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40 choses que le foot doit à Canal+
Canal+ souffle sa quarantième bougie ce lundi et il paraît évident que de nombreux footeux seront conviés à la fête tant l’histoire de la chaîne cryptée est liée au ballon rond. En 40 ans, il y a bien eu ce divorce cinglant avec la Ligue 1, mais, au moment de célébrer un anniversaire, mieux vaut se souvenir des bonnes choses.
1/ Faire d’un match de Nantes un événement chaque année. Même si, au fil de saisons, le FC Nantes a largement perdu de sa superbe, la réception de l’AS Monaco reste l’occasion de se rappeler le 9 novembre 1984 et la première diffusion d’un match de football sur les antennes de Canal+. Michel Denisot aux commentaires, Vahid Halilhodžić buteur et victoire nantaise, il y a de quoi être nostalgique quand on est canari.
2/ La palette à Doudouce. Avant que Twitter ne fasse apparaître une génération ne jurant que par la tactique, Philippe Doucet avait révolutionné le genre en sortant des palettes graphiques innovantes. D’abord moqué dans les locaux, le journaliste est ensuite devenu une référence.
3/ Les Yeux dans les Bleus. Le documentaire que tous les Français ont vu au moins trois fois est né d’une idée de la chaîne. Stéphane Meunier a enfoui sa caméra au plus près des acteurs du sacre de la Coupe du monde 1998 pour que l’on puisse dire qu’il faut muscler son jeu, réciter le discours d’Aimé Jacquet contre la Croatie ou chanter qu’on ira tous au paradis.
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4/ Obliger les équipes à entrer pied au plancher. Se faire humilier sur une chaîne cryptée permet de limiter la portée. Mais prendre un but en clair relève de la honte maximale, lorsque les téléspectateurs sont justement nombreux à profiter des quelques minutes avant que l’image ne soit brouillée. Steve Mandanda était alors le gardien préféré de ceux qui ne payaient pas.
5/ Briser l’intimité du vestiaire. Charles Biétry avait dû négocier longtemps avec Rolland Courbis, mais embarquer la caméra dans le vestiaire toulonnais à la mi-temps de la rencontre contre Tours, en 1985, avait permis de se rapprocher au plus près des joueurs. Notamment de Laurent Paganelli alors en pleine séance de massage. Quinze ans plus tard, le président monégasque Jean-Louis Campora fêtait le titre en plongeant dans le bain à remous seulement vêtu d’un peignoir, grand ouvert. Une autre époque.
6/ Populariser la Ligue 1. Toutes ces histoires permettent de mettre en lumière les belles années communes passées entre Canal+ et le championnat de France. De novembre 1984 à mai 2024, la diffusion a fait entrer Mickaël Landreau, Daniel Congré ou encore Jérôme Leroy dans les foyers français et a indéniablement fait aimer le foot à quelques réticents. Avant de demander un compte Netflix, il fallait demander des codes Canal+ pour Sochaux-Nancy.
7/ Apprendre l’existence de Mediapro. Après l’idylle, le divorce a été fracassant, mais il faut remercier la chaîne d’avoir fait connaître l’entreprise audiovisuelle espagnole et son hilarant patron Jaume Roures. Vraiment pas égoïste, Canal+ a ensuite permis aux Français de profiter des séries de Prime Vidéo et leur a fait découvrir Telegram pour éviter de payer DAZN.
8/ La caméra paluche mise dans les filets pour des buts de l’intérieur. Il y a aussi eu les caméras stylo, kiwi, ouistiti, la caméra placée aux 6 mètres, la caméra opposée sur les entraîneurs, la loupe, la superloupe, la spidercam, l’air cam, pour des plans serrés, rapprochés, larges derrière les buts, vus du ciel, des ralentis… À la pointe, toujours.
9/ Rendre l’Angleterre bleu, blanc, rouge. Depuis 1997, Canal+ diffuse quasi exclusivement la Premier League (TPS avait les droits de 2004 à 2007 et RMC de 2016 à 2019). De quoi suivre les Frenchies Thierry Henry, Sylvain Distin ou Jean-Philippe Mateta.
10/ Se mettre à l’heure d’Europe. Quoi de mieux que d’obtenir les droits de la Ligue des champions pour garder les fans de football dans sa poche ? Après avoir abandonné la plus prestigieuse des compétitions de 2018 à 2021, la chaîne cryptée est revenue en force pour faire honneur à son passé polyglotte. Le mardi et le mercredi, c’est François Marchal qui donne la leçon.
11/ L’Équipe du dimanche. De 1990 à 2016, il était impensable d’aller se coucher avant d’avoir vu les résumés et l’intégralité des buts des championnats anglais, espagnol, italien et allemand. Pour commencer parfaitement la semaine, mieux vaut terminer le week-end avec une chute de Jean-Charles Sabattier. Voir ressurgir un extrait de l’émission est aussi toujours l’occasion de penser à Alessandra Bianchi et à sa voix mythique.
