- Euro 2016
- 1re journée
1-0, 2-1… Bah alors, c’est l’Euro ou la Ligue 1 ?
Jusqu’à ce soir, personne n’y arrivait. Pour la première fois de la compétition, l’Allemagne s’est imposée face à l'Ukraine avec deux buts d’écart, élargissant un peu le spectre des résultats précédents. Parce que jusqu’ici, c’était plutôt 1-0, 2-1 ou 1-1. Bordel, le revoilà. C’est le syndrome Ligue 1.
On pourrait parler d’un plafond de verre, s’il n’était pas aussi visible. On l’a cramé depuis le haut du Stade de France dès vendredi dernier. Voilà trois jours que l’Euro a commencé, et pas une envolée : rien pour péter le placo, personne pour ouvrir la trappe et passer la tête à l’étage d’au-dessus. Même Luka Modrić, pourtant en très grande forme cet après-midi face à la Turquie, n’a pu faire marquer sa pointe Mandžukić.
Non, décidément, ce soir encore, pas moyen de faire sauter cette foutue barre des deux buts. Les favoris multiplient les victoires étriquées, comme pourris par des stades trop habitués aux matchs fermés du vendredi soir sur Canal+. L’Allemagne a débarqué, ce soir encore, en confirmant qu’on est surtout champion du monde avec une bonne défense. Et le compte est digne d’une ZEP : 8 matchs, 12 buts. Une toute petite moyenne de 1,5 but par rencontre, contre 2,45 à la clôture de l’Euro 2012. Oui, le spectre de notre Ligue 1 adorée flotte au-dessus de cet Euro.
10-moi ton numéro, je te dirai qui tu es
L’équipe de France avait tout d’abord insufflé vendredi un rythme bien franchouillard, un 2-1 des familles sans vraies folies – excepté une – face à un 11 logiquement regroupé en défense. Puis hier, c’était l’heure des poilus du ballon. De ce bloc défensif russe prêt à crever dans ses propres tranchées plutôt que d’en sortir plus que le temps d’une percée : le Vélodrome pensait enfin voir du jeu après une saison de négation, il aura observé des Anglais mollassons et punis par pêché d’individualité. Histoire d’entrer tranquillement dans la compétition, les bonhommes se sont dit que le rythme lent, ici, ne choquerait pas. Finalement, ils sont presque sympas, ces étrangers. Se mettre au niveau Ligue 1, marquer sur coups de pied arrêtés et jouer en contre-attaque, premièrement. Pour le beau jeu, on attendra les deuxièmes matchs.
Pourtant, il y a de belles individualités. Modrić ce dimanche, Kokorin samedi, Payet vendredi. Mais si là n’était pas le problème ? Si cet Euro était celui des 10 et non celui des 9 ? Problème : un 10, ça ne marque pas. Enfin, moins qu’une pointe. Cet Euro, c’est finalement celui des coups d’éclat que la Ligue 1 connaît bien, avec des stars qui connaissent le terrain. En adoptant ce même schéma, on peut être sûr que les vrais stars de la compète seront « françaises » : Ibrahimović, éblouissant au premier tour, ira claquer le même total de buts que Nicklas Bendtner en 2012 (3) et égaler le record de Michel Platini (9). Eden Hazard mènera la Belgique en finale et Raphaël Guerreiro le Portugal en demies, éliminé par la Tchéquie de Jaroslav Plašil…
Tout n’est que mentalité
Sans déconner, l’explication est peut-être un peu plus simple. Le poncif habituel des premiers tours de compétition joués la peur au ventre n’est peut-être pas satisfaisant, mais il est vrai. Souvenez-vous en 2010, quand la Suisse était venu taper l’Espagne au sommet de son art à Durban, la Roja ne s’étant à l’époque inclinée qu’une seule fois sur ses 47 derniers matchs. Un faux pas, et c’est déjà le péril. L’exemple peut prêter à sourire, quand on connaît l’issue de 2010. Mais le format de l’Euro ne laisse que très peu de place à l’erreur.
D’abord défendre, marquer si possible, mais SURTOUT ne pas perdre. Eh bien la voilà. La voilà, la mentalité Ligue 1. Plus qu’une question de capacités, ce premier tour confirme surtout quelque chose de réconfortant : même avec les meilleurs joueurs d’Europe, tout n’est qu’une question de mentalité. Notre Ligain n’est pas plus mauvaise que les autres, elle est simplement plus frileuse. Bon, les pelouses jouent peut-être un peu. Ou les supporters. Ou les stades. Ou le fric. Mais ça, on le verra au second tour. Ce soir, l’Allemagne s’est imposée par deux buts d’écart, même si elle a marqué son second but dans les arrêts de jeu. Ce lundi, on aura peut-être droit à une équipe qui marque… trois buts. Mais chut, ne le disons pas trop fort, ça fait un peu peur.
Par Théo Denmat