- France
- Ligue 1
- 15e journée
- AS Saint-Étienne/Lyon (3-0)
20 ans après, Saint-Étienne châtie Lyon
Grâce à un 5-3-2 tout terrain et à une anesthésie enfin transformée en grosse envie face à Lyon à la maison, l'AS Saint-Étienne s'est imposée dimanche soir dans la 109e manche du derby rhonalpin (3-0). L'emprise lyonnaise dans le Forez, qui datait du 6 avril 1994, est révolue.
M. Bayal (16′), Van Wolfswinkel (39′), R. Cohade (66′) pour Saint-Étienne
Sainté met fin à 20 ans d’occupation
Lacazette a raté son penalty, et Despeyroux et Mendy ont fait des petits. Les derniers buteurs à avoir offert un derby aux Verts, en 1994, avant deux décennies d’hégémonie gone, peuvent enfin dormir sur leurs deux oreilles : c’en est fini pour eux des interviews à donner pour raconter d’année en année les mêmes buts et le même succès, avec les mêmes détails, façon Père Castor devant un malade d’Alzheimer. La victoire-relique d’il y a vingt ans n’en est plus une, les héritiers sont tout trouvés. Des héritiers victorieux dont les grands artisans se nomment Max-Alain Gradel et Christophe Galtier. Ce dernier a pourtant été volontiers taxé de frileux en couchant sur le papier un 5-3-2 avec trois baraques dans l’axe, tout en laissant les seuls Cohade, Van Wolswinkel et Gradel traiter des négociations offensives. Ce schéma lui a pourtant permis de présenter une solidité doublée de solidarité nécessaire face à la troisième attaque de L1, tout en n’empêchant pas les siens d’aller chercher Gonalons et ses partenaires dans leur camp pour annihiler leurs constructions propres et léchées. Quant à l’Ivoirien, il a tout bonnement été le détonateur dans les zones de vérité que l’ASSE cherche depuis des mois, elle qui n’a pas été capable de marquer plus d’un pion en 90 minutes depuis 19 rencontres. Virevoltant et insouciant, il a été tout simplement l’homme du match en délivrant deux assists et coupant ainsi les pattes adverses avant la pause : sur corner pour Sall, puis sur un deux-contre-un pour Van Wolfwinkel. Max-Alain a pris du grade et la double prime.
Gradel colonel, Biševac à la ramasse
C’est d’ailleurs lui qui était à l’origine des premiers frissons au bout de dix minutes de jeu, pendant que le bloc forézien sautait à la gorge de son ennemi intime, avec une agressivité annihilant la plupart des tentatives de l’arrière-garde lyonnaise pour ressortir propre. Après une des nombreuses fébrilités de Biševac obligeant Bedimo à dégager de la tête sous la pression, Gradel récupérait le ballon au coin gauche de la surface et servait Ricky. Poteau droit suite à un plat du pied décroisé et première chaleur pour le roi Lyon. Six minutes avant que le corner rentrant de Gradel ne soit percuté violemment par le front massif d’un Sall arrivé tel un Boli téléporté de l’an 1993 pour une conclusion puissante sous la barre (1-0, 17e). Une puissance qui migrait dès lors vers les virages pour soulever un puissant rugissement et une moiteur ressortis des livres d’histoire. Un cri qui extirpait le bloc d’Hubert Fournier de sa torpeur. Et la première installation dans le camp local allait presque être la bonne pour lui et son groupe, après cette passe presque chanceuse de Jallet pour Fekir aux six mètres, lequel s’emmêlait pour laisser Ruffier se rapprocher trop près et lui boucher l’angle. Comme si la bête ne savait plus trop comment croquer sa proie préférée. Et ce sentiment de prédateur doutant, c’est bien Gradel qui l’a ressenti mieux que quiconque au moment de l’erreur d’appréciation de trajectoire d’un bien triste Biševac pour aller planter un second coup d’épée. Sur un long ballon de Pogba, le Serbe passait tout droit, pas son vis-à-vis qui se retournait à deux mille à l’heure pour aller jouer parfaitement un deux-contre-un. Seul aux six mètres, Van Wolfswinkel inscrivait le second but libérateur et dévastateur avant la pause (2-0, 40e). Le match parfait.
La détresse de Tolisso et Lacazette
Enfin presque, car si Lacazette avait réussi à conclure son slalom autrement que par un poireau dans le bloc supérieur après une minute de jeu dans le second acte, avec une défense trop facile, Saint-Étienne aurait pu finir la partie avec la menace et les miquettes ayant offert tant de buts à Juninho, Benzema, Briand, Delmotte… Sans frais, l’avertissement lançait pour de bon les Verts vers leur Graal, en témoigne la barre de Perrin de la tête sur un coup franc de… Gradel, dans la foulée. Encore deux minutes après, Lopes maintenait ses potes en vie après une frappe sur la gauche de la surface de Tabanou, plein de jus dans son couloir. Mais la hargne lyonnaise en prenait un coup devant les rushs répétés du liliputien ivoirien. Pis, cela laissait place à l’abattement rhodanien dans la dernière demi-heure : d’abord sur ce gros loupé d’un Tolisso à la relance, offrant un boulevard à Cohade, peinard face au but et au portier lyonnais pour ranger la boule qui manquait pour une triplette (3-0, 66e) ; puis sur ce penalty salement tiré à droite du but de Ruffier, coupable d’une une sortie trop risquée sur le tibia de Fekir. Tout pardonné, le CRS de l’ASS’ pouvait se retourner vers le kop et exulter après le raté du meilleur buteur lyonnais, qui se retournait tête baissée. Pendant que Fournier semblait signifier face caméra, avec ce mouvement de tête silencieux : « Mais qu’est-ce que j’ai fait… » Suivent un Ruffier à la parade devant N’jie après un poteau de Lacazette, et des olés, et des olés. Toutes écharpes tendues, les supporters des Verts chantaient leur fierté d’avoir repris leur dû, leurs terres, au terme d’un très beau derby. Celui qui sent la passion et la haine. Celui que l’on aime.
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Par Arnaud Clément