12/ Faire croire que tous les championnats se valent. Dans cette quête d’internationalisation, la chaîne s’est ruée sur la Saudi Pro League. Sans succès.
13/ Rendre les statistiques importantes. Comme pour la tactique, Canal+ a été un pionnier au moment de faire de la place pour les chiffres à l’antenne. D’abord cantonnées à la possession et au nombre de tirs, les données évoquent désormais les expected goals ou la live win probability. Doudouce à l’accent anglais.
14/ Répéter les blagues de Julien Cazarre. Qui n’a jamais imité Geoffrey Jourdren, chanté à la gloire de Cheick Diabaté ou tout simplement cherché une coccinelle dans la pelouse ?
15/ Le but de Patrice Loko commenté par Thierry Gilardi. Le plus beau but de l’histoire du championnat de France par le meilleur commentateur du pays, ça donne un karaoké entonné par la Beaujoire : « C’est fa-bu-leux, c’est ex-tra-or-di-naire ».
Il y a 12 ans jour pour jour le commentateur sportif Thierry Gilardi nous quittait. RIP 🙏 Le bon moment pour ressortir ce but d'anthologie… Loko-Pedros Pedros-Loko c'est fabuleux ❤️pic.twitter.com/gGN6mVp3EC
— Ablinho 🔰 (@Ablinhoo) March 25, 2020
16/ Parler de Grégoire Margotton et de Christophe Dugarry au moment d’évoquer les plus grands duos de l’histoire. Bonnie and Clyde ? Connais pas, ils n’avaient qu’à commenter le 5-5 entre Lyon et Marseille.
17/ Prouver que commenter n’est pas donné à tout le monde. Débutée en 2023, l’émission Au Micro a au moins eu le mérite de montrer que ce n’était pas un métier si facile que ça.
18/ Provoquer la colère de la femme de David Ginola lorsqu’une émission spéciale de L’Équipe du dimanche a été tournée au domicile du joueur. « J’étais rentré de Londres, à quatre ou cinq kilomètres de chez moi, j’avais l’impression de voir une bulle de lumière, comme si un vaisseau spatial s’était posé. Des camions, des câbles qui couraient de partout, ma femme dans tous ses états et qui disait : “Ils m’ont massacré la maison.” » Kevin Keegan posé dans son canapé, c’était quand même la classe.
19/ Trouver la sonnerie de téléphone parfaite : TUTUTUTU TULUTUTU !
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20/ La rivalité OM-Bordeaux. Avant plus de 40 ans de disette des Marseillais sur la pelouse girondine, la chaîne a réussi à façonner une belle histoire de haine. En point d’orgue, l’arrivée de la Cadillac rose de Claude Bez au Vélodrome captée par les caméras et si élégamment racontée par Bernard Tapie quelques années plus tard : « C’est un type qui avait une paire de couilles monstrueuse, qui était un fou furieux dans le bon sens. Un mec qui a fait des choses, quoi ! »
21/ La rivalité OM-PSG. Après Bez, Tapie a pu se frotter à Michel Denisot et Canal+ pour monter le Classique, à savoir des tacles et des bastons dans tous les sens. « Il n’y a aucun plaisir à commenter un PSG-OM, c’était presque à s’en donner des aigreurs, mais ne pas pouvoir le commenter, ça serait une punition », révélait Thierry Gilardi à cause de la tension autour de la rencontre.
22/ Le Canal Football Club. À partir de 2008, l’élève a pris le dessus sur son maître L’Équipe du dimanche. Plutôt que Harry Roselmack sur TF1, les foyers français ont eu droit, en clair, à Hervé Mathoux, avant le dernier match de la journée de Ligue 1. Et quand on ne dit plus que tes initiales pour t’appeler, c’est que tu pèses dans le game.
23/ La chute de Pierre Ménès. Dommage, il y a aussi eu son ascension.
24/ Légitimer les hooligans. Toujours partant pour repousser les limites de l’expérience télévisuelle, Charles Biétry a grimpé au cœur du Kop of Boulogne afin de discuter avec des skinheads. Le journaliste « est sorti choqué de cette tribune avec la moitié du casque abîmé », d’après Michel Kollar, historien du PSG, mais le ver était déjà dans le fruit.
25/ Les marionnettes des Guignols. Le foot a dû cohabiter avec l’autre programme phare de la chaîne cryptée et ses acteurs ont donc été contraints de passer par la case caricature. Avant Julien Cazarre, les équipes d’Alain De Greef et Alain Duverne ont provoqué la colère de quelques footeux, à commencer par Jean-Pierre Papin, accompagné de ses fameuses « pralines » et « cacahuètes ». Reviens JPP !
26/ À la Clairefontaine. Dans la foulée des Yeux dans les Bleus, le documentaire était en vogue à Canal+ et filmer les premiers pas de jeunes pousses à l’INF Clairefontaine a donné un objet tout aussi culte. L’occasion de voir les adolescents Abou Diaby et Hatem Ben Arfa s’embrouiller et en venir aux mains.
