . Enfin toutes les dettes ne se valent pas. Celles contractées pour acheter ou construire son stade produit de l’actif quand les masse salariales qui engloutissent jusqu’à 100 % des revenus creusent la tombe du club.

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