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ACTU MERCATO

100 millions d’euros, émoi, émoi…

Par Nicolas Kssis-Martov
100 millions d’euros, émoi, émoi…

La BBC détient les documents, le président des Spurs Daniel Lévy les leur a filés : le Real a bien payé 100 millions pour le Gallois. Gareth Bale est le transfert le plus cher de l'histoire. Forcément choquant pour un type qui tape dans un ballon. Forcément...

Est-ce qu’un joueur peut valoir 100 millions d’euros ? La question est sur toutes les lèvres et dans les éditos du soir. En période de crise, est-il acceptable de dépenser autant pour les deux pieds d’un footballeur ? Quand la croissance sera revenue, pourra-t-on monter à 150 ? Comme toujours le foot sert une fois encore de défouloir commode pour les belles âmes (un peu) naïves. Dans le capitalisme du XXIe siècle, ce n’est plus le besoin qui détermine la valeur et le coût d’un bien, mais le désir qui s’y accroche (suffit de comparer le prix d’un iPad à celui des autres tablettes). Donc, à ce tarif-là, il n’est pas plus choquant, et pour tout dire tout autant, de débourser 100 millions pour un avant-centre gallois que 11 pour un saisonnier de Lille ou de payer un gars de National 2 500 euros par mois. À vouloir hiérarchiser et moraliser l’économie du ballon rond, on ne fait que classer les taux d’hypocrisie dans les médias et la classe politique.

Il est des domaines où l’argent semble plus vulgaire qu’ailleurs, même aujourd’hui. Où son accumulation est immuablement considéré comme un scandale éthique. Où on se sent obligé de corréler des chiffres surréalistes avec le talent supposé de la personne concernée. Comme s’il était plus honteux de toucher ou valoir des millions à courir sur une pelouse, comme si l’amour de l’art devait seul conduire à se placer devant une caméra (au passage, instaurez un plafond de salaire à 4 000 euros mensuel pour les acteurs, et la moitié du théâtre du Châtelet sera vide aux prochains Césars), que de s’engraisser derrière les bureaux d’un conseil d’administration ou même de cachetonner de conférences en conférences après avoir été président de la République. Les 100 millions de Gareth Bale ne sont pas « hors sol » comme nous avons pu le lire dans Le Monde, ils sont fidèles à une réalité économique qui connaît ses spirales inflationnistes, comme n’importe quel golden parachute de multinationale. Ce monde est aussi réel et « vrai » que celui où l’on discute de la hausse du RSA de quelques euros ou de la rémunération du rédac’ chef de Libé.

« Il les vaut ou il ne les vaut pas »

Ce que nous vivons en ce moment avec cette transaction entre Tottenham et le Real démontre juste que de temps en temps, faute de se poser les questions de fond, nous aimons nous indigner d’une situation exceptionnelle. Franchement, qui peut prétendre fixer un seuil supportable pour les transferts ? Selon quels critères objectifs, le nombre de passes décisives ou de buts marqués ? Les belles discussions de comptoir lors des plateaux télé sur qui vaut quoi ou qui réalise un beau coup avec tel « achat » de joueur ont-elles une seule fois permis d’y voir un peu plus clair ? Ont-ils prédit un seul chèque finalement signé ? Quand certains proclament qu’ « il » ne les vaut pas, cela impliquerait-il que d’autres mériteraient ce jackpot aux allures de méga-cagnotte de l’Euromillions ? Le simple principe du transfert, des manœuvres obscures auxquelles il donne inévitablement libre court entre agents et clubs, reste le problème de base.

La réalité est plus limpide : les clubs des cinq grandes ligues européennes ont dépensé un peu plus de deux milliards d’euros pour le transfert définitif de joueurs professionnels lors du mercato estival 2013, nous apprend le Football Observatory du CIES. Nous sommes bien loin de la cure d’austérité tant annoncée. Ce trafic d’hommes devenus à la fois outils de production et salariés n’a de toute façon pas à connaître de plafond. Dès le premier centime d’euro, il explose les normes morales dont se drapent ceux qui s’insurgent du cas Bale ou même du comportement de Thauvin et de son « prix » pour l’OM. Ce marché ne connaît aucune loi, et certainement pas celle de l’utopie libérale de l’offre et de la demande. Il a pourtant sa cohérence et ces sommes ne sont pas perdues pour tout le monde.

Ce qui semble vraiment inquiéter les pontes du foot, et fonder le souci de Michel Platini et son fameux fair-play financier, c’est de voir l’édifice s’écrouler à force d’endettement des clubs qui finiraient par oublier de régler la note. Pour l’instant, ce scénario catastrophe tant annoncé paraît ne jamais se produire et, hormis quelques boucs émissaires à la marge (Málaga ou dans les ex-pays de l’Est), les gros ténors européens continuent de jouer au Monopoly pendant que banquiers et riches propriétaires raquent. Le capitalisme, surtout sportif, est irrationnel par essence, parce qu’il naît de rapports de force sans cesse mouvants. Ce sont les acteurs économiques qui essaient après coup de rationaliser leur comportement. En attendant le prochain record.

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Par Nicolas Kssis-Martov

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