27/ Les vignettes. Elles n’ont pas duré assez longtemps au goût des puristes, mais les joueurs ont dû être bien contents d’arrêter de passer devant la caméra avant le match. Le trombinoscope en Top 14 avait pris le relais, avant de passer aussi à l’histoire ancienne.
28/ Rythmer les fins de week-end de Jean-Pierre Bacri. L’acteur invitait ses amis dont Olivier Doran, Pierre Lescure et, parfois, Alain Chabat qui n’est pas passionné de foot, à se poser chaque dimanche soir devant le match phare de Ligue 1. Comme beaucoup de gens jusque-là, mais lui coupait le son des commentateurs pour mettre West Coast, Dr. Dre ou encore Snoop Dogg à fond. Sympa pour les voisins et Stéphane Guy.
29/ Ne pas oublier les Girondins de Bordeaux. Tomber sur des archives de ce club de National 2 permet de se souvenir du match à Dniepropetrovsk en 1985 qui a emmené plus de 15 000 abonnés au lendemain du tir au but de Fernando Chalana, de la victoire face au Milan en 1996 qui a provoqué un orgasme à Michel Platini ou encore du but de Yoann Gourcuff contre le PSG commenté par Grégoire Margotton.
30/ Mettre fin à la Coupe de la Ligue. Après un monopole de 20 ans de France Télévisions, Canal+ a récupéré l’intégralité des droits en 2016 et il n’a suffi que de quatre petites années pour que la LFP supprime la compétition.
31/ Jour de foot. Si cette émission est moins reconnue, elle n’en reste pas moins essentielle puisqu’elle sert de centre de formation aux journalistes de la chaîne. Les jeunes Christophe Josse, Denis Balbir ou Philippe Genin sont passés par les commentaires de résumés en deuxième partie de soirée du samedi.
32/ D2Max. Celle-ci, il n’y a que les dingues de deuxième division qui s’en souviennent. Et Alexandre Ruiz qui y a commencé.
33/ La pub la plus émouvante. Pour lancer de la meilleure des manières le Classique de février 2016, il fallait un stadier fanatique de l’OM. Parfois, il vaut quand même mieux avoir le dos tourné que voir la défense marseillaise sur le but vainqueur d’Ángel Di María.
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34/ Avoir fait fuir Jean-Michel Aulas. Ceux qui peuvent se vanter d’avoir fait pâlir l’historique président de l’OL ne sont pas nombreux, mais l’équipe du Canal Football Club en fait partie. En 2008, il avait pris la mouche après un portrait peu flatteur diffusé durant l’émission. « Il répond brièvement à trois questions et une fois la pub lancée, il quitte le plateau en disant : “Si c’est pour me faire insulter, je n’ai aucune raison de rester.” On lui court après dans les couloirs, plus personne de Canal n’est en studio pendant l’interruption. Éric Besnard s’accroche à lui et à ses accompagnateurs », raconte Hervé Mathoux à L’Équipe. Après une course contre la montre, l’invité est finalement revenu, mais le cœur n’y était plus.
35/ Apprendre à se servir de la prise péritel. Puis galérer avec MyCanal.
36/ La qualification de l’OM en demi-finales de Ligue des champions 1991. À deux minutes du terme du quart contre l’AC MIlan, deux projecteurs du Vélodrome tombent en panne. Les Italiens tentent de quitter la pelouse pour obtenir une victoire sur tapis vert, mais un assistant de Jean-Paul Jaud, réalisateur de Canal+, s’est chargé de rétablir l’électricité et a permis à l’épopée phocéenne de continuer.
37/ Les commentaires de Stéphane Guy. Surtout ceux à 3-1 pour le Barça face au PSG.
38/ Offrir une belle reconversion aux retraités. Il y a eu trois Ballons d’or français : Michel Platini, Jean-Pierre Papin et Zinédine Zidane, mais la grande famille des consultants compte aussi Patrick Mboma, Bruno Irles ou encore Pascal Dupraz… Il faut dire que les commentaires de Franck Sauzée chaque samedi après-midi nous manquent terriblement.
39/ Laurent Paganelli. Son aventure avec Canal+ avait démarré sur une table de massage, elle continue toujours aujourd’hui. Son sourire a fait de lui une figure iconique de la chaîne et son verbe a permis de réaliser des interviews mémorables dans toutes les langues possibles. D’un vestiaire grand ouvert à des micros fermés, il représente les 40 ans écoulés, mais aussi l’émotion pure et sincère dans un football chloroformé. Grande jugador !
40/ La pop culture. Quoi de mieux que terminer la fête par les paroles d’Alpha Wann et de se donner rendez-vous dans 40 ans : « Pour oublier les problèmes et les troubles, y a le foot, y a Canal. » À tchao bonsoir !
Par Enzo Leanni